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Haiti : Le Secteur des Droits Humains alarmé par le climat de terreur

Communiqué de 11 organisations de défense des droits humains

Soumis à AlterPresse le 11 mai 2005

L’ensemble des organisations de défense et de promotion des droits humains, signataires de la présente déclaration, sont très préoccupées par la montée vertigineuse de l’insécurité marquée par des cas de kidnapping, d’assassinats, de fusillade indiscriminée et d’autres formes de violations des droits humains dans le pays.

Conscientes de leur mission, elles appellent et somment les autorités de l’Etat et du gouvernement à prendre toutes les mesures urgentes et nécessaires pour redresser la situation et empêcher que les citoyennes et citoyens honnêtes et paisibles ne continuent d’être victimes d’agressions de toutes sortes de la part de bandits armés qui agissent en toute impunité. En effet, il ne se passe guère une journée sans qu’au moins une dizaine de personnes ne soient kidnappées ou tuées par balles à la capitale.

Face à une telle dégradation de l’environnement sociopolitique et économique, la société ne voit malheureusement aucune mesure concrète et réaliste de la part des membres du pouvoir de l’Etat pour combattre l’insécurité, réprimer le kidnapping et rétablir la confiance au sein de la population. La MINUSTAH dont le mandat consiste entre autre, d’assurer le maintien d’un climat sûr et stable dans le pays ne semble pas non plus s’impliquer dans cette tâche.

Les organisations de droits humains soussignées estiment que les principales causes à cette dégradation de l’environnement sociopolitique sont l’impunité, le laxisme du gouvernement et des autorités judiciaires, et le dysfonctionnement de la Police nationale. Cette conjoncture semble être manipulée par des acteurs politiques nationaux et internationaux qui veulent projeter d’Haïti l’image d’un pays qui est devenu une entité chaotique ingouvernable, afin de pouvoir réaliser leurs desseins inavouables et inavoués.

Face à ce constat, les organisations signataires recommandent au Gouvernement les mesures concrètes suivantes :

1- Retrouver et sanctionner les personnes responsables des cas de kidnapping. Dans ce sens, nous saluons l’adoption par le Gouvernement du décret renforçant les peines contre les auteurs de tels actes. Mais de telles dispositions n’auront vraiment d’effet que si elles sont suivies de décisions fermes pour les faire appliquer, ceci en commençant par les éléments au sein de la Police nationale, comme plusieurs fois signalés et dénoncés par la porte-parole de cette Institution.

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2- Adopter, sans délai, des mesures concrètes pour reprendre le contrôle des zones à risques de la capitale tenues en otage, depuis plusieurs mois, par des bandes armées. La liberté des citoyens pour vaquer librement à leurs occupations et pour bénéficier de la protection des instances publiques responsables, sont également des droits fondamentaux auxquels l’Etat haïtien a souscrit (cf. article 13 Déclaration universelle des Droits Humains et la Constitution 1987 en son article 24).

3- Prendre des mesures concrètes pour permettre à la population d’identifier clairement les vrais policiers. Aujourd’hui, on observe dans la rue des hommes en treillis de toutes les couleurs, en maillots ou en uniforme, portant cagoule et armes de tout calibre, sans savoir vraiment s’ils sont ou ne sont pas des membres de la PNH. En plus de l’identification, le sanctionnement de ceux qui sont impliqués dans des actes répréhensibles, dont le kidnapping, contribuera à créer une confiance mutuelle entre la PNH et la population. Le nettoyage au sein de la PNH, annoncé déjà plusieurs fois, traîne encore.

4- Informer régulièrement la population des mesures prises pour combattre le kidnapping, l’insécurité et des résultats obtenus.

5- S’assurer que les biens de la PNH, notamment ses véhicules, soient mis aux services de la population nuit et jour, et non aux services privés de quelques policiers et de leurs proches.

6- Réclamer et obtenir des compagnies de téléphones fonctionnant sur le territoire la gratuité de tout appel vers les numéros d’urgence de la Police. S’assurer de la présence 24 heures sur 24 de personnel pour répondre à ces appels et pour en donner suite.

7- Faire savoir à la population à qui s’adresser au sein de la PNH, dans les cas de kidnapping.

Les organisations de droits humains, signataires de cette déclaration, lancent un appel à la population traumatisée pour ne pas céder aux pressions des bandits qui veulent la mettre à genoux afin de la contraindre à tout accepter. Elles l’invitent, au contraire, à sortir de sa léthargie, à se reprendre, en faisant revivre la solidarité citoyenne qui a toujours caractérisé notre nation face à toute personne en danger, et face à des situations difficiles.

Port-au-Prince, le 9 mai 2005.

Les organisations signataires :

1- Commission Episcopale Justice et Paix

2- CRESFED

3- POHDH

4- Conférence Haïtienne des Religieux

5- IMED

7- GARR

8- HSI

9- CEDH

10- CONAP

11- Centre Toussaint Louverture