Par Emmanuel Marino Bruno et Ronald Colbert
P-au-P, 06 juin 2019 [AlterPresse] --- Une nouvelle série de mouvements de protestations sont annoncés en Haïti, notamment dans la zone métropolitaine de la capitale, Port-au-Prince, en vue de contraindre le président Jovenel Moïse à démissionner, observe l’agence en ligne AlterPresse.
Cette nouvelle série de manifestations semble être la résultante des révélations, contenues dans le deuxième rapport d’audit, de 612 pages, de la Cour supérieure des comptes et du contentieux administratif (Cscca), remis au sénat le vendredi 31 mai 2019.
Après le premier, rendu public le 31 janvier 2019, le deuxième rapport de la Cscca épingle, notamment, Jovenel Moïse (devenu président d’Haïti le 7 février 2017), qui aurait utilisé « des stratagèmes de détournements de fonds », à travers sa firme dénommée « Agritrans », dans la gestion de fonds publics du programme PetroCaribe de l’aide vénézuélienne à Haïti.
Le dimanche 9 juin 2019, les différents groupes de petrochallengers - qui avaient mobilisé des centaines de milliers de personnes protestataires, le 17 octobre 2018, à travers Haïti - projettent de manifester, de nouveau, dans les rues de Port-au-Prince, contre la corruption dans l’administration publique.
L’intersection des routes de l’aéroport international de Port-au-Prince et de Delmas, plus connue sous le nom de « Carrefour de l’aéroport » international de Port-au-Prince, est le lieu de rassemblement indiqué pour cette marche.
La mobilisation viserait également à demander l’arrestation et le jugement de toutes les personnes, impliquées dans la dilapidation des fonds PetroCaribe, dont Jovenel Moïse, qui n’a pas été, alors, investi à la présidence politique en Haïti.
De hauts dignitaires de l’État, dont des premiers ministres, ainsi que d’anciens ministres, d’anciens directeurs généraux et des responsables de firmes de constructions sont aussi indexés dans la mauvaise gestion de plusieurs milliards de dollars américains (Ndlr : US $ 1.00 = 96.00 gourdes ; 1 euro= 110.00 gourdes ; 1 peso dominicain = 2.00 gourdes aujourd’hui) de ces fonds publics.
Jovenel Moïse doit démissionner, de la présidence, en vue de se mettre à disposition de la justice, estiment les petrochallengers, regroupés au sein de la structure Nou p ap dòmi.
Une grande mobilisation populaire est, parallèlement, annoncée par le « Secteur dit démocratique et populaire », une frange de l’opposition, pour les dimanche 9 et lundi 10 juin 2019, en vue de réclamer la démission du président.
Pour leur part, des organisations politiques de l’opposition dont le Mouvman vizyonè desalinyen, Anbake pou chanje et Kòd 9 projettent également une marche pour le dimanche 9 juin 2019.
Cette manifestation démarrera sur la place de Dessalines, au Champ de Mars (principale place publique dans la capitale, Port-au-Prince) pour aboutir sur la place d’Italie au Bicentenaire, à proximité du bord de mer de Port-au-Prince.
Cette marche sera suivie d’un sit-in, prévu le mercredi 12 juin 2019, devant les locaux de la Cour supérieure des comptes et du contentieux administratif (Cscca), pour dénoncer l’impunité et la corruption.
Le Mouvement populaire dessalinien (Mopod), l’organisation Konbit òganizasyon politik, sendikal ak popilè et la plateforme politique Pitit Desalin appuient les mobilisations, visant à réclamer la démission et l’arrestation du président Jovenel Moïse.
Ces mouvements de protestations sont aussi appuyés par un grand nombre de secteurs de la société civile, dont des organisations de droits humains et féministes ainsi que de personnalités importantes du pays.
Résurgence de pays « locked », comme du 7 au 18 février 2019 en Haïti ?
Dans l’opinion publique, est agitée l’éventualité d’une nouvelle réalité de pays « locked », comme ce qui a été enregistré pendant deux semaines, en février 2019, en Haïti.
Chacune et chacun sont dans l’expectative...
Beaucoup se demandent si elles ou s’ils doivent faire d’autres planifications, pour le début de la prochaine semaine, à partir du dimanche 9 juin 2019, afin de faire face aux imprévus politiques.
