Par Emmanuel Marino Bruno
P-au-P, 11 janv. 2016 [AlterPresse] --- La Concertation pour Haïti (Cph) exhorte le gouvernement canadien à ne pas placer l’industrie minière au centre de la reconstruction et du développement en Haïti, dans un communiqué en date du 7 janvier 2016, transmis à AlterPresse.
À la veille du sixième anniversaire du tremblement de terre du 12 janvier 2010, ayant occasionné en Haïti près de 300 milles morts et des milliers de blessés, elle lui demande de modifier la stratégie quinquennale d’engagement en Haïti, adoptée par le régime conservateur en juin 2015.
Lors du lancement d’un rapport intitulé « L’industrie minière en Haïti : défis et réalité », la Concertation pour Haïti a appelé le nouveau gouvernement libéral de changer de cap en ce qui concerne la république d’Haïti.
Haïti, « l’un des États les plus fragiles du monde, n’a pas la capacité de gouvernance nécessaire, pour que l’industrie minière permette à ce pays de briser le cycle de la pauvreté », a souligné Gerardo Ducos de la Concertation pour Haïti.
Dans ce rapport, la Cph attire l’attention sur quelques points d’intérêt d’un projet de loi à l’étude, qui placerait les intérêts des compagnies transnationales avant ceux de l’État et de la population.
Ce projet de loi n’établit pas un régime de « royalties » (Ndlr : redevances à verser, de manière régulière, à l’Etat d’Haïti, en échange du droit d’exploitation des ressources du sous-sol), garantissant des bénéfices équitables pour Haïti.
La faiblesse des clauses environnementales et l’absence des dispositions - assurant un consentement libre, préalable et éclairé de communautés qui seront affectées et déplacées - figurent parmi les critiques formulées, dans ce rapport, contre ce projet de loi « qui ne prévoit pas de débats publics sur l’utilisation des revenus pour le développement d’Haïti ».
La Cph exige également, du gouvernement canadien, la mise sur pied d’un système effectif de reddition de comptes pour les sociétés minières canadiennes opérant à l’étranger.
Plusieurs compagnies, notamment canadiennes, sont impliquées dans l’industrie minière naissante en Haïti.
Sans consulter les communautés, concernées par les exploitations minières, un avant-projet de loi minière a même été élaboré avec le concours de la Banque mondiale (Bm).
Le document contient des lacunes, susceptibles de mettre l’environnement d’Haïti en péril et d’entraver l’État, a relevé l’organisation Oxfam, dans une note en date du jeudi 20 août 2015.
Pour leur part, plusieurs organisations de la société civile ont dénoncé un éventuel décret gouvernemental sur la loi minière.
Le Collectif justice mine (Cjm), Fòs refleksyon ak aksyon sou koze kay (Force de réflexion et d’action pour le logement / Frakka ), le Groupe d’appui aux rapatriés et aux réfugiés (Garr), les défenseurs sans frontières des droits humains (Desafrodh), l’Initiative du mouvement patriotique démocratique et populaire (Impdp), le Groupe de recherches et d’appui au développement des collectivités territoriales (Grad) ont, sans cesse, appelé à protéger le patrimoine du pays.
Ces organisations dénonciatrices ont mis en garde contre une tentative du gouvernement de publier un décret sur la loi minière, qui représente un danger pour l’économie du pays.
De concert avec des compagnies minières transnationales, le gouvernement haïtien entendrait profiter du vide parlementaire pour signer, de manière illégale, une loi minière sans consentement des autres instances concernées, alors que le Bureau des mines et de l’énergie (Bme) avait fait état d’un moratoire sur la question des mines en Haïti, après une résolution du sénat de la république, prise depuis l’année 2013. [emb rc apr 11/01/2016 1:30]