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Haïti-Politique : Un pouvoir fragilisé face à une opposition qui n’en démord pas

Par : Emmanuel Marino Bruno

P-au-P, 27 nov. 2018 [AlterPresse] --- Le mot d’ordre de grève générale lancé par la coalition Secteur démocratique et populaire, une frange de l’opposition, a été boudé, les lundi 26 et mardi 27 novembre 2018, par la population haïtienne.

Hormis les écoles qui ont fonctionné très timidement, presque toutes les autres activités se sont déroulées normalement à la capitale Port-au-Prince.

Précédemment, deux autres jours de grève tenue les lundi 19 et mardi 20 novembre 2018 pour exiger notamment la démission du président Jovenel Moïse avaient complètement paralysées le pays, fragilisant ainsi le pouvoir en place.

En dépit de tout, le premier ministre Jean Henry Céant a fait clairement comprendre que le mandat de Jovenel Moise ne sera pas mis sur la table des négociations annoncées avec les différents secteurs politiques de l’opposition.

Toutefois, un remaniement du cabinet ministériel serait envisageable.

Pour leur part, plusieurs partis politiques souhaitent que la question de la démission du chef de l’Etat soit aussi mise sur la table des discussions pour qu’ils acceptent de dialoguer avec le pouvoir.

Certains représentants de partis politiques appellent à l’entente pour sortir le pays de la crise actuelle, d’autres ne jurent que par le départ du chef de l’Etat.

Ces derniers jours, l’équipe au pouvoir s’est attelé à durcir le ton à travers des notes et interventions publiques, face aux revendications populaires, souvent émaillées de violences.

Pour leur part, l’ambassade américaine et le Core Group, perçus comme des alliés de l’équipe au pouvoir, ont réitéré leur appui au processus démocratique en cours.

Une rencontre a même eu lieu, le mercredi 21 novembre 2018, à Port-au-Prince entre l’ambassade américaine et plusieurs dirigeants de partis politiques autour de la crise politique haïtienne.

C’est seulement par la voie des urnes qu’on peut arriver au pouvoir dans un régime démocratique, a insisté Kenneth Merten, sous-secrétaire d’État au département d’État américain en charge des relations avec Haïti, dans une interview accordée à « La voix de l’Amérique ».

¨Kenneth Merten est un artisan du pouvoir¨, a vite réagi le sénateur du Nord-Ouest, Evalière Beauplan, qui dit ne pas prendre au sérieux ces déclarations.

Dans une adresse à la nation dans la soirée du mercredi 21 novembre 2018, le président de la République Jovenel Moise a demandé au premier ministre de dialoguer avec tous les acteurs politiques.

Il l’appelle à prendre des dispositions pour garantir la sécurité des vies et des biens de toute et de tous.

De plus, il a confié au premier ministre Jean-Henry Céant la tâche de dialoguer avec les forces de la Nation.

Jovenel Moise doit s’asseoir avec la classe politique pour trouver une solution à la crise, mais pas le chef du gouvernement, a recommandé l’ancien sénateur Jean Hector Anacacis.

Un discours présidentiel qui ne rassure pas

Des protestataires estiment que le président de la république, Jovenel Moïse continue de faire la sourde oreille aux revendications de la population qui réclame une reddition de comptes sur la dilapidation présumée des fonds PetroCaribe et sa démission.

Pour justification, le discours du président n’a pas pris en compte l’essentiel des facteurs ayant engendré une intensification de la crise notamment le dossier PetroCaribe et la dégradation des conditions socio-économiques de la population, entres autres.

Le discours n’a fait allusion à aucun mécanisme à mettre en place pour adresser le dossier des protestataires victimes lors des mobilisations anti-gouvernementales.

N’est-ce pas une façon de minimiser ces mouvements de protestations et de banaliser ces pertes en vie humaines ?

Au moins 40 morts et plusieurs dizaines de blessés sont enregistrés depuis la manifestation du 17 octobre 2018 à date (23 novembre 2018), avait indiqué le Centre d’analyse et de recherche en droits humains (Cardh), dans une lettre ouverte adressée aux autorités.

D’aucuns estiment aussi que le pouvoir a pris trop de temps pour réagir face aux troubles et à la paralysie provoqués par les mobilisations contre les autorités.

Cette lenteur n’est-elle pas un signe de faiblesse des autorités étatiques à rétablir l’ordre par rapport à la situation de troubles et d’insécurité qui règne dans le pays ?. [emb vs apr 27/11/2018 12 :20]