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Droits humains/Choléra : Un tribunal populaire à Port-au-Prince, ce mardi 20 octobre 2020, pour juger les crimes de la Minustah en Haïti

P-au-P, 19 oct. 2020 [AlterPresse] --- Plusieurs organisations, dont la Plateforme haïtienne de plaidoyer pour un développement alternatif (Papda) organisent, le mardi 20 octobre 2020, à Port-au-Prince, un tribunal populaire, pour juger les crimes de la Mission des Nations unies pour la stabilisation en Haïti (Minustah), selon les informations transmises à l’agence en ligne AlterPresse.

Des représentantes et représentants d’organisations de la société civile et plus spécialement les mouvements sociaux participeront à ce tribunal populaire, dont le but est d’exiger également justice et réparation en faveur des victimes du choléra en Haïti.

Ce tribunal d’opinion, qui sera présidé par une « Cour » composée d’avocates et d’avocats, et d’expertes et d’experts en droits humains, viserait à permettre aux victimes du choléra de trouver justice, 10 ans après l’introduction de la maladie en Haïti, plus précisément dans l’Artibonite, par des casques bleus Népalais de la force onusienne.

Le mercredi 21 octobre 2020 marquera le 10e anniversaire de l’arrivée du choléra, dans le pays.

L’événement du mardi 20 octobre 2020 rassemblera des conseils d’avocates et d’avocats, qui représenteront les Nations unies et les victimes, qui seront là pour témoigner, ainsi que des témoins et des experts scientifiques, explique Camille Chalmers, directeur exécutif de la Papda, en conférence de presse, à laquelle a assisté l’agence en ligne AlterPresse.

La séance sera suivie d’une plaidoirie contradictoire, qui s’achèvera par un verdict prononcé, après délibération, par un jury constitué de différents secteurs de la société.

Ce verdict servira de nouvel outil de mobilisation, permettant d’intensifier la lutte et d’offrir plus d’opportunités aux victimes pour trouver réparation.

Le tribunal populaire du 20 octobre 2020 à Port-au-Prince devrait ouvrir la voie à d’autres tribunaux populaires internationaux, pour juger les crimes de l’Organisation des Nations unies (Onu) en Haïti, plus particulièrement le choléra, précise un document.

Sur le territoire national, le choléra a fait officiellement au moins 10.000 morts et infecté 800 mille personnes. Les organisateurs du tribunal parlent d’environ 30.000 morts, sans oublier des dégâts considérables sur l’économie du pays, entraînant une réduction de la production rizicole dans le département de l’Artibonite. Les

« Il faut qu’il y ait réparations individuelles de toutes les familles des personnes décédées, réparations communautaires, réparations pour le pays par rapport aux dommages économiques subis et une réparation vis-à-vis de l’avenir, en créant les conditions pour éviter à nouveau ce scandale, comme assurer l’accès à l’eau potable pour toute la population ».

« Ce tribunal populaire se substituera au tribunal formel. Vu que la justice formelle, dans ce système actuel, ne peut pas jusqu’ici donner des résultats, nous frappons à la porte de la justice populaire, qui nous est d’une grande importance, car le dossier du choléra dépasse le cadre d’une justice formelle », a déclaré de son côté, Me. Patrice Florvilus, directeur du cabinet d’avocates et d’avocats spécialisés en litige stratégique de droits humains (Calsdh), une des organisations initiatrices du tribunal populaire du 20 octobre 2020 à Port-au-Prince.

« Quand la justice formelle faillit à sa mission, le peuple a son mot à dire », insiste Florvilus, annonçant, toutefois, la poursuite des démarches au niveau international.

Parallèlement, le cabinet d’avocates et d’avocats spécialisés en litige stratégique de droits humains déplore l’attitude de l’Organisation des Nations Unies (Onu), qui n’a jusqu’ici pas accepté ses responsabilités civiles dans le dossier du choléra en Haïti.

« Sous prétexte de dédommagement collectif, dans des projets bidons, l’Onu a dépensé, à travers le Bureau des Nations unies pour les services d’appui aux projets (Unops), près de 150 mille dollars par sections communales, dont 4 sections communales à Mirebalais, pour construire de petits marchés, dans le cadre du choléra », a dénoncé Vilner Benjamin, coordonnateur de l’ Asosyasyon viktim kolera kafou (Asovik).

Cet argent, pour les projets pilotes visant à mettre en place de petits marchés publics, devrait plutôt être redirigé vers des projets pilotes, via les organisations, qui peuvent vraiment commencer à aider les victimes, dans le cadre d’opérations de dédommagement, suggère Vilner Benjamin.

Ce tribunal populaire est l’initiative de la Plateforme haïtienne de plaidoyer pour un développement alternatif (Papda), de la Plateforme des organisations haïtiennes de défense des droits humains (Pohdh), du Cabinet d’avocates et d’avocats spécialisés en litige stratégique de droits humains (Calsdh), du Réseau national de défense des droits humains (Rnddh), de la Commission épiscopale (catholique romaine) Justice et paix (Ce-Jilap) et de l’organisation Konbit fanm Saj.

Le lundi 19 octobre 2020, en mémoire des victimes du choléra, une messe de souvenir, suivie d’une marche pacifique, a eu lieu à Mirebalais (département du Plateau central), où les premiers cas d’infection au choléra ont été identifiés, en octobre 2010, sur une base des casques bleus Népalais de l’Onu.

L’Onu a, tout d’abord, nié sa responsabilité dans l’introduction du choléra en Haïti, avant que l’ex-secrétaire général de cette organisation, le Sud-coréen Ban Ki-Moon, en reconnaisse une responsabilité morale. [mj emb rc apr 19/10/2020 15:40]