Communiqué de N Ap Sove Ayiti (NAPSA), une organisation de jeunes professionnels haïtiens
Soumis à AlterPresse le 23 janvier 2016
La crise électorale actuelle dure déjà plus de cinq mois remontant principalement aux résultats contestés des élections du 9 août 2015 aggravée par les accusations de fraudes massives aux élections du 25 octobre 2015. La situation politique du pays semble nous conduire vers une catastrophe imminente vu l’augmentation continue de la cherté de la vie et l’aggravation évidente des problèmes sociaux.
Malgré les nombreuses déclarations de l’Exécutif et du CEP affirmant qu’ils étaient prêts à organiser le deuxième tour des élections présidentielles le 24 janvier 2016, c’est un CEP affaibli et largement discrédité qui a dû annoncer l’annulation des élections dans l’après-midi du 22 janvier, soit moins de 48 heures avant la réalisation de celles-ci.
Si cette déclaration a, en quelque sorte, calmé les manifestants qui occupaient les rues ce vendredi, elle ne semble pas convaincre pourtant les acteurs de l’opposition politique d’accepter enfin un dialogue avec le pouvoir en place en vue de trouver une solution conjointe et définitive à la crise.
Cette crise qui est à la fois conjoncturelle, structurelle et géopolitique est avant tout le reflet d’une importante et longue crise de société fondée en Haïti sur l’opportunisme et l’égoïsme au détriment de l’intérêt collectif. La misère du peuple haïtien et le dysfonctionnement de nos institutions sont des conséquences directes de cette culture de mort qui rejette tout effort favorable à l’éveil de notre conscience collective.
Dans ces conditions, changer le CEP et remplacer ses membres par d’autres visages venus des mêmes secteurs antérieurement représentés est-elle la vraie solution ? Par ailleurs, qui n’est pas conscient que l’acceptation ces jours-ci d’un poste au CEP revient à mettre en péril sa propre moralité ? En outre, s’il devient difficile de se fier présentement à ce pouvoir exécutif si proche du poulain du président, faut-il toutefois s’en remettre à une transition politique incertaine et naturellement faible en légitimité ? Enfin, n’est-elle pas décriée la communauté internationale accusée de soutien inconditionnel au pouvoir en place et aveuglée, dit-on, par ses propres intérêts, incompatibles avec les intérêts nationaux ?
Face à une situation si complexe mais également urgente de résoudre à cause de son caractère désastreux, NAPSA recommande :
1. à l’Exécutif d’appliquer à la lettre les recommandations de la Commission d’évaluation électorale
2. aux différents acteurs politiques du pouvoir et de l’opposition de signer entre temps un pacte national de non-violence ; de trouver, à travers un dialogue constructif et un sacrifice citoyen, un consensus durable basé sur l’intérêt collectif et l’avenir d’Haïti, pour l’organisation des élections générales au maximum dans les prochains 60 jours.
3. au G-8 en général de parler d’une seule voix et que, pour le bien du pays, aucun de ses membres n’envisage le retrait de Jovenel Moïse parmi les conditions nécessaires pour la tenue du deuxième tour. En effet, cette exigence semble aller au-delà d’une logique consensuelle et pourra même compromettre la stabilité en Haïti au cours du prochain mandat présidentiel.
4. à la communauté internationale de ne pas compromettre la transition démocratique en Haïti au bénéfice de ses intérêts.
5. au peuple haïtien de se calmer, de ne pas se laisser manipuler par des intérêts de clan et de s’engager en vue d’une participation massive et sereine aux prochaines joutes électorales.
Il revient aujourd’hui aux Haïtiens de prendre Haïti en main et de nourrir une conscience collective et citoyenne, seule digne de nous faire sortir de l’impasse des crises électorales perpétuelles, caractéristiques de notre transition démocratique post-Duvalier. Ainsi, sur le long terme, devrons-nous ensuite, pour un changement structurel, nous attaquer aux fondements de notre mentalité et de notre culture de peuple par un travail de conscientisation de chaque citoyen auquel il faudra inculquer le sens de la priorité de l’intérêt commun.
Pour la NAPSA :
Pierre Cœur-Saint JEAN-CLAUDE, Coordonnateur de NAPSA-Port-au-Prince
Lully CHARLES, Responsable de l’incidence sociopolitique de NAPSA-Haïti
Smith AUGUSTIN, Secrétaire technique du directoire
Joseph Harold Pierre, Coordonnateur général du directoire