Español English French Kwéyol

Haiti-Élections : L’audition des contestations des résultats de la présidentielle dans l’impasse ?

P-au-P, 14 déc. 2016 [AlterPresse] --- Les avocats du parti politique Fanmi lavalas, de la plateforme Pitit Dessalines et de la Ligue alternative pour le progrès et l’émancipation haïtienne (Lapeh) rejettent la formation d’un seul tribunal électoral, pour auditionner les contestations des résultats de la présidentielle du 20 novembre 2016.

Les avocats, représentants les trois candidats à la présidence contestataires, dénoncent une violation, selon eux, de l’article 18 du décret électoral, par le vice-président du Conseil électoral provisoire (Cep), Carlos Hercule, ayant procédé à la composition d’une chambre unique du tribunal, au lieu de trois.

« Le Bureau de contentieux électoral national (Bcen) a son siège au Conseil électoral provisoire. Il se compose de trois (3) sections. Chaque section est composée de deux (2) conseillers électoraux, assistés de deux (2) avocats et d’un (1) magistrat professionnel, ayant voix délibérative, tirés au sort selon les modalités suivantes », prévoit l’article 18 du décret électoral.

« Les conseillers sont tirés parmi les membres du Cep, hormis le président qui ne siège pas. Les avocats, siégeant au Bcen, sont désignés, par tirage au sort, sur une liste soumise par la Fédération nationale des barreaux d’Haïti, parmi les avocats régulièrement inscrits, justifiant d’au moins cinq (5) années d’exercice de la profession et ne faisant l’objet d’aucune sanction », poursuit-il.

Le tirage au sort, pour constituer ce tribunal, a été à la base de vives tensions au Bcen, ce mercredi 14 décembre 2016. Ce qui a entraîné une suspension de séance pour deux heures de temps.

Le vice-président du Cep, Carlos Hercule, s’explique

Contacté par AlterPresse, le vice-président de l’institution électorale, Me Carlos Hercule, a apporté des éclaircissements, par rapport aux accusations des partis contestataires à l’encontre de la formation du Bcen.

L’article 18 du décret électoral indique que le Bcen est composé de trois sections, mais elles ne sont pas obligées d’être fonctionnelles en même temps, selon le conseiller électoral.

« Pour rendre les deux autres (sections) fonctionnelles, il faut avoir suffisamment de cas. Quand il y aura des recours sur les décisions des Bureaux de contentieux électoraux départementaux (Bced), dans les 11 départements électoraux, il pourrait y avoir une vingtaine de recours par devant le Bcen. À ce moment, il y aura suffisamment de cas pour les rendre fonctionnelles », précise-t-il.

« Il aurait fallu 15 juges pour rendre les trois sections fonctionnelles, alors que, pour la présidentielle, il n’y a que trois recours, qui concernent les mêmes résultats des élections », poursuit-il.

Puisque les partis contestataires demandent la même chose, il n’y a aucun intérêt à former trois sections, avance-t-il, pour expliquer la raison pour laquelle un seul tribunal a été formé pour écouter les trois affaires en même temps.

Hercule n’y voit aucune violation de la loi électorale.

« La question est simple, il n’y a que trois affaires enrôlées. Nous avons convoqué neuf juges, envoyés par le Conseil supérieur du pouvoir judiciaire, ainsi que 18 avocats, envoyés par la Fédération des avocats de Port-au-Prince », fait-il valoir.

Il indique que selon une procédure appelée jonction, des affaires - présentant le même objet et concernant les mêmes partis ainsi que les mêmes intérêts en cause - peuvent être entendues une seule fois, « une façon d’éviter, dit-il, qu’il y ait contrariété de décision ».

Dans une lettre, en date du mercredi 14 décembre 2016, adressée au président du Bcen et au Cep, les avocats du candidat à la présidence de Lapeh expriment leur refus de plaider par-devant ce tribunal « irrégulièrement constitué », selon eux.

Ils demandent de « prendre les mesures de redressement, nécessaires au respect du décret électoral, à un heureux aboutissement du processus électoral et à la sauvegarde de la stabilité politique du pays ».

Joint au téléphone par AlterPresse, l’un des avocats de la candidate, Maryse Narcisse, Me Gervais Charles, exige du Cep d’utiliser l’arme de la concertation, pour parvenir à mettre sur pied une composition, écartant tout « a priori » sur les personnalités, qui en feront partie.

Le Bcen est formé d’un président, à savoir la conseillère Marie Hérolle Michel, du conseiller Frinel Joseph, d’un juge de la cour d’appel et de deux avocats.

Récusation sur récusation

Le conseiller Kenson Polynice a été remplacé par Frinel Joseph, au Bcen, après avoir été récusé, sur demande du Parti haïtien tèt kale (Phtk), arguant que ce conseiller n’a pas signé les résultats de la présidentielle du 20 novembre 2016.

Un parti a le droit de demander de récuser un juge électoral, dans la mesure où le parti contestataire a un problème avec ce dernier, fait savoir Hercule.

Pour leur part, les avocats de Jude Célestin ne veulent pas que les membres du Cep, signataires des résultats préliminaires de la présidentielle du 20 novembre 2016, fassent partie du tribunal électoral, pour cause de conflits d’intérêts, conformément à l’article 18-2 du décret électoral.

« Les membres, siégeant au niveau des instances de contentieux du Conseil électoral provisoire, ne doivent, en aucun cas, se trouver en situation de conflit d’intérêt. Ce, sous peine d’être écartés de la composition », stipule l’article 18-2 du décret électoral de 2015. [jep emb gp apr 14/12/2016 16 :32]