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Haïti : 70 % de la population haïtienne en situation d’insécurité alimentaire chronique, selon un dernier rapport

« La plupart des solutions proposées (…) apportent des réponses techniques (…) et ne traitent pas vraiment les causes organisationnelles de l’insécurité alimentaire en Haïti »

Vu le potentiel de l’Ile, Haïti pourrait assurer son « autosuffisance » et sa souveraineté alimentaire, d’ailleurs envisagée en 1996 pour l’année 2015, fait valoir un rapport d’audit organisationnel sur la Sécurité alimentaire et nutritionnelle (San).

P-au-P, 11 nov. 2017 [AlterPresse] --- 70 % de la population haïtienne serait en situation d’insécurité alimentaire chronique, indique un rapport d’audit organisationnel sur la Sécurité alimentaire et nutritionnelle (San), présenté, le mercredi 8 novembre 2017, lors d’un atelier de restitution, observé par l’agence en ligne AlterPresse.

La situation de 30% de la population haïtienne, soit trois millions de personnes, en situation d’insécurité alimentaire, élevée ou modérée, depuis 2013, n’a pas évolué, selon ce rapport d’audit

Les taux de malnutrition aiguë et de malnutrition chronique, chez les enfants de moins de 5 ans, sont respectivement de 5% et de 22%, lit-on dans le document.

Pour une gestion plus efficace, il faut faire de la San une politique publique complète, dotée de tous ses instruments (texte, programme, plan national, cartographie des actrices et acteurs, financement, ressources humaines, besoins de formations, plan opérationnel d’actions), d’après les recommandations, issues du rapport d’audit organisationnel sur la Sécurité alimentaire et nutritionnelle en Haïti..

« Et tout cela ne marche que s’il y une volonté politique et administrative réelle », avance Anne Azam Pradeilles, vice-présidente du Forum d’échanges et de rencontres administratifs mondiaux (Feram), lors de la présentation du document.

Les Nations unies se sont engagées, le 25 septembre 2015, à combattre la pauvreté et la faim, parmi les dix-sept (17) Objectifs de développement durable (Odd), en vue d’un nouveau cadre de développement durable pour la période 2016-2030.

La république d’Haïti s’est inscrite dans la démarche « faim zéro », initiée, en 2015, par l’Organisation des Nations unies (Onu) sur le développement durable.

Vu le potentiel de l’Ile, Haïti pourrait assurer son « autosuffisance » et sa souveraineté alimentaire, d’ailleurs envisagées en 1996 pour l’année 2015, fait valoir le document.

Si aucun changement n’a été opéré jusqu’ici, pour améliorer la situation de la population, en général, de celles et de ceux en situation d’insécurité alimentaire, en particulier, c’est dû au fait que « la plupart des solutions proposées (…) apportent des réponses techniques (…) et ne traitent pas vraiment les causes organisationnelles de l’insécurité alimentaire en Haïti ».

La thématique San ne se limitant pas à une problématique technique, il est également important de redonner aux trois ministères régaliens - Ministère de l’intérieur et des collectivités territoriales (Mict), Ministère de l’économie et des finances (Mef) et Ministère de la Planification et de la coopération externe (Mpce) - un rôle plus affirmé et visible, en matière de gestion de la San, insiste Pradeilles du Feram.

« Si on veut qu’une politique marche, il faut que le régalien marche », souligne-t-elle.

Le Mef, par exemple, « est un ministère puissant, mais affaibli, en Haïti, par un démembrement institutionnel, dommageable à son efficacité », relèvent les enquêteurs.

Ainsi, faut-il renforcer la déconcentration des pouvoirs au niveau des services départementaux des ministères, notamment du Mpce, préconise le rapport.

La San doit également être portée, avec efficacité et efficience, par les actrices et acteurs de terrain, déconcentrés et décentralisés.

D’où les rôles mportants de la délégation départementale, de la Direction des collectivités territoriales et de la Direction de la protection civile (Dpc), unités relevant du Mict.

Le rapport d’audit organisationnel sur la San recommande également d’élargir le cercle des actrices et acteurs institutionnels, reconnus de la San.

Il s’agit des Ministères de l’Agriculture, des ressources naturelles et du développement rural (Marndr), de la santé publique et de population (Mspp), des affaires sociales et du travail (Mast).

Il faut aussi y ajouter les Ministères de l’environnement (Mde), des travaux publics, transports et communications (Mtptc), du commerce et de l’industrie (Mci), de l’éducation nationale et de la formation professionnelle (Menfp).

« Cet audit (…) n’a certainement pas la prétention de tout réinventer, mais vise, bien au contraire, à capitaliser sur l’existant et les progrès déjà accomplis », nuance l’ambassadeur de l’Union européenne (Ue) en Haïti, Vincent Dégert.

« Les conclusions de ce rapport doivent-être vues comme autant d’opportunités d’améliorer le système décisionnel et organisationnel de la San » dans le pays, affirme le diplomate européen, tout en réitérant la volonté de l’Ue à poursuivre son appui à Haïti, en matière de lutte contre l’insécurité alimentaire et nutritionnelle.

Le rapport de la San est le fruit de 40 jours d’enquête, menée, notamment, dans les départements du Sud-Est (Jacmel) et du Nord-Ouest (Port-de-Paix, Saint-Louis du Nord et Ile de la Tortue). [rjl emb rc apr 11/09/2017 11:30]