Par Betty Désir
P-au-P, 30 mars 2016 [AlterPresse] --- Votée par référendum, le 29 mars 1987, la Constitution haïtienne de 1987 est passée à l’examen par des historiens, sociologues et juristes, lors d’une journée de réflexion, déroulée à Port-au-Prince, le mardi 29 mars 2016 et à laquelle a assisté l’agence en ligne AlterPresse.
« Il faudrait que le prochain pouvoir exécutif lance la procédure [pour l’élaboration] d’une nouvelle Constitution » haïtienne, exige la constitutionnaliste Myrlande Hyppolite Manigat, ancienne candidate à la présidence aux élections du 28 novembre 2010 et du 20 mars 2011.
Beaucoup de citoyennes et citoyens sont analphabètes. Ils ne comprennent pas ce qu’est une Constitution dont la dernière en date est celle de 1987, exprime la secrétaire générale du Rassemblement des démocrates nationaux progressistes (Rdnp), à l’occasion du 29e anniversaire de la Constitution haïtienne (29 mars 1987 - 29 mars 2016).
Il conviendrait de faire une vulgarisation, à l’oral, de la Constitution haïtienne, affirme Manigat, qui prône la réalisation d’une éducation civique en Créole.
298 articles poseraient problème dans la Constitution de 1987, écrite en Français et en Créole, relève Myrlande Hyppolite Manigat.
« Je ne suis pas contre l’amendement en soi, mais je pense qu’au lieu de multiplier les amendements, il est nécessaire de mettre sur pied une autre Constitution », dit-elle.
Toutes les Constitutions, qu’a connues le pays, depuis 1804, ont les mêmes cadrages et les mêmes objectifs, estimel’historien Pierre Buteau, intervenant autour du thème « À l’école du provisoire : comment sortir d’une hégémonie ».
« On a l’impression que la Constitution du 29 mars 1987 (qui est la conséquence des 30 années du régime duvaliériste), dans sa prétention et son ambition, s’éloigne des autres Constitutions. Elle ressemblerait plus à un programme politique qu’à une Constitution », avance-t-il.
Il n’y a pas eu d’amendement (de la Constitution de 1987). Celui, qui a été opéré en mai 2011, dont une version a été rendue publique en juin 2012, n’a apporté que des catastrophes, signale Pierre Buteau.
La logique du provisoire
La notion de « transition », désignée par le « provisoire est ancrée dans l’histoire haïtienne.
« Ça fait plus de 5 siècles, depuis que nous vivons des situations, où le provisoire domine », déplore, pour sa part, le sociologue Fils-Lien Ely Thélot, auteur de l’ouvrage « l’hégémonie du provisoire. Aux origines de nos turbulences ».
Dans son ouvrage, Thélot reconnaît combien la politique n’est pas le seul lieu où le provisoire règne en maître.
Haïti a subi une réelle hégémonie, qui pénètre tout notre système, comme la politique, le culturel et autres.
La longévité de la Constitution de 987 n’a pas permis d’instaurer un régime politique, réglé par des institutions et par la loi, ni de sortir des instabilités multi-facettes, pour entrer dans un temps de progrès social et économique ou encore humain, critique Thélot.
Le sociologue Thélot encourage des débats sur la problématique du provisoire, afin de dégager des pistes de solutions à des questions essentielles, liées à la crise haïtienne.
« Nous ne déployons pas beaucoup d’efforts. Nous nous considérons, plutôt, comme des provisoires, sans penser que ça prend du temps pour construire et faire des changements en profondeur » (…).
Initiée par le journal Haïti monde, les éditions de l’Université d’État d’Haïti et l’Université Quisqueya, la journée de réflexion du mardi 29 mars 2016 a été réalisée autour du thème : « Pourquoi une nouvelle constitution aujourd’hui » et de l’ouvrage intitulé « l’hégémonie du provisoire en Haïti. Aux origines de nos turbulences ». [bd emb rc apr 30/03/2016 12:20].