P-au-P, 15 déc. 2017 [AlterPresse] --- Les membres du Conseil supérieur du pouvoir judiciaire (Cspj) exigent des excuses publiques de la part du président de la république Jovenel Moïse pour ses propos déplacés sur la corruption en Haïti, en conférence de presse, ce vendredi 15 décembre 2017.
Lors de sa récente visite officielle en France, le mardi 12 décembre, Moïse a affirmé, dans les médias, avoir été contraint, par l’appareil judiciaire, d’approuver le renouvellement d’une cinquantaine de juges soupçonnés de corruption.
La déclaration du chef de l’Etat est irresponsable. Il tente de piétiner le droit des justicières et justiciers, fustigent les conseillers judiciaires très remontés contre lui.
Ils espèrent également que le président reviendra sur sa déclaration, dès son retour au pays.
Tous les critères de sélection des juges ont été respectés, le processus de certification a été fait suivant les normes avant d’acheminer la liste des juges au président, précise le Cspj, qualifiant de « regrettable » la déclaration de Moïse.
Dans une lettre en date du mercredi 13 décembre 2017, adressée au président du sénat, Youri Latortue, transmise à l’agence en ligne AlterPresse, le Collectif 4 décembre exhorte le sénat à rappeler au pouvoir exécutif qu’il lui revient de faire exécuter les décisions de justice conformément aux lois et à la Constitution en vigueur.
Il appelle la chambre haute à demander, de façon officielle, par écrit, au président qui affirme être le seul à avoir la solution contre la corruption en Haïti, de faire part à la Nation de sa stratégie de lutte pour retrouver les fonds dilapidés et remettre à la justice, les corrompus, les corrupteurs et leurs complices épinglés.
Le sénat doit prendre les dispositions nécessaires en vue de participer activement à la lutte contre la corruption en votant les lois appropriées que requièrent les circonstances actuelles, réclame-t-il.
Pour leur part, les États-Unis d’Amérique (Usa) souhaitent des actions concrètes de la part du chef de l’Etat, indique la chargée d’affaires à l’ambassade américaine, Robin Diallo, à l’occasion du cocktail de Noël organisé par la Chambre de commerce américaine en Haïti (Amcham), le jeudi 14 décembre 2017.
Le président haïtien n’a eu de cesse de soutenir qu’il détient la solution pour combattre la corruption dans le pays.
« Le président de la République et son gouvernement ont répété à plusieurs reprises qu’ils étaient déterminés à lutter contre la corruption sous toutes ses formes en Haïti, nous espérons que durant l’année prochaine, le gouvernement pourra traduire ces paroles en actes et mettre fin à l’impunité et la corruption qui existent dans le pays pour un avenir prospère que nous espérons tous », souhaite Diallo.
Dans un communiqué de presse en date du 14 décembre 2017, le Cspj s’est dit stupéfié, triste et indigné des propos tenus par le chef de l’Etat.
« Cette déclaration est, une fois de plus, une tentative de mettre en péril l’indépendance du pouvoir judiciaire, de le discréditer et de saper les bases du principe de la séparation des pouvoirs », prôné par des articles de la charte fondamentale de la Nation, critique-t-il.
La déclaration de Moïse sous-entend que le pouvoir judiciaire regorge de corrompus. Tous les membres du pouvoir auraient dû démissionner pour protester contre ces paroles, a déclaré, le jeudi 14 décembre, le sénateur Evalière Beauplan, président de la commission spéciale d’enquête sur l’utilisation du fonds PetroCaribe, rapporte le journal le Nouvelliste.
Un rapport de la Commission éthique et anti-corruption du sénat sur l’utilisation des fonds PetroCaribe a indexé plus d’une quinzaine de personnalités, dont deux anciens premiers ministres, ainsi que des anciens ministres, des anciens directeurs généraux et des responsables de firmes de constructions, supposément impliquées dans le détournement d’une partie d’environ 3 milliards de dollars américains (Ndlr : US $ 1.00 = 65.00 gourdes ; 1 euro = 81.00 gourdes ; 1 peso dominicain = 1.60 gourde aujourd’hui).
Les sénateurs ont boudé une séance, le jeudi 30 novembre 2017, autour du rapport, après une mise en continuation des discussions, entamées au sénat le mardi 14 novembre 2017, sur ce dossier. [bd emb gp apr 15/12/2017 14 :20]