Par Raoul Vital [1]
Dans la série d’interventions de collaborateurs réguliers ou occasionnels d’AlterPresse, à l’occasion de ses 3 ans le 28 janvier 2005
Un ! Deux ! Trois ans ! Il y a trois ans depuis qu’un groupe de trois journalistes, soucieux de pratiquer le journalisme autrement, a lancé en Haïti l’Agence AlterPresse. Ce trio, pendant ces trois années, a propulsé AlterPresse au delà des trivialités de l’information.
Plus que l’actualité ! Cette agence de presse se fixe des objectifs ambitieux et difficile dans la mesure où l’information a toujours suscité la convoitise des acteurs engagés dans les luttes politiques et sociales, qu’ils soient de gauche ou de droite. Or, les technologies de l’information et de la communication qui ont pour corollaire le développement des nouveaux médias, sont très inégalement réparties entre les acteurs. Ces nouveaux outils de l’information ou de la « communication », produits pour le besoin du capital, ont élargi le fossé des disparités socio-économiques plutôt que d’établir la communication entre les hommes. Dans l’instantanéité de l’information, se noient les acteurs sociaux n’ayant pas accès aux médias. Le rêve de voir le peuple haïtien s’approprier de ces nouveaux outils de l’information a sans doute guidé ces journalistes qui ont lancé AlterPresse ; leurs différentes initiatives le prouvent.
Les démocraties ont casé les journalistes dans un rôle officiel de médiateurs entre les acteurs des événements et le public. Aujourd’hui, les gens exigent des médias une information étendue, rapide et complète. L’idéal de l’information, devenue l’élément constitutif des sociétés démocratiques, s’alimente par l’idée que les moyens d’information doivent permettre la participation des citoyens à la gestion de leurs communautés. Entre-temps, ceux qui disposent des moyens d’information sophistiqués sont devenus les maîtres de l’information. Le droit du public à l’information dépend désormais de la libre concurrence des entreprises de presse. On assiste donc à un dérèglement bien réglé de l’espace médiatique : les informations se traitent, s’achètent et se vendent. Le choix d’AlterPresse, en ce sens, peut-être perçu comme perturbateur. Cette agence de presse, pendant ces trois années très mouvementées par les luttes politiques incessantes, a construit son autonomie par rapport aux gens et à l’argent.
Le développement des médias dépend de la mission qu’on leur donne. AlterPresse s’est donnée pour mission de fournir avec honnêteté des informations équilibrées sur les événements impliquant les acteurs des mouvements sociaux. Elle accroît les capacités des acteurs sociaux - qui ne cessent d’exprimer les réalités de leurs conditions de vie - à l’exercice de la liberté d’expression.
Consciente des risques encourus par les journalistes et la complexité de l’information, AlterPresse poursuit inlassablement l’objectif de pratiquer le journalisme autrement. Le rayonnement de cette agence ne peut-être envié ; c’est le professionnalisme et l’honnêteté de ses journalistes qui ont fait de AlterPresse une référence dans le domaine des médias en Haïti.
Succès continu à toute l’équipe d’AlterPresse !
21 janvier 2005
[1] Journaliste, mémorant en communication sociale