P-au-P, 31 oct. 2017 [AlterPresse] --- Le rôle des médias et de l’information dans la construction démocratique en Haïti a été au coeur d’une table ronde, ce mardi 31 octobre 2017, à l’occasion du 16e anniversaire (20 octobre 2001 - 20 octobre 2017) du Groupe Médialternatif (GM), a observé l’agence en ligne AlterPresse.
Les panélistes, Hérold Jean-François, directeur de Radio Ibo, Wilson Jabouin, politologue, et Danièle Magloire, sociologue, ont, tour à tour, mis l’accent sur les enjeux d’une information pour éclairer l’opinion, les critères de qualité de l’information et des rapports entre les médias et la société.
La table ronde sur « Information et opinion dans la construction démocratique en Haïti » a réuni plusieurs personnalités, dont Claudette Werleigh, ancienne première ministre, Léopold Berlanger, président du Conseil électoral provisoire (Cep), Ginette Rivière Lubin, ancienne ministre de la condition féminine, Avenide Joseph, porte-parole de la présidence, et Pierre Bonnet, attaché de presse de l’ambassade de France et Marie-Ève Castonguay de l’ambassade du Canada.
Des représentants de la société civile, des médias, d’Ongs internationales et des membres de la communauté universitaire, en particulier de nombreux étudiants, ont aussi fait le déplacement. On a noté la présence du professeur Jacky Lumarque, recteur de l’Université Quisqueya, Marvel Dandin, directeur de Radio Téle Kiskeya, Aruns Bellevue, directeur de Radio Gakaxie, Pierre Espérance, directeur du Réseau national de défense des droits humains (Rnddh), Antonal Mortimé, coordonnateur du Collectif Défenseurs Plus, Chenet Jean-Baptiste, directeur général de l’Institut de Technologie et d’Animation (Iteka), Lesley Richard, fonctionnaire de la Fondation internationale pour les systèmes électoraux (Ifes), ainsi que des représentantes et représentants issus de différents secteurs de la société, entre autres.
Hérold Jean François a insisté sur le rôle de l’information dans une société démocratique. Il souligne un grand déficit dans la circulation de l’information, dont l’accès est difficile. « Ce qui domine en Haïti, c’est la culture de l’autoritarisme », dit-il.
La quête de la bonne information est devenue plus difficile avec l’émergence des réseaux sociaux, souligne-t-il, constatant une tradition de rumeurs très fortes, au détriment de l’information.
Les médias traditionnels (conventionnels) et alternatifs ont un rôle fondamental à jouer dans la qualité de l’information, avance-t-il, soulignant une utilisation de l’information à des fins manipulatoires.
Il existe, selon lui, une tradition de manipulation de l’information surtout à des fins politiques.
Tout en appelant à rétablir l’équilibre avec une bonne information, Hérold Jean-François exhorte les médias à être de plus en plus responsables et à faire un grand effort de contrôle.
L’information évolue suivant la loi de l’offre et de la demande. Le manque de revenus empêche la presse de couvrir d’autres événements, notamment sociaux et culturels, au lieu des faits politiques ponctuels, avance Hérold Jean-François.
Est-ce qu’il y a de l’information qui n’est pas manipulée ?, s’interroge, pour sa part, le spécialiste en politique publique, Wilson Jabouin, un des panélistes à la table ronde du mardi 31 octobre 2017, organisée par le Groupe Médialternatif.
« La plus grande difficulté est de trouver l’information. Les médias traitent l’information suivant une ligne éditoriale. En tant qu’entreprises, les médias ont leur propres objectifs, ils ne sont pas neutres, parce qu’ils ont des relations » avec des partenaires, relève Jabouin.
Il existe des contingences, propres à Haïti, comme l’absence de spécialité ainsi que des journalistes généralistes, engendrant une presse d’opinion, soutient-il.
Le fait que les médias fonctionnent comme une presse d’opinion, et non comme une presse d’information, n’est-il pas le plus grand accroc à la construction démocratique ?, se demande Jabouin.
« Les médias sont une composante de la société, ils sont aussi affectés par les problèmes sociaux. Ils influencent et ils sont influencés par la société », analyse, de son côté, la sociologue féministe, Danièle Magloire, autre panéliste à la table ronde du mardi 31 octobre 2017.
« L’opinion publique est aussi une construction difficile. Les animatrices et animateurs émettent autant d’opinions que les journalistes, ceci constitue un danger ».
« Un média peut se positionner, mais il faut qu’il argumente sa position », souhaite-t-elle.
On n’entend pas parler de la paysannerie dans les médias en Haïti. Ces informations ne sont pas si rares, mais on ne s’en occupe pas, déplore-t-elle.
Les médias ont besoin d’avoir une image d’eux-mêmes et d’interactions avec différents secteurs organisés, pense la militante féministe Danièle Magloire. [emb apr 31/10/2017 19:00]