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Haïti : Conférence nationale versus amendement constitutionnel

P-au-P, 24 sept. 2018 [AlterPresse]--- Plusieurs secteurs politiques dont le Konbit travayè peyizan pou libere ayiti (Kontrapèpla) et le Mouvement patriotique populaire dessalinien (Mopod) rejettent le rapport de la commission spéciale de la chambre basse sur l’amendement constitutionnel et préconisent, préalablement à la démarche de modification de la loi-mère, une conférence nationale.

Il y a une grande confusion dans la démarche privilégiée pour aboutir à un amendement constitutionnel, souligne Jean William Jeanty de Kontrapèpla, invité à l’émission TiChèzBa, le week-end écoulé.

Kontrapèpla fait partie d’un espace de concertation politique qui implique plus de 14 partis et organisations.

Le document, présenté le 28 août 2018, serait, dit-il, en parfaite contradiction avec l’esprit et la lettre de la Constitution de 1987 dont le préambule stipule clairement que toute décision majeure concernant la Nation doit être prise en consultation avec la population.

Le peuple entant que souverain a le droit de s’exprimer sur la décision d’amender la Constitution, soutient-il.

Cependant, le fait que la Constitution ne prévoyait pas de référendum constitue une anomalie à corriger, estime Jeanty.

La commission spéciale ne devrait même pas parler d’amendement de la Constitution mais de révision complète, vu le nombre de propositions (30 au total) de modifications de la Constitution, contenues dans leur travail, argue-t-il.

Ce parlement issu des dernières élections controversées n’a pas la crédibilité ni la légitimité pour entreprendre une telle initiative, critique Kontrapèpla.

L’institution parlementaire avait fait preuve d’un sentiment anti-peuple en votant en faveur du budget 2017-2018 qui a été qualifié de criminel par plusieurs secteurs de la vie nationale, poursuit-il.

Dans le contexte actuel où tout le monde demande un changement de système, la démarche de la commission parlementaire « biaisée à la base » semble s’inscrire dans une logique visant à pérenniser l’ancien système à travers cet amendement, met-il en garde.

De plus, le parlement, qui coûte beaucoup trop cher au trésor public, ne nous représente pas, encore moins la population, dénonce Kontrapèpla.

Le parlement fait semblant de travailler pour le pays, mais consolide le système en place et la corruption, renchérit Dunois Erick Cantave, du Mouvement patriotique populaire dessalinien (Mopod), invité également à l’émission TiChèzBa.

La commission parlementaire devrait consulter réellement tous les secteurs du pays et non des petits groupes d’intérêts, en vue d’aller vers un changement réel et fondamental, avance-t-il.

Il plaide en faveur d’une conférence nationale, la seule capable de permettre d’aboutir à un amendement ou une révision complète de la Constitution, selon le vœu de la population.

Pour sa part, le président de cette commission parlementaire, le député Jerry Tardieu, intervenant la semaine précédente à TiChèzBa, estime que l’Exécutif n’a pas assez de crédibilité ni de légitimité, dans le contexte actuel, pour monter une assemblée constituante pour l’élaboration d’une nouvelle Constitution haïtienne.

Les intérêts d’Haïti ont été mis au premier plan dans le travail de la commission autour de l’amendement de la Constitution, fruit de consultations avec divers secteurs de la vie nationale, tente-t-il de rassurer, tout en indiquant n’avoir subi l’influence d’aucun secteur de la société.

Le député se dit toujours prêt à s’asseoir avec tous les secteurs protestataires pour discuter avec eux autour de cet amendement de la Constitution.

Dans son rapport, la commission spéciale de la chambre basse chargée de travailler sur l’amendement constitutionnel, avait proposé, en substance, un changement de régime politique, dont le remplacement du premier ministre par un vice-président. [emb gp apr 24/09/2018 14 :35]