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Haïti-Droits humains : A quand la désaffectation de l’ancienne prison civile de Fort-Liberté ?

De meilleures conditions de détention dans un futur proche, dans le nouveau bâtiment de Morne Casse ?

Correspondance Jéthro-Claudel Pierre Jeanty

Fort-Liberté, 28 août 2016 [AlterPresse] --- Les 459 détenus de la prison civile de Fort-Liberté (située au centre du chef-lieu du département du Nord-Est d’Haïti) pourraient bientôt être transférés dans le nouveau bâtiment, érigé à Morne Casse (entre Fort-Liberté et Ouanaminthe), selon les informations obtenues par l’agence en ligne AlterPresse.

« L’Administration pénitentiaire nationale (Apena) est en train de régler les formalités administratives, pour procéder au transfèrement des détenus dans une à deux semaines (durant le mois de septembre 2016) », indique à AlterPresse le commissaire du gouvernement près le tribunal civil de Fort-Liberté, Pélinos Mompremier.

Une cérémonie officielle de remise des clefs, du nouveau bâtiment de prison civile à Morne Casse, a eu lieu le mercredi 24 août 2016, en présence d’environ une cinquantaine d’agents de l’Apena [1].

Jusqu’à la fin de ce mois d’août 2016, le nouveau bâtiment de prison civile à Morne Casse n’a pas encore accueilli de détenus.

La prison civile, non encore désaffectée de Fort-Liberté, qui a une capacité d’accueil de 60 détenus, loge actuellement 459 détenus, soit 409 condamnés et 50 autres en attente de jugement.

Les personnes en attente de jugement seront gardées à l’ancienne prison civile, située au centre-fille de Fort-Liberté.

Les personnes, déjà condamnées, devraient connaître de meilleures conditions de détention, dans un futur proche, avec leur prochain transfèrement dans le nouveau bâtiment de prison civile, sis à Morne Casse, sur la route nationale No. 6 (à environ 5 km du bourg de Fort-Liberté), en face d’une base de la Mission des Nations unies de stabilisation en Haïti (Minustah).

Caractéristiques de la nouvelle prison de Morne Casse

Erigé dans la localité peu habitée de Morne Casse, le nouveau bâtiment de prison civile de Fort-Liberté a une superficie de 2 mille 852 mètres carrés. Il peut accueillir entre 500 à 600 détenus.

La nouvelle prison civile de Morne Casse contient des cellules uniques et d’autres ayant la capacité pour loger jusqu’à 24 détenus, constate AlterPresse, lors d’une visite guidée dans une partie de la prison.

Toutes les cellules visitées contiennent un bloc sanitaire et des grillages, qui devraient faciliter leur aération.

Le nouveau centre de détention de Morne Casse (Fort-Liberté) a été construit en partenariat avec le gouvernement haïtien, avec un financement d’environ huit millions de dollars américains (US $ 1.00 = 66.00 gourdes ; 1 euro = 77.00 gourdes ; 1 peso dominicain = 1.50 gourde) du gouvernement des Etats-Unis d’Amérique, à travers le Bureau international des affaires de stupéfiants et de l’application de la loi (Inl).

« Nous avons l’une des prisons les plus adaptées aux exigences internationales », s’est félicité le titulaire du Ministère de la justice et de la sécurité publique (Mjsp), Camille Junior Edouard, dans ses propos de circonstance, lors de la cérémonie officielle du mercredi 24 août 2016.

« Ce bâtiment répond parfaitement aux normes internationales. Il est équipé d’un système d’électrification constitué de panneaux solaires et d’inverters, et possède un dispositif lui permettant de s’approvisionner, de manière autonome, en eau potable. Il représente beaucoup plus qu’un espace de détention pour prisonniers. Il offre un environnement sécuritaire et humain, favorisant la réhabilitation et la réinsertion, en incluant des espaces pour la formation professionnelle, de grandes superficies de terre pour la pratique de l’agriculture, et des terrains pour la pratique du sport », fait savoir une note de l’ambassade américaine en Haïti.

« Personne ne peut prétendre connaître vraiment une nation, à moins d’avoir vu l’intérieur de ses prisons. Une nation ne doit pas être jugée selon la manière dont elle traite ses citoyens les plus éminents, mais ses citoyens les plus démunis », a, de son côté, souligné le chargé d’affaires de l’ambassade des Etats-Unis d’Amérique en Haïti, Brian Shukan.

Aggravation, depuis mai 2016, des conditions de vie des détenus à l’ancienne prison civile de Fort-Liberté

Les détenus qui vivaient, depuis toujours, dans des conditions infrahumaines, ont vu leur situation s’empirer, depuis le début du mois de mai de cette année 2016, avec l’augmentation de la température, affirme à AlterPresse le commissaire du gouvernement près le tribunal civil de Fort-Liberté, Pélinos Mompremier.

« Avant, la prison civile de Fort-Liberté enregistrait un décès chaque un ou deux mois. Actuellement, entre un à deux détenus meurent chaque semaine », rapporte Mompremier.

Ces décès sont survenus, suite à diverses maladies contractées, à cause des conditions hygiéniques et sanitaires de détention, ou bien avant leur détention. En général, ces décès sont généralement précipités par la promiscuité.

« Cette prison (située au bourg de Fort Liberté) reçoit plus de sept fois de détenus prévus, contraints de faire face à une chaleur époustouflante, dans les cellules mal aérées », précise Mompremier.

« Vu que la chaleur est devenue insupportable, la majorité des détenus sont obligés de rester nus. Des fois, leur sueur est tellement abondante …, qu’on a l’impression qu’ils auraient uriné sur le parquet de leurs cellules », décrit-il.

Interrogé par AlterPresse, le chef du parquet près le tribunal civil de Fort-Liberté ne cache pas combien « maintenir une personne en détention, dans ces conditions, est une violation flagrante de ses droits ».

« Si les proches des défunts décidaient de poursuivre l’Etat haïtien en justice, le bon droit serait de leur côté », poursuit-il, tout en rappelant que le statut de condamné d’une personne ne supprime pas tous ses droits. [jcpj rc apr 28/08/2016 15:00]


[1Ndlr : La cérémonie officielle de remise des clefs, du nouveau bâtiment de prison civile à Morne Casse (Fort-Liberté), s’est déroulée, le mercredi 24 août 2016, en présence, entre autres, de représentants du Ministère de la justice, du nouveau commandant en chef de la Police nationale d’Haïti (Pnh), Michel-Ange Gédéon, du responsable du système pénitentiaire en Haïti, Jean Gardy Muscadin, du conseil municipal de Fort-Liberté, ainsi que de représentants de l’ambassade étasunienne en Haïti et de la Minustah.