Préface et compte-rendu de lecture
Par Marie-Thérèse Labossière Thomas*
Soumis à AlterPresse le 5 juillet 2016
Un parcours. L’infinie tendresse d’Yva pour son « beau petit coin couronné de verdure » qui encadre l’ouvrage. [1] Un enchantement.
Émotion esthétique. Musique des vers. À travers le temps et la distance, « ... un parfum de rose, de jasmin et de bougainvillier ».
C’est ainsi que, de 1948 à 2005, Yva Youance partage son univers d’adolescente et d’adulte. D’inspiration romantique, elle évoque d’abord ses émotions de jeunesse dans le cadre de la nature et de l’amitié, auxquelles s’ajoute la compassion (« Voeu -À Marie Solange, la fille de la mendiante »).
La deuxième partie du recueil, « Pétales du Printemps », inclut le poignant « Sans adieu », dédié au père de l’auteur :
« À nous tu as laissé
Pour testament suprême
L’union et la fraternité
Le partage et l’amour »
Et, dans le poème « J’aime », un passage :
« Les pétales odorants
Nourris par la sève du Devoir
Et de l’amitié »
Ces sentiments de la famille et du devoir m’ont rappelé Mademoiselle Youance, l’éducatrice que j’ai connue un peu avant l’âge de douze ans et qui me fit apprendre par coeur des passages entiers de pièces classiques, dont « Le Cid » et « Horace »—et plus particulièrement « Les imprécations de Camille »—dont nous discutions ensuite pour en dégager les concepts et analyser le jeu des passions et de la raison.
« Pétales du Printemps » reflète aussi l’engagement citoyen et l’angoisse palpable d’une période de changement et de tumulte. Maturité, tristesse, amertume. Joie et espoir plus tard retrouvés dans le cadre familial.
Fille des Cayes et éducatrice respectée, Yva Youance dispensa, pendant des années, des cours en divers établissements de la ville, de même qu’aux élèves qui s’adressaient à elle pour le tutorat privé. Je la revois, traversant le Carrefour Horelle, les bras chargés de livres ou de cartables. Prestigieuse. D’une élégante simplicité.
Licenciée en droit de l’École Libre de Droit des Cayes, elle était, pour les jeunes de ma génération, un modèle autant qu’une inspiration. Dans notre contexte machiste, cela n’allait cependant pas sans inspirer, peut-être à son insu, la terreur d’un certain secteur de la gent masculine. « Ou wè Yva Youance. Li twò fò. Tout gason pè l. (Tu vois Yva Youance. Elle est trop calée. Cela effraie tous les hommes) », dit un jour l’un de ses contemporains.
Toute à ses activités, Yva trouvait encore le temps de prodiguer gratuitement des conseils juridiques, selon les besoins, et de s’impliquer dans des activités caritatives. Réservée et d’une politesse impeccable, elle imposait le respect et l’admiration. Madame Youance était pour nous, jeunes, une référence.
Merci, Yva de m’avoir associée à cette oeuvre où tu nous as replongé(e)s dans l’espace cayen. C’est pour moi un honneur autant qu’un privilège qui m’a aussi permis de renouer avec une partie de mon adolescence, dans le cadre de nos récentes et joyeuses retrouvailles. Magie des mots et des images. L’eau Renaud et son « caïman », « l’Île du Trésor » au large, La Ravine en crue et ses nombreux spectateurs « ...en longue file jacassante et curieuse ». Vie d’Haïti. Les cloches au lointain dans la fraîcheur des « soirs bleutés ». Ta poésie nous ramène au bercail.
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Yva Youance, Pétales du Printemps, Recueil de poésies. Première édition, Mexique, avril 2016.
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*Éducatrice, écrivaine
[1] Le recueil comprend en plus deux poèmes, ajoutés après la préparation de cette préface.