P-au-P, 15 mai 2017 [AlterPresse] --- L’augmentation du prix du carburant sur le marché national constitue une mauvaise décision, selon des représentants de plusieurs secteurs de la vie nationale, interrogés par l’agence en ligne AlterPresse.
Après plusieurs jours de discussions avec des organisations syndicales, le gouvernement a décidé de fixer le prix de la gazoline à 224.00 gourdes (auparavant 189.00 gourdes), celui du diesel à 179.00 gourdes (auparavant 149.00 gourdes) et celui du kérosène à 173.00 gourdes (auparavant 148.00 gourdes), à partir de ce lundi 15 mai 2017.
Cette augmentation « très inopportune » aura des conséquences extrêmement dramatiques sur la population, déjà rongée par la misère, prévient l’économiste Camille Chalmers.
Pendant les trois dernières années, on a assisté à l’effondrement du pouvoir d’achat des couches les plus pauvres de la société, avec une perte de valeur de la gourde, estimée à 60 %., avance-t-il.
C’est une mauvaise décision prise dans un contexte inapproprié et sans qu’il y ait des études sérieuses menées sur le marché pétrolier en Haïti, regrette-t-il.
Prônant une nouvelle politique énergétique, il estime que la question centrale est de savoir comment résoudre les problèmes énergétiques de la population.
Chalmers appelle à diminuer la dépendance par rapport à l’importation des produits pétroliers.
Cet ajustement permet de réduire le déficit lié à la « subvention » des produits pétroliers qui impactent négativement l’économie nationale, explique le ministre du commerce et de l’Industrie (Mci), Pierre Marie Du Mény, lors d’une conférence de presse, ce lundi 15 mai 2017.
Les raisons évoquées par le gouvernement ne sont que des artifices, critique Antonal Mortimé, le coordonnateur du Collectif Défenseur Plus, joint au téléphone par AlterPresse.
Cette hausse des prix des produits pétroliers démontre une certaine insouciance de l’État par rapport à la situation actuelle caractérisée par la crise alimentaire, le chômage, les problèmes de santé et les crises scolaires, estime-t-il.
Il rappelle qu’une grande partie de la population utilise le kérosène pour préparer de la nourriture alors que beaucoup d’autres utilisent le transport en commun pour se déplacer.
Cette mesure va à l’encontre de la jouissance des droits économiques et sociaux de la population, souligne-t-il.
Le défenseur des droits humains encourage la population à revendiquer son droit, de façon pacifique, face à cet État qu’il juge « prédateur ».
Les responsables ont pris leur décision sans avoir une idée de ce qui se passe réellement dans le pays, fulmine Marie Evelyne Larrieux, coordonnatrice générale de la Solidarite fanm ayisyèn (Sofa).
L’augmentation des prix du carburant est une décision, qui va à l’encontre des intérêts des pauvres en général, soutient le coordonnateur exécutif de Tèt kole ti peyizan ayisyen, Rosnel Jean-Baptiste.
« Les promesses de campagne, faites par Jovenel Moïse, n’étaient que des mensonges pour endormir la population et se mettre au service des intérêts des multinationales », dénonce-t-il, tout en appelant la population à se soulever.
Cette décision « dévastatrice » va entraîner une augmentation des prix des produits de première nécessité dans les jours à venir, avertit la coordonnatrice de Batay ouvriye (Lutte ouvrière), Yanick Etienne.
Elle encourage les syndicats protestataires à se réunir en vue d’une autre fixation des prix du carburant.
Ce gouvernement n’entend pas améliorer les conditions de vie de la population, estime, pour sa part, le coordonnateur général de l’Union nationale des normaliens et éducateurs d’Haïti (Unnoeh), Georges Wilbert Franck.
Tous les secteurs sociaux doivent se réunir pour donner à ce gouvernement une réponse proportionnelle à la gravité de la situation, souhaite-t-il.
Le chef du gouvernement, Jack Guy Lafontant, avait laissé entendre que devant l’état des finances publiques, l’augmentation du prix du carburant est une nécessité. [jep emb apr 15/05/2017 16 :50]