Español English French Kwéyol

Haïti-Choléra : L’urgence revient, selon un rapport de l’expert français Renaud Piarroux

La rupture de l’assistance humanitaire a handicapé la lutte contre la maladie

P-au-P, 06 août 2016 [AlterPresse] --- L’Assistance publique des hôpitaux de Marseille (Aphm) souhaite une relance immédiate du volet alerte/ réponse pour éviter d’importantes flambées du choléra en Haïti, dans un rapport publié le jeudi 4 août 2016 et transmis à AlterPresse.

La relance du volet alerte/réponse permettrait, selon elle, de pallier à l’augmentation du choléra, dans un contexte où la vulnérabilité de la population haïtienne est identique à celle qui prévalait au début de l’épidémie en octobre 2010.

Elle appelle à doubler le nombre d’équipes sur le terrain et augmenter la dotation en intrants, dans cette étude menée par l’expert français Renaud Piarroux et le Dr Stanislas Rebaudet.

« En 2014, il ne s’en est pas fallu beaucoup pour que la transmission du choléra ait été totalement interrompue, (…) malheureusement, depuis lors, les fonds nécessaires à la lutte ont diminué drastiquement et le choléra reprend de la vigueur ».

Sécuriser le budget des équipes sur le terrain pour donner une visibilité à moyen terme, relancer la mise en œuvre de petits projets, améliorer l’accès à l’eau potable orientée par les résultats des investigations menées lors de la réponse aux alertes sont parmi les recommandations formulées.

L’Aphm plaide en faveur d’une orientation des activités d’amélioration durable de l’accès à l’eau potable, de plus grande envergure vers les zones déjà identifiées comme à très haut risque de choléra.

Il faut renforcer la surveillance épidémiologique et mieux l’adapter à la lutte contre le choléra, améliorer la prise en charge des cas en constituant un pool de soignants spécialisés dans la prise en charge du choléra pour renforcer les structures de soins en difficulté

Elle préconise aussi d’améliorer la prise en charge et la sécurisation des enterrements dans les communautés afin de prévenir les flambées liées aux pratiques funéraires.

Elle insiste sur la nécessité de « revoir intégralement l’approche diagnostique, afin d’assurer un diagnostic microbiologique et un rendu de résultats dans un délai inférieur à 48 heures, temps de transport inclus ».

Elle exhorte à évaluer objectivement l’impact qu’ont eu les premières campagnes de vaccination contre le choléra avant de lancer de nouvelles campagnes.

Le rapport précise que presque six ans après le début de l’épidémie de choléra et plus de trois ans après le lancement d’un plan d’élimination qui n’a jamais bénéficié d’un financement en rapport avec les défis à relever, la vulnérabilité de la population haïtienne n’a pas diminué.

« Cette vulnérabilité est probablement en train d’augmenter à mesure que s’estompe l’immunité naturelle conférée par les vagues épidémiques de 2010-2011. Le volet Alerte/Réponse qui, initialement, avait donné des résultats spectaculaires donnant l’espoir d’une élimination rapide du choléra est maintenant dans l’impasse », poursuit-il.

Des financements conséquents et pérennes, une mobilisation des acteurs à tous les niveaux et une volonté politique d’en finir avec ce désastre sont essentiels pour gagner cette bataille.

« En seulement six mois, de janvier à juin 2016, plus de 21.000 cas et 200 décès ont été recensés en Haïti et la perspective d’une saison des pluies qui se prolongera jusqu’en novembre ou peut-être jusqu’en décembre nous laisse craindre un bilan particulièrement meurtrier du choléra cette année, la barre des 400, voire de 500 décès pouvant aisément être franchie, ce qui ferait 200 morts de plus qu’il y a deux ans », prévient le rapport.

La maladie a déjà fait au total 9, 361 mille morts et 786, 530 personnes infectées depuis son introduction en Haïti en octobre 2010 (à partir d’une base de casques bleus du Népal, à Mirebalais, Plateau central). [bd emb gp apr 06/08/2015 16 :30]