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Haïti-Budget : Le pouvoir appelé à être à l’écoute de la population

P-au-P, 18 sept. 2017 [AlterPresse] --- Les dirigeants de l’Etat doivent être à l’écoute de la population, préconisent plusieurs personnalités ainsi que des représentants d’organisations, dans le contexte des mobilisations enclenchées contre le budget 2017-2018 voté par le parlement, dont la grève des transports de ce 18 septembre, largement suivie.

L’économiste Camille Chalmers, également directeur exécutif de la Plateforme haïtienne de plaidoyer pour un développement alternatif (Papda), souligne que le fonctionnement de l’État haïtien, notamment du pouvoir actuel, n’a rien à voir avec la participation et l’écoute de la population.

Le gouvernement n’accorde, dans ce budget, aucune priorité aux logements sociaux dans ce pays affecté par le terrible tremblement de terre du 12 janvier 2010 et qui avait, avant cela, un déficit de logements estimé à 1 million.

Les gens vivent de façon dramatique dans nos villes. 80% de la population occupent seulement 20 % du territoire, indique Chalmers, qui critique le manque d’attention accordée à la crise environnementale.

Le pouvoir sera en difficulté s’il choisit de rester sur cette voie en ignorant les revendications de la société et ses problèmes réels, prévient-il.

Pour sa part, le professeur d’Université, Roger Petit-Frère appelle le pouvoir en place à chercher un plus large consensus autour de ce budget controversé.

Le problème du budget ne se pose pas dans les chiffres mais au niveau de son orientation générale et de celle de l’État, estime-t-il.

Les taxes ne doivent pas peser sur les plus pauvres, par principe. Le budget fait problème à ce niveau, dans la mesure où il regorge d’injustice, avance-t-il.

Quand on augmente le salaire d’un professeur par exemple et qu’on augmente en même temps les taxes, il n’y a pas réellement d’augmentation de salaire, fait remarquer Petit-Frère.

De son côté, le sociologue Fritz Dorvilier reconnait qu’il y a réellement dans le budget quelques irrégularités « structurelles ».

Il relève, par exemple, que certaines prévisions sont farfelues. « L’État fait des prévisions qu’il ne peut pas respecter car, il ne s’en donne pas les moyens », fustige-t-il.

Toutefois, il rappelle que, dans la culture politique haïtienne, les politiciens saisissent la moindre faille pour diaboliser et radicaliser un problème.

Toutes ces manifestations, tant dans les rues que dans les médias cachent derrière elles une instrumentation et une lutte politique « atroce » ayant pour prétexte les taxes décriées dans le budget, analyse Dorvilier.

Le sociologue conseille au pouvoir et aux opposants de s’entendre sur une chose : l’image d’Haïti, et non leurs intérêts claniques et politiques.

La grève des transports lancée par les syndicats de chauffeurs et appuyée par l’opposition, est largement respectée dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince et plusieurs villes de province, ce lundi 18 septembre 2017.

Le gouvernement avait pourtant demandé à la population de vaquer normalement à ses activités.

Après trois journées de mobilisations dans les rues, quatre autres manifestations, allant du mercredi 20 septembre au samedi 23 septembre 2017, sont encore prévues pour continuer de protester contre le budget. [rjl emb gp apr 18/09/2017 12 :55]