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Haïti : Des exigences en vue d’une meilleure pratique du journalisme

P-au-P., 4 mai 05 [AlterPresse] --- Plusieurs célébrations ont marqué en Haïti la journée internationale de la liberté de la presse ce 3 mai, mettant l’emphase sur la nécessité de la vigilance, la responsabilité des journalistes et médias, le respect des règles et l’amélioration des conditions de travail.

Une soirée a été organisée à Port-au-Prince par l’Association Nationale des Médias Haitiens (ANMH), avec la participation de propriétaires de médias, responsables d’associations de presse et journalistes et membres du gouvernement, du Conseil des Sages et de la Mission des Nations Unies pour la Stabilisation en Haïti (MINUSTAH).

Le président de l’ANMH, Richard Widmaer, a salué une évolution positive de la presse haïtienne et a appelé à la vigilance face à la corruption et aux menaces qui prennent d’autres formes. Il a aussi déploré la lenteur de la justice dans le traitement des cas d’assassinats des journalistes Jean Dominique et Brignol Lindor.

« Nous avons parcouru un long chemin » et « nous avons progressé » a noté Widmaier. Il a cependant fait part de sa préoccupation Widmaier a aussi distribution « abusive » de la parole à des délinquants. Il a préconisé le « respect des règles du jeu » par les médias et demandé aux journalistes de faire preuve de « civisme ».

Le Coordonnateur du Groupe de Réflexion et d’Action pour la Liberté de la Presse (GRALIP), Vario Serant, a prôné la culture de la critique dans les milieux médiatiques afin de favoriser l’épanouissement d’un journalisme de qualité en Haïti. « On ne doit pas avoir peur des débats » sur les différents aspects de la pratique de la profession ainsi que des conditions de travail, a-t-il lancé.

Pour sa part, le Secrétaire Général de l’Association des Journalistes Haïtiens (AJH), Guyler Delva, a souligné « un problème sérieux » au niveau de la presse haïtienne, qui, selon lui, ne se préoccupe pas d’éventuelles persécutions contre des journalistes et médias. Il a lancé un appel à l’unité et à la solidarité.

De son coté, la ministre de la culture et de la communication, Magalie Comeau Denis, a rendu hommage à la presse et prôné un rôle actif de l’Etat en vue de l’avancement du métier de journaliste en Haïti. Pour elle, l’Etat doit être « moins laxiste » et ne pas se contenter de « ni réprimer », « ni corrompre », tel que, selon elle, c’est aujourd’hui le cas.

La soirée organisée par l’ANMH s’est déroulée dans une ambiance détendue au son de la musique du groupe de Mamina, une artiste d’origine guadeloupéenne, qui évolue en Haiti.

A la mi-journée, la MINUSTAH et l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la Science et la Culture (UNESCO) avaient convié les journalistes à une conférence-débats autour du thème « la liberté de la presse et la responsabilité des médias en Haïti ».

le chef civile de la MINUSTAH, l’ambassadeur Juan Gabriel Valdès, qui présidait la cérémonie, a dit constater des pas positifs dans le fonctionnement de la presse durant ses 9 mois passés dans le pays. Il a applaudi « une disposition extrêmement positive » des médias qui accordent, selon lui, la parole à toutes les catégories sociales, d’opinions divergentes.

Cependant, Valdes a lancé une mise en garde contre le soupçon, la méfiance, la caricature, la violence verbale qui peuvent entraver le bon fonctionnement de la presse. Il a invité les médias à « refléter et soutenir les lumières du future, les positions de ceux qui veulent soutenir la paix entre les Haïtiens, le droit du peuple à participer librement à la société ».

La liberté des médias incluant liberté d’expression et liberté d’opinion, nous apparaît « absolument essentielle à la consolidation de la démocratie, à la consolidation de l’Etat de droit, et à la bonne gouvernance généralement aujourd’hui et en particulier dans ce pays d’Haïti » a lancé Thierry Fagart, chef de la section des droits humains à la MINUSTAH.

Mais cette liberté, comme toutes les libertés, suppose des « responsabilités », a-t-il poursuivi. Il est évident que dans le contexte politico-social difficile que connaît actuellement le pays, « l’action conjointe entre le gouvernement, le peuple haïtien et la communauté internationale et, bien entendu, la presse, pour une information pluraliste objective, dénuée de toute passion, est fondamentale à la réussite de cette transition » a-t-il ajouté.

Prenant part à la conférence-débat, des journalistes haïtiens ont dénoncé les conditions de précarité dans lesquelles la profession est exercée dans le pays. Telson Fleurismé, de la Télévision Nationale d’Haïti, a soulevé les questions d’assurance vie et santé, de protection sociale, de meilleures conditions salariales, etc.

Rappelant la contribution de ceux qui font métier d’informer à la cohésion sociale, l’avènement de la démocratie, et l’établissement d’un état de droit, Telson Fleurismé a invité ses confrères et consoeurs à œuvrer pour le respect de leurs droits, car pendant trop longtemps, a-t-il dit, « nous avons défendu les droits des autres et méprisé les nôtres » a-t-il conclu.

Le directeur de l’agence en ligne Haïti Press Network (HPN), Clarens Renois, a pour sa part déploré le niveau de médiocrité constaté dans la presse en Haïti et le mode de recrutement dans certains medias. Il a plaidé en faveur d’une formation adéquate des journalistes. [fl gp apr 04/05/2005 14:30]