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« Haïti, crise ou changement » ou la nécessité d’un débat autour de l’appui budgétaire de l’Union Européenne à Haïti

P-au-P, 07 mars 2017 [AlterPresse] --- « Haïti, crise ou changement » est le titre d’un film documentaire axé sur les enjeux du développement dans le cadre de l’appui budgétaire de l’Union Européenne à Haïti, et dont la grande première est attendue prochainement à Port-au-Prince, apprend AlterPresse.

Ce film, co-réalisé par Fabrizio Scapin de la firme franco-italienne Lumina, Gotson Pierre du Groupe Médialternatif (Gm) et produit par la firme allemande Particip, sera projeté à L’InfoPoint Coopération Extérieure de l’UE, à Bruxelles, le mardi 13 mars 2018. La projection sera suivie d’un débat.

L’appui budgétaire doit être adapté en vue de produire des résultats. Pour ce faire, l’État est appelé à adopter notamment une politique de transparence, avancent des interlocuteurs s’exprimant dans le film, dont plusieurs économistes haïtiens de renom, comme Charles Cadet, Frédéric Gérald Chéry et Daniel Dorsainvil.

En plus d’attirer un autre regard sur la responsabilité des Haïtiens en ce qui concerne l’appui budgétaire fourni à leur pays, le documentaire, visionné par un journaliste d’AlterPresse, les incite aussi à comprendre qu’ils sont les véritables artisans du développement d’Haïti.

La situation risque, un jour, d’éclater

Différents intervenants ont mis l’accent sur le fait que la reconstruction du pays après le tremblement de terre ravageur du 12 janvier 2010 n’a toujours pas pu démarrer au Centre-ville de Port-au-Prince.

Le film met, entre autres, le projecteur sur la situation précaire de Canaan (banlieue nord) qui a servi de lieu de refuge pour les personnes déplacées, lors du séisme.

Cette zone déclarée d’utilité publique est devenue un grand bidonville de l’aire métropolitaine de Port-au-Prince.

Les propos font état, d’autre part, d’une mauvaise répartition des ressources au sein de la population.

La situation du pays devient difficile en raison du fait que près de 80% des ressources humaines qualifiées du pays sont à l’extérieur, souligne Rony Desroches, de l’Initiative de la société civile.

C’est grâce à la diaspora, si la situation du pays ne s’est pas aggravée davantage, estime-t-il.

« La situation risque, un jour, d’éclater. Il faut pouvoir briser le cercle de la pauvreté en Haïti », souhaite Charles Jean Jacques, ordonateur national pour les fonds européens et ancien ministre des affaires sociales sous l’administration de Michel Joseph Martelly.

Le film aborde plusieurs thématiques en rapport avec les secteurs visés dans l’appui budgétaire de l’UE à Haïti, parmi lesquelles l’éducation et la corruption.

Une enseignante, Magalie Georges, critique la mauvaise qualité de l’enseignement et le manque de volonté politique pour contribuer au développement durable à travers l’éducation.

En ce qui concerne le combat contre la corruption, une juriste suggère que l’idéal serait de faire en sorte que l’Unité de lutte contre la Corruption (Ulcc) devienne une institution indépendante, pour pouvoir bien s’acquitter de sa mission.

Le défi du "dialogue" autour de l’appui budgétaire

Pour le co-réalisateur Gotson Pierre, le défi dans ce documentaire était d’arriver à créer un dialogue, parfois contradictoire, autour de l’appui budgétaire. Ce dialogue devait inclure non seulement l’Union Européenne, mais aussi les acteurs haïtiens de l’État et de la société civile.

Le film crée l’équilibre de création entre le cahier des charges assez exigeant et la liberté des réalisateurs », soutient Sheila Laplanche, chef d’équipe de Particip en Haïti.

Elle souhait qu’il y ait d’autres réalisations du même genre dans le pays, à partir de ce qu’elle considère comme un exemple.

L’Union européenne (Ue) avait réduit de 6,5 millions d’euros son aide au développement en Haïti pour insuffisance de résultats dans le cadre de son programme d’appui budgétaire à la consolidation de l’État, avait fait savoir l’ambassadeur de l’Ue en Haïti, le Français Vincent Dégert, lors d’une intervention, en février 2016.

D’un montant de 112 millions d’Euros, le programme d’appui budgétaire de l’Ue à la consolidation de l’Etat a été lancé en mars 2014 et doit s’achever en mars 2018. [jep emb apr 07/03/2018 13:35]