P-au-P., 26 sept. 02 [AlterPresse] --- "Etat de droit et enfance en Haïti : Restituer l’enfance". C’est le titre du sixième volume de la collection Etat de droit de Haïti Solidarité Internationale (HSI).
L’auteure de cette publication porte un regard neuf sur la situation éprouvante des enfants haïtiens qu’elle situe à l’intérieur d’un contexte national sans pour autant en occulter les spécificités. Eveline Trouillot questionne la responsabilité de l’Etat, tant au niveau de l’élaboration et de l’adoption des prescriptions légales relatives à l’enfance qu’au niveau de leur application.
L’auteure s’interroge sur l’existence réelle des droits de l’enfant haïtien, vu que celui-ci est généralement annexé à un autre ayant sur lui toute autorité, ballotté entre l’autorité de la famille et celle de l’école.
L’ouvrage relève que les balbutiements que l’on entend actuellement autour de l’enfance s’expliquent surtout par les orientations des bailleurs de fonds. Il ne faut pas s’étonner, prévient Eveline Trouillot, que la non imprégnation de ces actions ponctuelles colloques, états généraux, campagnes de sensibilisation) d’engagement profond transforme celles-ci en mascarades de courte durée.
L’éducatrice souligne les effets de la carence de structures étatiques sur la situation des jeunes et de leurs familles. "Prisonniers d’un environnement insalubre, dépourvu d’espaces de loisirs, l’enfant haïtien devient de plus en plus tel un oiseau en cage".
L’ouvrage met l’accent sur l’importance des moyens de pressions systématiques sur les instances étatiques dans le cadre d’un redressement global de la situation. Mais il insiste aussi sur la nécessité pour l’adulte haïtien de questionner ses pratiques face à cette catégorie importante de la population. 40% de celle-ci a moins de 15 ans. "C’est seulement dans le respect de tous les enfants, avec la complexité de leurs réalités, que
la société trouvera les moyens de se développer".
Eveline Trouillot attire par ailleurs l’attention sur le fait que l’enfant ne peut être élevé en vase clos, à l’abri de la société où évolue sa famille. Autrement dit, l’enfant haïtien porte en lui le mal du pays. L’enfermer dans un monde réducteur, faussement protecteur, et
mensonger, en se disant que la situation épouvante que nous vivons ne l’affecte pas
parce qu’il est un enfant, n’est pas la meilleure attitude, estime l’auteure. Selon elle, la solution la plus intelligente consiste plutôt à se battre pour un état de droit où les libertés fondamentales, les principes de bases sont respectés et appliqués.
Eveline Trouillot pense que la restitution de l’enfance exige que le petit haïtien, que la fillette ait une image de soi positive et digne et qu’il (elle) assume sa couleur et sa race avec l’histoire qui les accompagne.
"Pour ne pas substituer aux affres de l’enfermement les illusions de l’aliénation et de la dépendance, il faut pouvoir nous situer dans un présent où subsistent encore les séquelles du colonialisme et de l’occupation, il nous faut revendiquer notre histoire d’anciens colonisés, d’anciens occupés, avec tout ce que cela comporte de limites et de filiations, de colères et de rancoeurs, de préjugés et de révoltes pour la dépasser. Pour que les jeunes parviennent à identifier les éléments contre lesquels il faut continuer de se battre, pour s’accepter sans ressentir le besoin de changer de peau".
Dans la collection Etat de droit, Haïti Solidarité Internationale (HSI) a déjà publié : Etat de droit et jalons pour une politique de réparation (1999), Etat de droit et les Tribunaux de Paix (1998), Etat de droit et Décentralisation (1997), Etat de droit, justice et institutions (1996), Etat de droit, liberté et pauvreté (1995), Etat de droit, Développement et Communautés (1994). [vs apr 26/09/02 19:20]