P-au-P, 16 déc. 2015 [AlterPresse] --- Plusieurs organisations condamnent l’insouciance des autorités étatiques par rapport à la recrudescence de l’insécurité dans le pays, notamment dans la capitale Port-au-Prince, dans des interviews accordées à l’agence en ligne AlterPresse.
Cette recrudescence est due à plusieurs facteurs, comme la libération de bandits impliqués dans le kidnapping, le trafic de drogue et le blanchiment d’argent, estime le directeur exécutif du Réseau national de défense des droits humains (Rnddh), Pierre Espérance.
Le Rnddh évoque la libération, par la justice haïtienne, le 17 avril 2015, à l’issue d’un jugement express, de Woodly Ethéart, alias « Sonson La Familia » (présumé chef du gang Galil ) et Renel Nelfort, surnommé « Le Recif », accusés de grand banditisme, particulièrement de kidnapping, trafic de drogue et blanchiment d’argent.
« Les policiers nationaux ont constaté que ce sont les autorités, au plus haut niveau de l’Etat, qui libèrent des bandits. Cela a déstabilisé et démotivé la police. Ces différents chefs de gang mettent en danger la vie d’une série de policiers, qui avaient fait des efforts pour les démanteler », explique le Rnddh.
« Le gang Galil a beaucoup de ramification dans le pays. Depuis la libération des principaux chefs de gang, la principale cible de ces bandits criminels est la Police nationale d’Haïti (Pnh). Beaucoup de policiers sont morts au cours de l’année 2015 ».
L’effectif réduit de la police est aussi à la base de l’augmentation de l’insécurité dans le pays.
La Brigade d’intervention motorisée (Bim) n’a plus aucune utilité, parce qu’il y a trop de policiers de ce corps, qui sont en détachement avec d’autres individus, regrette-t-il.
En termes de propositions, le Rnddh suggère que le Conseil supérieur de la Police nationale (Cspn), sous le leadership du premier ministre Evans Paul, réévalue l’effectif de l’institution et force les policiers à accomplir leur travail.
« Il faut que le système judiciaire prenne ses responsabilités. Trop de bandits sont en connivence avec des juges, qui ne protègent pas les citoyens contre les actes de banditismes et de délinquance ».
Le Rnddh pointe du doigt l’exécutif, qui alimenterait les chefs de gang dans les quartiers de La Saline et de la grande agglomération de Cité Soleil, afin de prendre la population en otage et l’empêcher de manifester dans les rues contre les élections frauduleuses du 9 août et du 25 octobre 2015.
La capitale haïtienne est l’endroit où il y a plus de gens, qui sont victimes de l’insécurité durant ces deux dernières semaines, relève, pour sa part, le coordonnateur national de la commission épiscopale (catholique romaine) Justice et paix (Jilap), Rovelson Apollon.
« Comment se fait-il que des actions se passent, dans des périmètres proches des commissariats, alors que la Pnh ne fait rien », fustige Jilap, prenant l’exemple de la fusillade orchestrée, le samedi 5 décembre 2015, par des bandits armés, après avoir attaqué un magasin au marché public de Salomon (centre-ville de Port-au-Prince).
Quatre personnes, dont un étudiant de la Faculté des sciences humaines (Fasch) de l’Université d’Etat d’Haïti (Ueh), Stevenson Oczéus, ont été tuées dans cette fusillade.
De marché Salomon jusqu’aux alentours du Stade Sylvio Cator, aucune patrouille de la police n’a été alertée pour stopper les bandits, déplore Jilap.
Où se trouve le service secret de la police ?, s’interroge Jilap, soulignant combien les crimes deviennent faciles dans le pays.
La presse exagérerait en ce qui à trait à la recrudescence de l’insécurité, estime, de son côté, le commissaire divisionnaire Frantz Lerebours, joint au téléphone par AlterPresse.
Entre-temps, la police peine à résorber l’insécurité dans le pays, exacerbée par une crise électorale qui se fait de plus en plus aiguë.
Le corps de la jeune étudiante Lencie Mirville, kidnappée le mardi 1er décembre 2015 à Bizoton, a été retrouvé le mardi 8 décembre 2015 dans un ravin, sur la route de l’amitié, menant à Jacmel (Sud-Est).
Le 12 décembre 2015, l’ingénieur Robens Damuse, âgé de 33 ans et opérateur en chef au sein de l’entreprise E-Power, a été abattu à Delmas par des individus armés pendant qu’il revenait d’une banque commerciale.
Dans l’après-midi du lundi 07 décembre 2015, l’ancien animateur de compas, Cheristin Ferdinand, connu sous le sobriquet « Mass Design », a été froidement assassiné par des individus armés circulant à bord de motocyclette. [jep emb rc apr 16/12/2015 10:20]