Par Nancy Roc
Soumis à AlterPresse le 25 avril 2018
Le 1er Festival du film Haïti- Québec-Caraïbes a été lancé le mardi 24 avril dans le cadre du projet Pôle d’innovation du grand Nord, PIGraN 2018 et de la Semaine de la science et du savoir au service du progrès social. Ce Festival présente une vingtaine de films au public venu participer en grand nombre aux activités de GRAHN-Monde dans le Nord d’Haïti. Rencontre exclusive avec une des co-organisatrices et initiatrices du Festival, Carine Bernadel.
Haïti, pays de contes, de blagues et de mythes dont la tradition orale est encore très présente, est reconnu pour sa créativité et son foisonnement culturel. Haïti entretient des relations de longue date tant avec les autres pays de la Caraïbe qu’avec le Québec. C’est dans cet esprit que le Groupe de réflexion et d’action pour une Haïti nouvelle (GRAHN-Monde) s’est associé à deux organisations montréalaises reconnues pour organiser le 1er Festival du film Haïti-Québec-Caraïbes : Ciné Tapis Rouge, une organisation montréalaise qui produit des festivals d’échanges cinématographiques entre le Québec et l’étranger, et le Centre International de Documentation et d’Information Haïtienne, Caribéenne et Afro-canadienne (CIDIHCA), également basé à Montréal, dont la mission vise l’animation scientifique et culturelle et la conservation et la diffusion du patrimoine.
Comme spécifié dans notre précédent article, GRAHN-Monde revient en Haïti avec un événement de grande envergure internationale : la Semaine de la science et du savoir au service du progrès social qui aura lieu du 23 au 28 avril 2018, à Milot, dans le Nord d’Haïti. Le Groupe de Réflexion et d’Action pour une Haïti Nouvelle y attend plus d’un millier de personnes pour discuter de sciences, d’éducation, de culture, d’entreprenariat et d’innovation sociale. Soucieux de la jeunesse et de la place de la culture dans l’avenir du pays, le président du GRAHN, l’éminent professeur Samuel Pierre, a encouragé les membres ainsi que les sympathisants du GRAHN à proposer des projets innovants. « Frantz Voltaire, du CIDIHCA, a alors émis l’idée d’un festival du film Haïti-Caraïbes. Il détenait environ 8 films haïtiens et caribéens. Je me suis donc jointe à cette idée pour proposer plutôt à Samuel Pierre un Festival du film Québec-Haïti-Caraïbes, ce qui l’a tout de suite intéressé », révèle Carine Bernadel.
Afin de donner suite à la proposition de Frantz Voltaire de créer un Festival du film Québec-Haïti-Caraïbes, elle contacte Vanessa-Tatjana Beerli, directrice de Ciné Tapis Rouge et qui présente chaque année au Québec un festival de films d’un pays étranger à l’honneur et qui s’assure, en retour, que le pays en question diffuse la production de cinéastes québécois. « Nous avons sélectionné une douzaine de films qui rejoignent la réalité haïtienne soit par la présence d’acteurs haïtiens, soit au travers de thèmes qui nous concernent. Il s’agit donc là d’un échange sain entre deux pays également bénéficiaires », souligne Carine Bernadel. « Des films dont Ciné Tapis Rouge a obtenu les droits de diffusion pour notre festival, gratuitement - je tiens à le souligner, afin de démontrer la grande sympathie qui anime les artistes québécois envers Haïti - C’est donc une vingtaine de films qui seront présentés dans le cadre de ce 1er Festival du film Haïti-Québec-Caraïbes ! », s’enthousiasme-t-elle.
La culture : un apport essentiel de la diaspora
Le 1er Festival du film Haïti-Québec-Caraïbes a des objectifs bien précis :
Démontrer l’importance des arts, de la culture et de l’histoire, dans le projet éducatif ;
Refléter la similitude des préoccupations de divers peuples de conditions économiques différentes ; renforcer les liens institutionnels et professionnels entre Haïti et le Québec d’une part et entre Haïti et les pays de la Caraïbe d’autre part.
Voilà des choix bien pointus comparés à la majorité des festivals de films. Pouvez-vous nous expliquer le bien fondé de tels choix dans un pays où le cinéma n’existe plus ?
« Mais Haïti est un pays où foisonnent la culture et la créativité. À qui, il suffit de donner « sa chance ». Nous avons aussi de grands cinéastes. Citons à titre d’exemple, Raoul Peck, Arnold Antonin et Guetty Felin », rétorque Carine Bernabel. Pour cette Haïtiano-Québécoise passionnée de culture, le GRAHN, à travers la Cité du savoir, a une large mission éducative qui couvre de la pré-maternelle jusqu’au 3ième cycle universitaire. Une telle mission ne peut faire fi de la culture qui enrichit les connaissances et la sensibilité. « C’est par la culture que les jeunes accéderont aux racines haïtiennes et s’y ancreront. C’est aussi par la culture qu’ils forgeront leur personnalité et deviendront ces citoyens « éclairés » que nous souhaitons tant », souligne Mme Bernabel.
Quant au renforcement des liens entre les peuples, Carine Bernabel pense que si historiquement Haïti a beaucoup donné, ce pays ne pourra s’en sortir seul. « L’apport de la diaspora est essentiel, tout comme celui des autres pays, notamment le Canada et le Québec avec qui nous avons tissé des liens depuis si longtemps. Il s’agit de fraternité entre les peuples, mais aussi de saines collaborations d’affaires », dit-elle.
Venez voir ce qui se fait de bien dans le pays !
Il n’y a plus une salle de cinémas en Haïti. L’organisation d’un tel événement se révèle donc être une gageure. Aussi, les initiateurs de ce festival ont dû faire appel à la créativité et de la débrouillardise haïtienne. Deux projections extérieures sont entre autres prévues sur le site même de la Cité du savoir et c’est là que les organisateurs comptent rejoindre le millier de spectateurs.
Carine Bernabel encourage vivement les Haïtien(ne)s à participer à ce festival qui est entièrement gratuit. « Je les encourage d’abord à venir au PIGraN’2018, un événement qui englobe vingt foires, se déroulant à Génipailler, dans la région du Cap-Haïtien ! Venez voir ce qui se fait de bien dans le Pays ! Venez voir le fruit de la collaboration entre la diaspora, l’international et les haïtiens ! Venez partager vos idées ! Aux jeunes et moins jeunes, venez découvrir les films haïtiens, québécois et caribéens qui reflètent nos réalités communes, nous sommes tous semblables, nous n’avons tout juste pas les mêmes chances, mais nous pouvons avancer ensemble fraternellement ! »