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Haïti : Comprendre le mouvement intersectoriel qui a obtenu la chute d’Aristide

P-au-P., 22 juin 05 [AlterPresse] --- L’Institut Culturel Karl Levêque (ICKL) organise ce 24 juin une conférence-débat autour du mouvement social intersectoriel ayant conduit à la chute du régime lavalas de Jean Bertrand Aristide.

Ce mouvement réunissait de larges franges de la bourgeoisie, des étudiants, des éléments de la classe moyenne, des organisations féministes, des syndicats et des organisations dites populaires. Des partis politiques de toutes idéologies confondues se sont associés à cette mobilisation contre celui qui a été considéré comme le principal violateur des droits de la personne humaine et l’ennemi juré de la démocratie.

Le rôle du secteur populaire et les caractéristiques du processus, le mouvement de 2004 comme expression du rapport sociopolitique dans le contexte actuel en Haïti, les différences par rapport aux mouvements sociaux de certains pays d’Amérique Latine réfractaires à l’impérialisme et au néo-libéralisme américain, seront débattus.

L’ICKL dit constater qu’une année après la fin du régime Lavalas, les groupes sociaux qui se sont concertés pour faire échec à la dérive lavalassienne sont morcelés, chacun défendant ses propres intérêts. « Aujourd’hui, le ‘secteur progressiste’ ayant pris part à ce mouvement a toutes les peines du monde pour se positionner face aux problèmes de toute sorte que connaît le pays », constate l’ICKL dans une note transmise à AlterPresse.

Le secteur progressiste « a perdu toute capacité de sensibiliser les gens sur la hausse du coût de la vie empêchant aux couches les plus défavorisées de subvenir à leurs besoins primaires », déplore l’ICKL citant à titre d’exemple les sit-in intermittents d’une dizaine d’organisations devant le siège du ministère du commerce.

Selon l’institut, le mouvement intersectoriel de 2004 visait tout simplement à débarrasser le pays d’Aristide. Il n’avait pas pour objectif de mettre en avant les revendications des masses croupissant dans la misère la plus abjecte.

Dans sa forme de lutte, la mobilisation contre le régime lavalas ressemble parfaitement au mouvement social de la première décennie précédant la chute du régime des Duvalier (1986). La différence réside au niveau du nombre de catégories sociales différentes impliquées dans la démarche. « Ce sont une fraction de la bourgeoisie sous le label du Groupe des 184 et les partis politiques traditionnels qui avaient le leadership de ce mouvement. En ce sens, les revendications allaient en faveur d’une démocratie libérale (...) et hormis certaines organisations qui se disent populaires, les résidents des quartiers défavorisés étaient très peu représentés », souligne l’ICKL.

Les étudiants de l’Université d’Etat d’Haïti, particulièrement de la Faculté des Sciences Humaines (FASCH) et de l’Institut National d’Administration de Gestion et des Hautes Etudes Internationales (INAGHEI) victimes des violences aveugles des partisans d’Aristide le 5 décembre 2003, ont été le fer de lance de la mobilisation contre le pouvoir d’alors.

Certains secteurs qui avaient participé à ce mouvement ne voient pas d’un bon œil le gouvernement intérimaire qui, jusqu’ici, ne fait rien pour apaiser la misère des démunis et ne parvient pas à juguler l’insécurité et la violence qui sèment le deuil et affectent les activités, surtout à la capitale. [do gp apr 22/06/05 11:00]