Par Gotson Pierre
P-au-P., 20 nov. 2018 [AlterPresse] --- Après les grandes manifestations du dimanche 18 novembre 2018 et du mercredi 17 octobre 2018 à travers le pays, les représentants des trois pouvoirs de l’État se sont retrouvés, le lundi 19 novembre 2018, au palais national, pour se pencher sur la crise politique, économique et sociale qu’affronte le pays.
Au terme de cette rencontre, ils ont résolu, selon un communiqué, de poursuivre le dialogue avec tous les secteurs de la vie nationale, de résoudre les problèmes liés à l’insécurité et d’intensifier les mesures d’apaisement social.
Il s’agit là de tout un programme, pour une administration qui se trouve dos au mûr, entre des revendications persistantes, exigeant la lumière sur le gaspillage présumé de 3,8 milliards de dollars américains (Ndlr : US $ 1.00 = 76.00 gourdes ; 1 euro = 89.00 gourdes ; 1 peso dominicain = 1.60 gourde aujourd’hui) des fonds de l’aide vénézuélienne PetroCaribe, et les demandes réitérées de démission du président Jovenel Moïse.
C’est au nom de ces réclamations que les activités sont globalement paralysées, durant une deuxième journée consécutive, au lendemain de la mobilisation du dimanche 18 novembre 2018, qui a drainé une foule imposante à la capitale et dans plusieurs autres villes.
Des barricades de pneus usagés enflammés, de pierres et d’objets divers jonchent encore, le mardi 20 novembre 2018, certaines artères de l’aire métropolitaine de la capitale, Port-au-Prince, où les activités ont du mal à reprendre leur cours habituel.
L’opposition veut mettre les bouchées doubles
Dans la foulée des dernières manifestations, des mouvements d’opposition, qui semblent avoir pris du tonus, entendent bloquer le pays durant 3 jours pour obtenir le départ du chef de l’État.
L’enjeu est de voir si l’étau va se resserrer ou se relâcher autour du président. Ce qui est sûr, cependant, c’est que les marges de manœuvre de Jovenel Moïse, de plus en plus impopulaire, se rétrécissent.
Entre-temps, la méfiance ne fait que s’étendre, et la situation économique, déjà désastreuse, ne pourra que s’aggraver après des journées de paralysie. La monnaie nationale a littéralement plongé et le dollar américain se vend à environ 76.00 gourdes.
Le sang
Le sang, qui a coulé durant ces journées de mobilisation, tend aussi à creuser le fossé entre la population et le pouvoir en place.
Le dernier bilan, communiqué par la Police nationale d’Haïti (Pnh), fait état d’au moins 9 morts, 5 blessés et 35 arrestations, alors que les secteurs d’opposition parlent de 11 morts, 45 blessés et 75 arrestations.
A ce propos, la “New england human rights organization” (Nehro) presse les autorités policières et judiciaires de diligenter une enquête pour déterminer les auteurs des actes d’assassinat et de violence perpétrées contre les citoyens. La Nehro exige la libération sans condition des personnes arrêtées et détenues arbitrairement, durant cette journée de manifestation.
Cette organisation déplore également les violences, qui ont été commises, ces derniers jours, dans plusieurs quartiers populaires.
Elle insiste sur la situation, qui prévaut dans le quartier de La Saline (secteur nord), où des attaques de bandits armés auraient fait entre 15 et 25 morts, selon l’organisme de droits humains "Fondation Je Klere" (Fjkl).
Plusieurs quartiers de la capitale sont sous l’emprise de bandes armées rivales. Par exemple, à Martissant (secteur sud), les familles sont quasiment prises en otage. Des individus en armes y font régner la terreur, tuent et pillent en toute impunité.
Plusieurs unités spécialisées de la police ont conduit une opération à Martissant, dans la matinée du lundi 19 novembre 2018, mais les effets sont peu visibles. [gp apr 20/11/2018 11:00]