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Quelle malédiction pèse sur Haiti ?

I - A propos de la deforestation

Extrait d’un dossier publié par le mensuel martiniquais "Asé Pléré Annou Lite" (APAL) [1] dans son numéro 250 / novembre 2004 [2]

Soumis à AlterPresse en novembre 2004 et mis en ligne en 6 segments séparés [3]

On l’a beaucoup répété, les glissements de terrain et les inondations sont largement liés au fait que les forêts ont pratiquement disparu. De fait, la couverture forestière est passée de 20% au début des années 60 à moins de 2% aujourd’hui. Beaucoup se plaisent, là encore, à culpabiliser le peuple haitien. La triste réalité est que la population, qui vit dans la pauvreté que l’on sait, ne peut avoir accès qu’au charbon de bois, comme source d’énergie. (72% des besoins sont couverts par ce biais). Mais, assez curieusement, ceux qui donnent des lecons condescentantes d’écologie à des démunis qui se battent pour survivre, n’évoquent jamais la responsabilité de l’impérialisme dans la déforestation.

Joseph RONEY, haitien résidant en Belgique, indiquait, par exemple, dans une interview accordé à l’hebdomadaire "Solidaire" que :

"La plus grande forêt en Haiti a été dévastée au début des années 60 pour le compte d’une société privée qui était la propriété des dignitaires du régime parmi lesquels l’épouse du fameux dictateur Duvalier. Il s’agit de la forêt des pins qui se situait au sud de Port-au-Prince. On a coupé tous les arbres de cette forêt au profit des sociétés américaines qui fabriquaient de l’huile de résine destinée à l’aéronautique."

Ceci dit, il faut insister sur le fait que la déforestation n’est ni une fatalité ni irrémédiable. On sait que dans de nombreux pays, des gouvernements ont pu impulser des politiques efficaces de reboisement . Pour ne citer qu’un exemple dans la région, on pense à la production massive d’arbres à croissance rapide destinés à l’exploitation industrielle à Cuba et à la campagne qui a lieu cette année à la Havane pour planter deux millions cinq cent milles arbres.

Cette question de la déforestation est également utilisée à des fins de désinformation, afin d’escamoter les autres problèmes liés à l’agriculture et à l’absence de politique de remédiation. A tel point que l’opinion extérieure ignore généralement qu’il existe une forte production et même des exportations dans le secteur agricole haitien.

Au delà de la question des forêts, Haiti dispose de potentialités qui permettraient de reconstruire l’équilibre écologique. Robert Philomé, journaliste haitien, notait dans un article de la revue " Volcan No 56"que : "Malgré l’état de délabrement de l’environnement en Haiti, le pays abrite une richesse biologique et écologique exceptionnelle. Des broussailles semi-désertiques aux forêts nébuleuses en passant par les mangrTves, les récifs corraliens, les lacs, les étangs, zones humides et autres rivières, tout concourt à faire de cet espace un véritable paradis. Selon le ministère de l’agriculture, la flore naturelle haitienne compte plus de 5000 espèces de plantes vasculaires, 30% des espèces végétales et plus de 2000 espèces animales sont endémiques à l’ile d’ Haiti."


[1partenaire d’AlterPresse

[2APAL remercie particulièrement Mr Jean Desrosier DESRIVIERES qui a largement contribué à la réalisation de ce dossier.