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Haiti : Justice et Paix dénonce les mauvaises conditions des prisons et hôpitaux

Message de la Commission Justice et Paix
à l’occasion du deuxième dimanche de carême dans l’Eglise catholique

Soumis à AlterPresse le 19 février 2004

A l’occasion du deuxième dimanche de carême qui pour l’Eglise catholique en Haïti est le dimanche national Justice et Paix, la Commission envoie ce message à ses membres et à toute personne de bonne volonté.

Le temps du carême nous met sur la route de la fête de Pâque, fête de la vie, fête de la résurrection de Jésus qui est passé de la mort à la vie. Oeuvrer pour le triomphe de la vie, c’est oeuvrer pour des relations justes dans la société. Il demande la participation de tous, il demande que tous prennent leur responsabilité sociale devant la situation que vit le pays. Il demande une plus grande sensibilité pour les plus faibles

Dans ce message, nous pensons spécialement à ceux qui se trouvent en détention et aux malades.

Voyons les garde-a-vue et les prisons. Le moment actuel est marqué par beaucoup de violence ; les victimes sont nombreuses. Des autorités, on demande d’être ferme devant ceux qui font de la violence aux autres, et ceux qui se servent d’armes illégales. Mais surtout, des autorités ont attend qu’elles agissent correctes et en accord avec la dignité et les droits des personnes.

Nous saluons les membres de la PNH et de la DAP qui s’acquittent correctement de leurs devoirs envers les détenus en prison ou en garde à vue.

En même temps, considérant les conditions de détentions, nous nous sentons obligés de lever la voix, pour dénoncer certaines conditions de détention de nombreux citoyens. Les prisons manquent d’équipements, elles manquent le nécessaire pour loger et nourrir les détenus ; elles manquent de l’espace, parfois même de l’eau, et des soins pour les détenus malades. Les enquêtes n’avancent pas. Ainsi, les garde à vues deviennent des prisons, parce qu’on dépasse les délais légaux. Les lieux de détention ne devraient pas être des lieux où se développent des sentiments de frustration et de haine. Par manque de respect des personnes, les prisons pourraient facilement devenir des motifs de vengeance et de violence demain.

Voici ce que nous proposons :

• Les gardes à vue ne devraient pas être des endroits de mauvais traitements, comme cela arrive en plusieurs endroits. Chaque personne mérite le respect de son corps.

• Les gardes à vue, comme les tribunaux, ne devraient être des lieux où l’on paie pour son relâchement, comme cela arrive trop souvent. La liberté ne devrait être une marchandise à vendre.

• Les enquêtes policières et judiciaires devraient être menées avec compétence et célérité. Il n’est pas normal que des gens passent de longues périodes en détention sans qu’il n’y ait de progrès dans les enquêtes. La liberté individuelle est un grand bien. L’Etat a le devoir de s’organiser pour rendre justice dans des délais raisonnables.

• La présomption de l’innocence est un principe en justice. Même si une personne est détenu pour enquête ou en attente d’un jugement. (Déclar. Univ. Droits Huamins).

• Si l’Etat détient quelqu’un pour raison d’enquête ou parce qu’il est condamné, l’Etat devient responsable pour qu’il soit gardé dans des conditions dignes de la personne humaine.

Voyons les conditions des malades dans les hôpitaux publics. Nous vivons des temps extrêmement difficiles pour les malades, surtout pour ceux qui dépendent des services de santé publiques. L’hôpital de Cité Soleil avait fermé ses portes à cause de la violence dans la zone, l’hôpital général de Port au Prince et l’hôpital au Cap Haïtien ont été paralysés par des grèves. Les problèmes entre les facultés de médecine, et entre le Ministère et certaines faculté privées ont imposé un prix lourd aux malades. Les hôpitaux publics aussi se font payer chers, tandis qu’ils devraient garantir le droit aux soins de santé.

Nous saluons les travailleurs de la santé qui consacrent des efforts considérables, parfois avec de faibles moyens, pour que les soins de santé ne deviennent pas un privilège pour quelques uns.

Voyant les conditions des soins de santé dans le secteur public, nous disons :

• Les hôpitaux publics dans la capitale comme dans les villes de province devraient figurer parmi les grandes priorités du Ministère de la Santé Publique (Const. art 23).

• Ceux qui travaillent dans les services de l’Etat, comme dans la santé publique, devraient respecter les biens de l’Etat comme des biens de la communauté, des biens qui doivent servir pour les malades. Est-ce normal qu’à chaque instant on doit ré-équiper les services comme si rien n’existait auparavant ?

• Le service de la santé souffre énormément chaque fois qu’il y a une grève dans le secteur. En cas de grève, les services d’urgence devraient fonctionner de façon efficace, sans danger pour la vie des moins nantis.

• L’Etat doit être clair concernant sa propre politique de santé. Quelles sont les maladies qu’il prend en charge ? Serait-ce la malaria ? la tuberculose ? le sida ? Où et dans quelles conditions les personnes affectées peuvent-elles se procurer les soins nécessaires, les examens et les médicaments ? Le Gouvernement devrait être clair sur sa politique de santé.

• La bonne gestion, compétente et honnête, fait parti du respect des droits des personnes.

Le pays vit un moment difficile pour tous. Le temps de carême doit nous rendre plus sensible pour les plus faibles. Toute personne de bonne volonté peut comprendre pourquoi les prisonniers et les malades figurent parmi les faibles dans la société. Eux aussi méritent le respect de leur dignité et de leurs droits.

Le Comité Directeur national.

P. Jean Hanssens, Directeur