P-au-P, 27 sept. 2016 [AlterPresse] --- Le premier festival « Massimadi », prévu à Port-au-Prince du mardi 27 au vendredi 30 septembre 2016, a été reporté à une date ultérieure, en vue de s’attaquer à la décision prise par le commissaire du gouvernement, Jean Danton Léger, d’interdire l’événement, indique à AlterPresse, le responsable de l’organisation Kouraj, Charlot Jeudy.
Léger a pris la décision d’interdire le festival, parce que cette activité porte, dit-il, « atteinte aux mœurs et à l’ordre public ».
Ce rendez-vous culturel, consacré aux questions relatives aux Lesbiennes, gays, bisexuels, transsexuels et intersexes (Lgbti), devrait se dérouler à la Fondation connaissance et liberté (Fokal), l’Institut français en Haïti et la Cinémathèque de Pétionville (périphérie est).
La Fokal, qui devait accueillir également l’événement, a décidé de se retirer, suite à de « graves menaces », reçues la veille.
« Nous demanderons à notre avocat de faire une requête auprès du commissaire du gouvernement pour lever cette interdiction », a annoncé Jeudy.
Il dénonce les discriminations, les comportements et propos homophobes ainsi que les menaces de violences, émises par certains secteurs contre la tenue d’une telle activité.
« C’est dommage ! Cela démontre qu’en 2016 nous ne pouvons pas vivre avec nos différences, en tant que peuple, alors que nous sommes condamnés à évoluer ensemble, malgré nos différences.
Huit personnes, dont l’une vient de la France, cinq du Canada, l’une de Jamaïque et une autre de la République Dominicaine, ont été invitées à prendre part à ce festival, dénoncé par plusieurs autorités, dont des parlementaires.
Ce comportement d’homophobie démontre qu’il y a beaucoup de travail à faire, estime Jeudy, souhaitant qu’il y ait d’autres structures, comme l’organisation Kouraj, dans le pays.
Pour sa part, le directeur exécutif du Réseau national de défense des droits humains (Rnddh), Pierre Espérance, qualifie d’incitation à la violence les menaces proférées contre la Fokal.
Le Rnddh appelle à plus de tolérance par rapport à ce groupe ciblé.
Les pratiques d’homosexualité constituent une réalité dans la société, et les attitudes affichées cachent beaucoup d’hypocrisie, soutient-il.
Il désapprouve les menaces, subies par la Fokal dans cette affaire, alors qu’elle ne fait que prêter son espace pour le déroulement de l’activité.
« La personne a des droits, elle peut faire ce qu’elle veut de son corps. La société ne peut continuer à fonctionner dans l’intolérance. Naturellement, il ne saurait y avoir de ’mariage pour tous’ dans un pays, comme Haïti, où la majeure partie de la population vit dans le concubinage », argue-t-il.
Le festival international Lgbti vise à sensibiliser, éduquer, informer les membres des communautés africaines et antillaises sur les vécus de ces gens, en vue de lutter contre l’homophobie.
L’agitation du sujet, lié à une possible légalisation du mariage homosexuel en Haïti, a fait naître une vague d’actes et d’attitudes homophobes contre les Lgbti.
En juillet 2013, plus d’un millier de fidèles des cultes réformés ont marché, dans les rues de la capitale, pour dire non à l’homosexualité et exiger que les responsables de l’État mettent à l’écart toute éventualité de mariages homosexuels dans le pays.
Suite à cette marche, les meurtres, agressions physiques, destructions de biens et violations de propriétés privées se sont multipliés dans le pays, sous prétexte d’homophobie.
De nombreuses personnalités et associations de divers secteurs ont élevé la voix pour dénoncer ces actes violents. [jep emb gp apr 26/09/2016 17 :00]