Y aura-t-il des troubles ?
Les prix des biens essentiels risquent de continuer à grimper, sur le marché national, avec des conséquences imprévisibles sur la vie de toutes les couches, dans la population en Haïti.
Quelles incidences sur la fin de l’année académique scolaire 2018 - 2019, qui doit être bouclée, institutionnellement, en juin 2019 ?
De grandes inquiétudes quant à la situation sécuritaire nationale
Quelles dispositions adoptera la Police nationale d’Haïti (Pnh) ?
Sur le plan sécuritaire, la Pnh fait face à de nouveaux phénomènes de banditisme, dont la conquête de pans de territoire par des gangs, considérés comme bénéficiant de la complicité de certaines autorités.
Ces derniers temps, ces gangs n’hésitent pas à s’emparer de camions de marchandises sur les routes nationales, comme sur la route nationale # 1, dans le département de l’Artibonite.
Ces gangs armés procèdent, en toute impunité, à l’enlèvement et à la séquestration de personnes...
La recrudescence de l’insécurité continue de faire de nombreuses victimes, y compris dans les rangs de la police nationale, depuis plusieurs mois, à travers le territoire national, en Haïti, dont à La Saline et à Carrefour Feuilles (Port-au-Prince).
Depuis le 18 mars 2019, date correspondant au renvoi du gouvernement de Jean Henry Céant par la chambre des députés, il n’y aurait plus de réunions du Conseil supérieur de la Police nationale (Cspn)..., avec l’incertitude politique qui pèse...
Grève et sit-in au niveau des institutions publiques
Dans ce contexte de mobilisations anti-gouvernementales, plusieurs fonctionnaires réclament, dans plusieurs institutions publiques, de meilleures conditions de travail et le paiement de plusieurs mois d’arriérés de traitements.
Des employés de la Direction générale des impôts (Dgi) manifestent, depuis trois jours, à compter du mardi 4 juin 2019, sur la cour du siège central de la Dgi, à Port-au-Prince, pour exiger une augmentation de traitements ainsi que le paiement de leurs arriérés de traitements.
Un rassemblement, avec des barricades de pneus usagés enflammés, est organisé, ce jeudi 6 juin 2019, par des fonctionnaires au Ministère de l’éducation nationale et de la formation professionnelle (Menfp), devant les locaux de la dite institution, située à l’avenue Martin Luther King (plus connue sous le nom de « Nazon »), à Port-au-Prince), toujours pour réclamer le paiement de plusieurs mois d’arriérés de traitements.
Idem, mêmes revendications chez des fonctionnaires au Ministère des affaires sociales et du travail (Mast), qui demandaient le paiement de plusieurs mois d’arriérés de traitements, lors d’un sit-in, tenu, le mardi 4 juin 2019, devant les locaux de l’institution, à la rue Charles Sumner, à Port-au-Prince.
Des réalités économiques de plus en plus difficiles, avec une hausse vertigineuse du coût de la vie en Haïti
« Nous n’en pouvons plus. Les prix continuent à devenir de plus en plus élevés. Il n’y a aucune disposition institutionnelle, pour faire face à cette situation de vie très chère, que n’avait jamais connue la république d’Haïti »...
Dans toutes les couches nationales, c’est un cri de révolte, c’est la grogne, face à la détérioration des conditions de vie, caractérisée par une dépréciation accélérée de la monnaie nationale, la gourde, face au dollar américain... et ses conséquences les plus immédiates : une hausse vertigineuse de tous les prix, spécialement des prix des biens essentiels à la consommation quotidienne.
Pour les agentes et agents économiques, la situation socio-économique du pays se dégrade quotidiennement, dans une conjoncture marquée par une inflation estimée à hauteur de 17.7%, la dépréciation de la gourde par rapport au dollar américain (Ndlr : US $ 1.00 = 96.00 gourdes ; 1 euro = 110.00 gourdes ; 1 peso dominicain = 2.00 gourdes aujourd’hui) et la grande cherté de la vie.
Pour combien de temps encore Jovenel Moïse se maintiendra-t-il à la présidence politique, dans un contexte aussi explosif, sur le territoire national ?, s’interrogent plus d’un. [emb rc apr 06/06/2019 13:35]