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Timoun Kè Kontan : une réponse et un message à la responsabilisation contre la violence

Port-au-Prince, 07 juin 05 [AlterPresse].- Sous les auspices de la branche haïtienne du Fonds des Nations Unies pour l’Enfance (UNICEF), des représentants des secteurs public et privé ont dressé, le 2 juin 2005, un bilan positif de l’expérience conduite avec plus de 13 mille enfants dans des centres éducatifs et récréatifs de cinq villes du pays du 9 août au 13 septembre 2004.

« Le programme Timoun Kè Kontan (Enfants heureux) est la réponse à cette violence aveugle et destructrice, cette violence inacceptable qui frappe la société, mais les plus vulnérables, les enfants », a souligné Antoine Levelt, directeur exécutif du Fonds de Parrainage National (FPN) qui a participé à l’initiative.

Les leçons tirées du camp d’été 2004 ont été mises en évidence à l’occasion en vue de lancer un livre appelé « Timoun Kè Kontan, un projet pilote d’appui psychosocial pour les enfants vulnérables d’Haïti », un ouvrage relatant les démarches accomplies, les actions réalisées, les difficultés enregistrées et les perspectives envisagées.

La proximité des élections, les complications liées au contexte politique d’insécurité grandissante et ne favorisant pas une mobilisation du secteur privé (qui avait contribué pour un montant de 100 mille dollars américains en 2004), sont autant de facteurs qui feront réduire les ambitions pour l’été 2005, a indiqué Frantz Liautaud, président du comité de pilotage du projet Timoun Kè Kontan.

3,000 enfants des Gonaïves, la cité de l’Indépendance où le projet a connu ses plus graves difficultés de gestion, pourront cette année bénéficier de l’expérimentation faite en 2004. Il n’est pas prévu, pour le moment, d’actions dans d’autres villes, comme Port-au-Prince, Petit-Goâve, Saint-Marc, Cap-Haïtien, choisies l’année dernière en raison des réalités particulières vécues par les enfants, notamment dans la période ayant précédé la chute du régime lavalas en février 2004.

Le Ministère de l’Education Nationale va se pencher sur des activités de suivi, a promis son directeur général Emmanuel Michel Basile, présent à la cérémonie de lancement de l’ouvrage.

Le projet Timoun Kè Kontan pourrait être converti en une fondation qui s’efforcerait de toucher environ 50,000 enfants en 2006 et de reprendre le partenariat avec la représentante sortante de l’UNICEF, la belge Françoise Gruloos-Ackermans, dans l’espoir d’un éventuel retour en 2008, a souhaité Frantz Liautaud.

La cérémonie de lancement de l’ouvrage s’est transformée en un hommage adressé à Gruloos-Ackermans, pour son support à l’initiative. Gruloos-Ackermans devra incessamment laisser le pays pour aller occuper d’autres fonctions à Genève au terme de deux années passées en Haïti, d’avril 2003 à juin 2005.

Au-delà de la violence, des portes fermées, des menaces et autres, le pari « gagné » avec Timoun Kè Kontan a permis de multiplier un geste de sourire à plus de 14 mille enfants, grâce à l’engagement, la confiance et le don de soi de différents partenaires.

« C’est une victoire du cœur sur la raison et la preuve qu’il n’y a pas de fatalité. Cela signifie aussi l’urgence de changer les choses en Haïti, un pays très attachant où j’ai rencontré des gens extraordinaires et où j’ai appris à dire non, car on ne peut pas tout faire », a signalé Gruloos-Ackermans, très émue et les larmes aux yeux.

La représentante sortante de la branche haïtienne du Fonds des Nations Unies pour l’Enfance a prévenu qu’avec son départ, l’agence onusienne ne va changer ni de priorité, ni de philosophie, d’autant que l’équipe de terrain se révèle solide.

« Compter sur les femmes et les hommes de cœur, mettre fin à la violence qui détruit les enfants (finis les enfants de la rue, finis les enfants domestiques, finis les enfants soldats, finis les enfants maltraités), se responsabiliser davantage, chacune et chacun », a appelé Françoise Gruloos-Ackermans à l’endroit des Haïtiennes et Haïtiens en leur disant en créole « Mèsi anpil ».

Après avoir offert un spectacle artistique de qualité, puisé à l’apprentissage du camp d’été 2004, les enfants ont déclaré regretter le départ de la représentante sortante de l’UNICEF à qui ils ont remis un tableau d’un artiste haïtien.

« Vous nous quittez, par peur de la situation. Vous auriez pu revêtir un gilet pare-balles et rester avec nous », a laissé entendre l’un des enfants.

Ce message n’a pas été délivré devant le ministre de la Justice, Bernard Gousse, qui s’est éclipsé quelques minutes avant le début de la cérémonie déroulée en présence des ministres de l’Agriculture et des Haïtiens Vivant à l’Etranger, respectivement Philippe Mathieu et Alix Baptiste.

En l’absence du ministre de l’Education Nationale, c’est plutôt l’ingénieur-agronome Mathieu, qui, au nom du gouvernement, a rappelé que l’équipe de transition a pour mandat de construire l’avenir du pays dans la tolérance et l’acceptation de l’autre, par la mise en place d’espaces de dialogue et de créativité.

« Il faut inciter à la multiplication d’expériences, du genre Timoun Kè Kontan qui a permis d’amener (beaucoup d’enfants) à d’autres lieux et de leur donner d’autres références comme la famille », face au constat de « politiques économiques désastreuses, de services sociaux qui n’ont pas suivi et de la marginalisation, notamment d’enfants, qui porte (ces derniers) à devenir des instruments de la violence », a plaidé Mathieu. [rc apr 07/06/05 13 :00]