Croix-des-Bouquets (Haïti), 17 juill. 2020 [AlterPresse] --- Le Réseau frontalier Jeannot Succès (Rfjs) et le Service jésuite aux migrants (Sjm) appellent les autorités haïtiennes à renforcer les mécanismes de prévention de la pandémie de Covid-19 (le nouveau coronavirus) sur la frontière haïtiano-dominicaine, dans des interviews accordees à AlterPresse/AlterRadio.
Les dispositifs de prévention, mis en place par le Ministère de la santé publique et de la population (Mspp), sont seulement remarqués dans 3 des 4 points officiels de passage sur la frontière haitiano-dominicaine (Malpasse/Malpaso-Jimani, Belladère/Comendador-Elías Piña, Ouanaminthe/Dajabón) - respectivement dans l’Ouest, le Plateau central et le Nord-Est d’Haïti -, constate Manise Elie, coordonnatrice nationale du Réseau frontalier Jeannot Succès (Rfjs) pour la promotion et la défense des droits humains [1], qui s’exprimait, le mercredi 15 juillet 2020, à l’émission FwoteLide, sur AlterRadio 106.1 Fm.
Pourtant, il y a 104 points non officiels de passage sur la frontière haïtiano-dominicaine, dont Fonds-Verrettes et Grand-Bois/Cornillon dans le département de l’Ouest.
Les autorités sanitaires haïtiennes procèdent à une prise de température des personnes, revenant de la République Dominicaine, dans les 3 points officiels frontaliers mentionnés.
Au cas où le niveau de température des ressortissantes et ressortissants est assez élevé, un test de dépistage du virus de Covid-19 est effectué, rapporte le Rfjs.
En attendant les résultats du test effectué, un espace est aménagé pour une mise en quarantaine.
À Malpasse, Belladère et Ouanaminthe, les personnes, qui présenteraient des symptômes confirmés de nouveau coronavirus, après les tests, sont référées dans des centres de prise en charge.
De janvier à juin 2020, le Réseau frontalier Jeannot Succès a recensé les rapatriements de 20,742 migrantes et migrants haïtiens, sur les points officiels et non officiels.
Durant ce premier semestre de l’année 2020, (un nombre de) 7,821 Haïtiennes et Haïtiens ont sont revenus de manière spontanée ou volontaire vers le territoire national. La majorité de ces personnes ont traversé les points frontaliers non officiels.
Le Rfjs déplore le manque de dialogue entre les autorités haïtiennes et dominicaines, depuis l’annonce de la fermeture de la frontière, le jeudi 19 mars 2020.
« S’il y avait une entente, les deux États ouvriraient la frontière, à un moment où ils pourraient profiter des mêmes opportunités ».
Le gouvernement de facto du premier ministre Joseph Jouthe avait annoncé, fin juin 2020, la réouverture des points frontaliers. Mais, le gouvernement dominicain a indiqué, un peu plus tard, maintenir la fermeture des points frontaliers avec le territoire d’Haïti.
Entre-temps, des transports illégaux de marchandises vers Haïti continuent d’avoir cours, sur la frontière avec la République Dominicaine, selon les observations du Rfjs.
Depuis le début, le 20 mars 2020, de la crise sanitaire due au Covid-19, plusieurs localités en Haïti, qui dépendent totalement des échanges avec la république voisine, sont globalement affectées, notamment au niveau de la santé et des produits alimentaires.
Les Haïtiennes et Haïtiens, qui sont victimes d’exactions sur le territoire dominicain, continuent d’être accompagnés, en ce qui concerne, par exemple, les suivis dans les tribunaux, par les monitrices et moniteurs de droits humains du Réseau frontalier Jeannot Succès.
Depuis mars 2020, le Rfsj entreprend des campagnes de sensibilisation sur l’épidémie de Covid-19, auprès des différentes communautés frontalières.
Absence de dispositifs institutionnels de prévention de Covid-19 au point frontalier Anse-à-Pitres/Pedernales, relève également le Service jésuite aux migrantes et migrants
Il n’y a pas de dispositions prises, pour tester les personnes revenant de la République Dominicaine au niveau du point frontalier Anse-à-Pitres/Pedernales, signale, pour sa part, le révérend-père (catholique romain) Jean Robert Déry, directeur national du Sjm, qui intervenait également, le mercredi 15 juillet 2020, à l’émission FwoteLide, sur AlterRadio 106.1 Fm.
La réalité d’absence de dispositifs institutionnels au point frontalier Anse-à-Pitres/Pedernales persiste encore, malgré l’annonce de la décision gouvernementale de rouvrir les points frontaliers officiels, sans contrepartie de la République Dominicaine [2].
Par contre, dans les autres points officiels, « il y a un contrôle de prise de température. Les cas suspects sont référés à des hôpitaux, puis placés en quarantaine domiciliaire, en attendant que le ministère de la santé publique puisse prouver que cette personne soit positive ou non ».
Pendant que beaucoup de points frontaliers sont dépourvus de présence des autorités sanitaires, la majorité des personnes, qui retournent sur le territoire national, ne sont pas testées, ni ne subissent aucune prise de température. Qui plus est, les zones frontalières sont toujours marginalisées par l’État haïtien.
La plupart du temps, les personnes revenant de la République Dominicaine ne portent ni des masques, ni des lunettes de protection.
Lors des prises de température, dans les points frontaliers où existe une structure sanitaire, même les agentes et agents du Mspp ne portent toujours pas de masques, ni de lunettes de protection.
Les riveraines et riverains, au niveau des zones frontalières, ne prennent pas forcément au sérieux la réalité de la pandémie de Covid-19. Un déni, qui pourrait provoquer une augmentation des cas de contamination au nouveau coronavirus sur le territoire national, avertit le Service jésuite aux migrantes et migrants.
Pour contribuer dans la lutte contre la propagation du virus de Covid-19, le Sjm affirme avoir financé l’achat de masques de protection, d’alcool et de gels hydro-alcooliques.
Le Sjm a également procédé à la distribution de nourriture, dont le manque a principalement empêché la plupart des citoyennes et citoyens de rester chez eux, depuis le début de la crise sanitaire due au Covid-19.
Pour contrôler plus ou moins les cas importés de nouveau coronavirus, à travers tous les points frontaliers officiels, l’État devrait établir les mêmes dispositifs, que ceux à Malpasse, comme la prise de température et le lavage des mains.
Certaines personnes, en provenance des États-Unis d’Amérique, passent par les points frontaliers entre Haïti et la République Dominicaine, relève le Service jésuite aux migrants. [mj emb rc apr 17/07/2020 13:15]
[1] Ndlr : Organisme communautaire à but non lucratif, le Réseau frontalier Jeannot Succès, fondé le 2 juillet 2001, est constitué d’un ensemble d’organisations de base dénommées Komite dwa moun, placées tout le long de la frontière haitiano-dominicaine, pour défendre les droits des migrantes et migrants. Jeannot Succès fut un jeune migrant haïtien, assassiné à l’âge de 23 ans, le 13 août 2000, par des militaires dominicains, dans la communauté de Hondo Valle (République Dominicaine), non loin de la communauté de Miguel (république d’Haïti), une localité de la commune frontalière de Savanette (bas Plateau central).
[2] Ndlr : au 17 juillet 2020, sur 48,671 cas confirmés (depuis le dimanche 1er mars 2020) d’infection au Covid-19 (dont 1,072 en 24h), la République Dominicaine a enregistré 941 personnes mortes et 23,636 personnes guéries.