Le docteur en sciences de l’éducation, Jacques Abraham, préconise une optimisation de la qualité de l’offre pédagogique, la planification de l’offre de l’éducation, dans une perspective d’inclusion, et la définition du socle de compétences. Le ministère de l’éducation nationale devrait aussi favoriser la construction de groupes d’écoles et de binômes mixtes, dans la mesure du possible, c’est-à-dire grouper les écoles déstabilisantes et défavorisées, avec les écoles efficaces, pour que les enfants, qui appartiennent à ces écoles déstabilisantes, puissent apprendre de leurs camarades.
P-au-P, 16 juill. 2020 [AlterPresse] --- Le docteur en sciences de l’éducation, Jacques Abraham, établit un ensemble de démarches et d’actions, qui pourraient, selon lui, réduire les inégalités sociales à l’école en Haïti.
Il faut mettre en place plusieurs mécanismes, pouvant mitiger et atténuer les inégalités sociales à l’école, en Haïti, comme l’homogénéisation de la qualité des établissements scolaires, souligne Abraham, qui intervenait, ce jeudi 16 juillet 2020, à la troisième session de la série de Webinaires, sur la science ouverte et la recherche, dont des extraits ont été diffusés à l’émission FwoteLide sur AlterRadio 106.1 Fm.
Les dispositifs à mettre en place devraient s’adresser et profiter à toutes et à tous, dans le sens d’une éducation inclusive, explique-t-il.
Or, les mécanismes, adoptés par le Ministère de l’éducation nationale et de la formation professionnelle (Menfp), particulièrement depuis le début ( Ndlr : le jeudi 19 mars 2020, date qui correspond à la confirmation officielle des 2 premiers cas d’infection au Covid-19) de la crise sanitaire due au Covid-19 (le nouveau coronavirus) ne font que renforcer les inégalités scolaires, voire les ségrégations scolaires, estime le Dr. Jacques Abraham.
Aussi, appelle-t-il à mettre en œuvre une politique de mixité scolaire et sociale, qui viserait à mettre en interaction les élèves forts avec les élèves faibles, pour que ces derniers puissent en profiter et bénéficier d’une éducation de qualité.
Il convient d’empêcher le recours à des tests d’examens comme outils de sélection et d’élimination.
Jacques Abraham préconise une optimisation de la qualité de l’offre pédagogique, la planification de l’offre de l’éducation, dans une perspective d’inclusion, et la définition du socle de compétences.
Les élèves doivent être amenés à travailler en équipes, en public, entre autres.
Le Menfp devrait aussi favoriser la construction de groupes d’écoles et de binômes mixtes, dans la mesure du possible, c’est-à-dire grouper les écoles déstabilisantes et défavorisées, avec les écoles efficaces, pour que les enfants, qui appartiennent à ces écoles déstabilisantes, puissent apprendre de leurs camarades.
Dr. Jacques Abraham plaide également pour une politique à long terme, devant permettre de résoudre les problèmes d’inégalités sociales dans les écoles en Haïti.
« On ne peut pas résoudre ces problèmes d’inégalités sociales à l’école, s’il n’y a pas une politique sociale, globale, pour accompagner les changements scolaires, en vue de modifier les rapports sociaux d’inégalités ».
Les inégalités sociales à l’école s’expriment sur le fond des inégalités entre élèves, affirme le docteur en sciences de l’éducation.
Ces inégalités sociales à l’école se manifestent à travers deux phases : la phase quantitative, appelée l’inégalité d’accès, et la phase qualitative, qui concerne les inégalités de réussite scolaire.
Les inégalités qualitatives dépendent moins des actions des autorités publiques, car elles sont principalement engendrées par le comportement différencié des familles. Ce qui fait que les politiques publiques ont peu d’effets sur la phase qualitative, poursuit-il.
« L’inégalité sociale a pris une autre forme de ségrégation scolaire. En Haïti, un grand nombre d’enfants sont scolarisés dans des établissements, qui concentrent beaucoup d’enfants défavorisés, en raison de facteurs socioéconomiques, académiques et culturels ».
« Leur séparation ou leur regroupement, dans des écoles ou dans des espaces spécifiques, entrave leurs possibilités d’apprentissage et constitue, par le fait même, une violation de leurs droits, et cela agit sur leur réussite scolaire ».
Pour sa part, la professeure Caroline Hudicourt a relevé plusieurs aspects, qui causeraient des inégalités pour la réouverture prochaine des écoles, en ce temps de Covid-19.
Une réouverture des écoles, annoncée par le Menfp pour le lundi 10 août 2020, mais qui devrait être plutôt graduelle, en fonction de multiples facteurs, observe la professeure Caroline Hudicourt.
« Certaines écoles ne seront pas en mesures de rouvrir leurs portes. Toutes les écoles ne pourront pas démarrer l’année scolaire 2020-2021 en même temps, et toutes les classes ne recommenceront pas à la même date. Les difficultés financières vont empirer avec la crise économique ».
Des écoles n’ont travaillé que seulement deux mois et demi, depuis septembre 2019 (pour l’année académique 2019 - 2020), et n’ont rien réellement fait à distance, pendant la crise sanitaire, due au Covid-19 (Ndlr : à partir du vendredi 20 mars 2020, au lendemain de la confirmation officielle des 2 premiers cas d’infection au Covid-19 en Haïti).
Pour d’autres établissements scolaires, la communication entre les professeurs et les élèves a été assurée principalement à travers la plateforme WhatsApp, pour encadrer les élèves.
La professeure Caroline Hudicourt souhaite une poursuite des communications professeurs/élèves via la plateforme numérique WhatsApp, car l’année scolaire 2020-2021 ne s’annonce pas nécessairement facile.
« Les communications via WhatsApp ont été une expérience chaotique, mais quand même constructive », reconnaît-elle.
L’intégration des plateformes numériques et les applications ont permis de rester en contact avec les élèves, se réjouit-elle.
« La technologie a permis un contact plus individualisé avec les élèves et les parents. Les professeurs ont appris à enrichir leurs contenus d’une variété de matériels, disponibles en ligne ».
Même si des écoles sont arrivées à fonctionner, des élèves ont toujours eu des difficultés de travailler à distance.
« Covid-19 en Haïti : les défis de la continuité de l’éducation » était le thème de cette troisième session de la série de Webinaires, sur la science ouverte et la recherche.
Les questions des inégalités sociales dans le milieu scolaire haïtien, les défis et opportunités du numérique, l’avenir des activités d’enseignement-apprentissage, la situation des établissements privés ou encore l’inclusion scolaire ont été parmi les sous-thèmes, abordés par un panel scientifique, composé de chercheuses et chercheurs expérimentés, évoluant dans le domaine de l’éducation.
Cette session de Webinaires est la troisième de la série, initiée, le 2 juillet 2020, par l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco), autour du thème global « Haïti face à la pandémie de Covid-19 : la science ouverte et la recherche au service de la réponse ». [mj emb rc apr 16/07/2020 19:00]