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Haïti : Une si lourde décision !

Par Gotson Pierre

P-au-P., 09 avril 2019 [AlterPresse] --- La tâche s’avère délicate, pour le président Jovenel Moïse, de choisir, pour la 3e fois, en deux ans, un nouveau premier ministre, dans le contexte de crise multiforme que vit la république d’Haïti, observe l’agence en ligne AlterPresse.

A l’issue de plusieurs journées de discussions, avec des secteurs politiques, dont quelques partis d’opposition, et une séance de consultations des présidents des deux chambres du parlement, trois noms sont sur la table depuis environ 72 heures.

On ne sait toujours pas sur qui se portera le choix final du chef de l’État, entre l’ancien sénateur et maire Jean Gabriel Fortuné, le premier ministre par intérim et ministre de la culture Jean Michel Lapin et l’ancienne consule d’Haïti à Boston (Etats-Unis d’Amérique), Marjorie Alexandre Brunache.

Méfiance

Parmi les responsables politiques, qui ont eu à discuter avec Jovenel Moïse, autour de la situation politique, les réactions ne se sont pas fait attendre.

Le signal reçu est que le chef de l’État ne compterait faire aucun pas, hors de son cercle d’amis, pour tenter d’apaiser les tensions politiques latentes.

L’ancien député Sadrac Dieudonné, du parti politique Mouvement chrétien pour une nouvelle Haïti (Mochrena), est très critique. Il estime que le chef de l’Etat n’a tiré aucune leçon de la crise. Malgré sa récente réunion avec le président, pas question pour lui, dans les conditions actuelles, de s’allier au régime, dont il prédit l’échec.

Mettre sur pied un gouvernement, sans poser les véritables problèmes du pays, contribuera à aggraver la situation, estime, de son côté, le dirigeant de l’Orientation démocratique pour Haiti (Odep-Haïti), Volcy Assad.

« Si le président termine son mandat de 5 ans, ce qui n’est pas sûr, nous irons vers une succession de gouvernements éphémères », avertit Assad, lui qui a accepté de s’asseoir avec Jovenel Moïse, malgré sa position en faveur de la démission du président.

Assad encourage un dialogue national, avec le mandat du chef de l’État sur la table, pour parvenir à un compromis historique.

En dépit de la baisse de la mobilisation anti-gouvernementale, constatée ces dernières semaines, d’autres partis de la même mouvance campent sur leur position et réclament le départ de Moïse.

Épreuves

Quelle que soit l’option, adoptée par le pouvoir en place, les prochains jours risquent d’être éprouvants pour le pays, où le tableau socio-économique demeure très sombre.

Les problèmes à régler représentent de véritables défis.

Un d’entre eux, c’est bien l’approvisionnement du marché en produits pétroliers, tandis qu’une pénurie récurrente affecte le pays depuis janvier 2019. Difficultés d’acquitter la facture pétrolière et tentative de libéraliser le marché, de manière informelle, se conjuguent.

Résultat : rareté du carburant, consommatrices et consommateurs aux abois, hausse considérable des prix de ce produit stratégique et transversal sur le marché parallèle. Jusqu’à 500.00 gourdes (environ 6.00 USD) un gallon de gazoline, soit un doublement du prix. Ce qui fait craindre un retour à la normale, avec des prix ajustés arbitrairement à la hausse.

Et on se souvient des 3 longues journées d’émeutes de juillet 2018, occasionnées par une hausse de plus d’un tiers du carburant.

Il y a aussi, entre autres, la chute continue de la gourde (Ndlr : US $ 1.00 = 84.00 gourdes ; 1 euro = 100.00 gourdes ; 1 peso dominicain = 1.80 gourde aujourd’hui), un déficit budgétaire chronique, l’inflation et la prolifération effrénée des gangs dans les quartiers, à six mois d’une échéance électorale législative, qui paraît incertaine. [gp apr 09/04/2019 00:20]