Par Ronald Colbert
P-au-P, 24 juil. 2018 [AlterPresse] --- La commission permanente justice et sécurité, au sénat de la république, tiendra des séances régulières avec le commandement de la Police nationale d’Haïti (Pnh), pour prévenir des situations difficiles, comme les émeutes violentes qu’a connues le pays du vendredi 6 au dimanche 8 juillet 2018.
C’est ce qui ressort de l’audition, en assemblée plénière, déroulée, pendant plusieurs heures, mardi soir 24 juillet 2018, avec le directeur général de la Pnh, Michel-Ange Gédéon, et d’autres membres du haut commandement de l’institution policière, a observé l’agence en ligne AlterPresse.
La fréquence de ces « rencontres régulières » du sénat avec le haut commandement de la Police nationale d’Haïti, en attendant la nomination du nouveau gouvernement (après la démission officielle, le samedi 14 juillet 2018, de l’équipe de Jack Guy Lafontant) n’a pas été rendue publique.
Objectif : arrêter des mesures, au-delà de la séparation des pouvoirs entre les institutions, assurer des suivis sur l’application des dispositions prises, en attendant l’arrivée de la nouvelle équipe gouvernementale.
Il convient de parvenir à une atmosphère « plus détendue », mais surtout d’éviter des troubles (comme les émeutes de début juillet 2018), a déclaré le président du sénat Joseph Lambert, au moment de mettre fin à la séance d’audition du mardi 24 juillet 2018.
La Pnh a une « responsabilité morale » dans les événements, enregistrés du 6 au 8 juillet 2018, comme l’a reconnu, au début de l’audition, Michel-Ange Gédéon.
Le commandant en chef de la Pnh a déploré les violences, les pertes en vies humaines, le pillage d’entreprises, l’incendie de plusieurs véhicules…, durant les troubles qui ont, notamment, secoué les communes de Delmas et de Pétionville, dixit Gédéon. Il a profité de l’audition du 24 juillet 2018 pour noter les efforts, accomplis, malgré tout - malgré l’apparence d’absence de présence policière dans les rues, au moment des émeutes - par différentes unités au sein de la Pnh : Corps d’intervention et de maintien d’ordre (Cimo), Unité départementale de maintien d’ordre (Udmo), Brigade de recherches et d’intervention (Bri).
Les sénateurs, qui ont participé à la séance d’audition du 24 juillet 2018, ont insisté sur le malaise, entre l’exécutif et la Police nationale d’Haïti. Malaise, provoqué par un arrêté présidentiel, pris en conseil des ministres le 23 mai 2018 et publié le 28 mai 2018, dans le journal officidel « le Moniteur », qui tendrait à réduire les pouvoirs du commandement de la police nationale.
« Les décisions, intéressant les nominations ou transferts au niveau des directions centrales et départementales de la Police nationale, sont soumises à l’approbation du Conseil supérieur de la police nationale (Cspn) », selon l’arrêté présidentiel du 28 mai 2018.
A l’audition du 24 juillet 2018, Gédéon a, de nouveau, mis en garde contre toute « politisation » de l’institution policière, « toutes tentatives de court-circuiter » les canaux de fonctionnement de la Pnh, au mépris de la hiérarchie…
Le haut état-major de la Pnh reste lié au cadre légal de fonctionnement de l’institution policière, cadre tracé (notamment les alinéas 2,5 et 7 de l’article 23) dans la loi du 29 novembre 1994 portant création, organisation et fonctionnement de la Police nationale, a réaffirmé Michel-Ange Gédéon, auditionné par les sénateurs en assemblée plénière, ce mardi 24 juillet 2018.
Suivant la loi du 29 novembre 1994, le directeur général de la Pnh assure la supervision, le contrôle de la bonne marche des services centraux, des commissariats et sous-commissariats territoriaux, sans l’avis du Cspn.
Michel-Ange Gédéon a rejeté, fermement, les allégations de « coup d’Etat », qu’il aurait l’intention d’orchestrer contre les dirigeants tèt kale actuels.
« Depuis 23 ans, mon évolution, au sein de la Pnh, a suivi un cheminement régulier, par les différentes voies de concours, dans lesquels j’ai été lauréat à maintes reprises. Je suis membre d’un seul parti politique, (c’est) la Police nationale d’Haïti », a lancé Gédéon.
Au cours d’une session spéciale, dans la soirée du samedi 7 juillet 2018, à sa résidence privée, le premier ministre démissionnaire Jack Guy Lafontant a admis « qu’il y a eu un problème de timing », dans l’annonce officielle, dans l’après-midi du vendredi 6 juillet 2018 (au moment du match de football Brésil vs Belgique) de l’augmentation, entre 38 et 51%, des prix des produits pétroliers sur le marché national, a rapporté Michel-Ange Gédéon, au sénat, au sujet des émeutes, enregistrées dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince, à partir de l’après-midi du vendredi 6 juillet 2018.
Quant aux problèmes de sécurité globale, sur le territoire national d’Haïti, une évaluation doit être faite et des décisions adoptées, à une rencontre, ce mercredi 25 juillet 2018, du haut état-major de la Pnh avec l’ensemble des dix (10) directeurs départementaux. Cette rencontre, qui était prévue début juillet 2018, a été renvoyée à une date ultérieure, à cause des émeutes.
Les cas d’insécurité se situent autour de 78% dans l’Ouest (qui comprend la zone métropolitaine de la capitale, Port-au-Prince) et autour des 22% dans les autres 9 départements géographiques d’Haïti, a fait savoir Michel-Ange Gédéon, en réponse à des interrogations de sénateurs sur les actes de banditisme répertoriés dans différentes villes de province, comme dans le Nord, les Nippes, le Sud et le Plateau central.
« Je suggère une séance spéciale » sur la situation volatile à Martissant (indirectement à Gran Ravin), dans la périphérie sud de Port-au-Prince.
« Il y a trop à dire sur Martissant », s’est contenu Michel-Ange Gédéon, questionné sur l’anxiété de citoyennes et citoyens, chaque fois qu’ils passent dans cette zone : à pied, dans des transports publics et véhicules privés… [rc apr 24/07/2018 23:30]