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23 août, Journée internationale du souvenir de la traite négrière et de l’abolition de l’esclavage

Haïti-Histoire : L’écrivaine Evelyne Trouillot appelle à une reconnaissance de la lutte des femmes

P-au-P, 23 août 2018 [AlterPresse] --- L’histoire d’Haïti serait truffée de stéréotypes, défavorables à une reconnaissance de la lutte des femmes, estime l’écrivaine Evelyne Trouillot, auteure du roman Rosalie L’infâme, lors d’une conférence-débat à Port-au-Prince, le mardi 21 août 2018, sur la littérature et esclavage.

La romancière a critiqué la place insignifiante, accordée aux femmes dans les récits historiques d’Haïti, lors de l’activité, à laquelle a assisté l’agence en ligne AlterPresse, à l’occasion de la journée internationale du souvenir de la traite négrière et de l’abolition de l’esclavage, le 23 août.

La littérature représente, selon elle, un lieu de reconstruction de la parole et du silence des absents.

L’action des femmes est très souvent comprise comme des interludes, des parenthèses. Les femmes et les enfants sont les véritables victimes de ces silences, a-t-elle renchéri.

La contribution des femmes à l’histoire haïtienne n’était pas une exception comme on voudrait le faire croire, puisque la majorité d’entre elles combattaient l’esclavage, avance l’écrivaine.

De nombreux historiens ont l’habitude d’occulter la contribution de beaucoup de personnages dans la lutte pour l’indépendance haïtienne, en s’accrochant uniquement aux principaux héros, a-t-elle dénoncé.

Or, les héros de l’indépendance ne pouvaient rien faire, sans la contribution et la participation des gens oubliés dans les récits historiques, ajoute-elle.

Son roman historique « Rosalie l’infâme », paru en 2003, lui a permis de redécouvrir l’histoire d’Haïti, confie la romancière.

Elle a aussi souligné certaines tragédies et atrocités qu’ont subies les femmes durant la période coloniale.

La littérature sert à restituer la voix de ceux et celles qui ne sont plus là pour parler de l’histoire. Sa tache consisterait à trouver les vérités cachées et les silences de l’histoire, affirme Évelyne Trouillot.

L’écrivaine plaide en faveur de suivis systématiques pour conserver et donner de l’importance aux lieux de mémoire.

Ce travail de mémoire permettrait de sensibiliser la population sur l’histoire du pays. L’éducation est l’élément par excellence pour contribuer à cette conscientisation, a-t-elle soutenu.

La conférence-débat du 21 août 2018 s’inscrit dans le cadre d’un festival pour commémorer les dates historiques liées à la mémoire collective haïtienne à Port-au-Prince (capitale d’Haïti) et dans des villes de province.

Évelyne Trouillot a déjà publié plusieurs ouvrages, notamment La chambre interdite (1996), La mémoire aux abois (2010), Parlez-moi d’amour (2002), Par la fissure de mes mots (2014).

Elle a reçu le prix Soroptimist de la romancière francophone à Grenoble en 2003 avec son roman historique Rosalie l’infâme.

En 2010, grâce à son texte La mémoire aux abois, Trouillot a décroché le 21e prix Carbet de la Caraïbe et du Tout-monde. [fb emb apr 23/08/2018 10 :00]