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Haïti-Politique : L’investiture de Jovenel Moïse, l’aboutissement d’un processus électoral houleux

P-au-P, 06 févr. 2017 [AlterPresse] --- L’investiture de Jovenel Moïse comme 58e président de la République d’Haïti, suite à la présidentielle du 20 novembre 2016, marque le dénouement d’un processus électoral houleux, amorcé depuis 2015.

Il a fallu un long périple politique avant le bouclage de ce processus électoral, observe AlterPresse.

Entrepris en 2015 sur l’administration de l’ancien président Michel Joseph Martelly et le premier ministre Evans Paul, le processus électoral d’alors, s’est révélé entaché de nombreuses irrégularités.

Attendu depuis longtemps, un premier tour des législatives, organisé le 9 août 2015, devait permettre de renouveler la chambre basse, passant de 99 à 119 députés et de compléter le sénat amputé de deux tiers de ses membres, soit 20 sénateurs.

Un vide parlementaire existait depuis janvier 2015, lorsque le mandat des députés et celui d’un second tiers des sénateurs avait pris fin.

Le climat de violence, fraudes et malversations, dans lequel se sont déroulées les législatives du 9 août 2015, laissait présager le chaos qui allait survenir en octobre de la même année.

Le 25 octobre 2015, s’est tenu le second tour des législatives et le premier tour de la présidentielle.

70 candidats étaient en lice pour la présidentielle et plus d’un réclamaient l’exclusion de Jovenel Moïse, candidat du parti au pouvoir d’alors.

Ils dénonçaient l’instrumentalisation du Conseil électoral provisoire (Cep) par l’ancienne administration Martelly-Paul.

Jovenel Moïse bénéficiait d’un total soutien, tant économique que politique de l’ex-président Michel Martelly.

La publication des résultats préliminaires le 5 novembre donnait, Jovenel Moïse, le poulain de Martelly, en tête avec 511 mille 992 voix, soit 32.81% du nombre total des votes.

Suivi de Jude Célestin de la Ligue alternative pour le progrès et l’émancipation émancipation d’Haïti (Lapeh) avec 394 390 voix, soit 25.27% des votes.

L’entêtement et l’obsession de Martelly à poursuivre le processus électoral étaient manifestes.

Les contestations et manifestations violentes qui s’en sont suivies ne l’ont pas empêché d’aboutir à la fin de son quinquennat.

Le 5 février 2016, soit deux jours avant son départ (peu glorieux) du palais national, Martelly a signé un accord de sortie de crise, qui a fait du président du sénat en l’occurrence Jocelerme Privert, un prétendant à la présidence provisoire en attendant le vote de l’assemblée nationale.

Privert est nommé président provisoire par vote de l’assemblée le 07 février 2016, avec pour mission de poursuivre le processus électoral, suivant les termes de l’accord du 5 février.

En réponse à la demande récurrente de nombreux secteurs de la vie nationale, il met sur pied une Commission indépendante d’évaluation et de vérification électorale (Cieve).

Le rapport de la Cieve, rendu public le 29 mai 2016, qui concernait uniquement la présidentielle a fait état de fraudes massives et de près de 628 mille votes irretraçables.

Moïse était indexé, par ses adversaires, comme principal bénéficiaire de ces fraudes.

Rebattre les cartes

La commission de vérification électorale a proposé de reprendre la présidentielle.

L’ancien conseil électoral, conduit par Pierre-Louis Opont, est dissout et un nouveau conseil est nommé, en consultation avec tous les secteurs de la vie nationale.

Les deux nouveaux tours de scrutin ont été fixés aux 9 octobre 2016 et 8 janvier 2017. Cependant le passage de l’ouragan Matthew a encore forcé le report des élections.

Le 20 novembre 2016 s’est tenu dans un calme relatif, le premier tour de la présidentielle, des législatives complémentaires et du tiers Sénat.

Les résultats préliminaires du 28 novembre 2016 ont donné Jovenel Moïse favoris pour remporter les élections dès le 1er tour avec 595,430 voix, soit 55.67% des votes.

Respectivement 2e, 3e et 4e derrière Jovenel Moïse, les candidats Jude Célestin de la ligue alternative pour le progrès et l’émancipation (Lapeh), Moïse Jean Charles, de la plateforme Pitit Desalin et Maryse Narcisse du parti Fanmi lavalas contestent ces résultats auprès du tribunal électoral, sans succès.

Le Cep a finalement confirmé, le 3 janvier 2017, la victoire de Jovenel Moïse dès le premier tour avec 55,60% des voix.

Le processus électoral est bouclé, certes, mais l’avenir politique n’est pas pour autant clair.

Dans le contexte actuel, empreint de faiblesse institutionnelle, l’institution électorale n’a pas su barrer la route à des candidats à moralité douteuse.

Même le président élu est soupçonné de blanchiment d’argent, dans un rapport de l’Unité centrale de renseignements financiers (Ucref).

Alors que le dossier est présentement devant le cabinet d’instruction, de nombreuses organisations sociales ont lancé, en vain, une pétition demandant de surseoir à l’investiture de Moïse en attendant que la justice haïtienne fasse la lumière sur son cas. [am emb gp apr 06/02/2017 14:15]