Extraits d’une lettre de Nancy Roc, Journaliste indépendante et Productrice
(Contributrice à AlterPresse), adressée le 7 novembre 2004 à Reporters Sans Frontières pour faire part de propos menaçants à son encontre, provenant de Winter Etienne, dirigeant du Front de Résistance Nationale (FRN).
Soumis à AlterPresse le 7 novembre 2004
(Â…) je tiens à signaler à Reporters sans Frontières que j’ai reçu des menaces et des intimidations des plus dangereuses proférées contre ma personne par M. Winter Etienne, actuellement membre du Front de Résistance de l’Artibonite, et ex-membre de l’Armée Cannibale aux Gonaïves.
En effet, le samedi 6 novembre, de graves incidents ont éclaté aux Gonaïves relatés par plusieurs radios et agences de presse (Â…) [1]
Suite à ces incidents, dans deux déclarations faites sur les ondes de Radio Vision 2000 et celles de Caraïbes FM, Winter Etienne a déclaré le samedi 6 novembre 2004, que « la police et la MINUSTAH avaient fait un complot pour assassiner Butter Métayer et qu’il comprenait ledit complot. En effet, la journaliste de Metropolis, Nancy Roc, avait l’année dernière fait une émission sur Amiot Métayer et une semaine après, il a été assassiné. Aujourd’hui, elle vient de quitter les Gonaïves et on a essayé d’assassiner Butter Métayer », a-t-il déclaré. Winter Etienne a ajouté que « le Front allait mener une enquête pour savoir combien de gens étaient mêlés à ce complot et à cet assassinat ». Il a également invité les ex-Forces Armées d’Haïti à se joindre au Front pour apporter la sécurité aux Gonaïves.
Ces déclarations des plus dangereuses pour ma sécurité font suite à une enquête que j’ai menée sur le terrain aux Gonaïves du lundi 25 octobre au jeudi 28 octobre dernier. Durant ma visite aux Gonaïves, qui avait pour but principal de faire un bilan de la situation aux Gonaïves et de celle des sinistrés un mois après le passage de la tempête Jeanne, Winter Etienne m’avait donné rendez-vous à deux reprises pour une interview, rendez-vous auxquels il ne s’est jamais rendu. Suite à ma visite aux Gonaïves, j’ai eu une interview exclusive avec le Président de la République, Me Bonniface Alexandre, où je lui ai montré, micro ouvert, les photos de l’état des Gonaïves pour qu’il les commente à mes auditeurs. Lors de cette entrevue, diffusé le samedi 30 octobre sur les ondes de Radio Métropole, j’ai révélé au Président que Winter Etienne m’avait déclaré n’avoir jamais fait partie de l’armée cannibale et qu’il ne s’était pas rendu aux rendez-vous qu’il m’avait fixés. J’ai également fait état du fait que sur tous les murs de Raboteau, base de l’ex-armée cannibale, des graffitis disaient « Vive Youri Latortue ».
Je tiens à souligner à Reporters sans Frontières qu’en 2003, je ne me suis jamais rendue aux Gonaïves. Quant à l’assassinat d’Amiot Métayer, je l’ai dénoncé le 2 octobre 2003, soit 11 jours après son assassinat le 21 septembre 2003, dans mon émission Metropolis sur Radio Métropole et dans mon livre Les Grands dossiers de Metropolis volume II publié en décembre 2003 aux éditions Deschamps dans mon grand dossier intitulé : « Justice et Démocratie : le devoir d’être libre », page 163, en qualifiant cet assassinat de « crime crapuleux ».
Je tiens donc, par la présente, à alerter l’opinion locale et internationale en particulier, sur les dangereuses conséquences que peuvent avoir les déclarations de Winter Etienne contre ma personne et souhaite que toutes les dispositions soient prises par rapport aux intimidations proférées contre ma personne par ce dernier.
(Â…) ce samedi 6 novembre 2004, malgré et suite aux menaces de Winter Etienne proférées dans la matinée sur les ondes de Radio Caraïbes et à midi sur les ondes de Vision 2000, mon émission spéciale sur les Gonaïves intitulée « Gonaïves, la Cité de la honte » a été diffusée à 1hPM sur les ondes de Radio Métropole et reprise ce dimanche à 5h30 PM. (Â…) je bénéficie depuis hier d’une sécurité armée rapprochée de la Police Nationale d’Haïti 24h sur 24h et ceci pour une durée indéterminée.
Nancy Roc
Journaliste indépendante et Productrice
Port-au-Prince, le 7 novembre 2004
[1] NDLR : Le 6 novembre, Gonaives a été le théatre de violents incidents suite à une action du Front de résistance nationale contre le commissariat de la police, ont rapporté des correspondants locaux. Le commissariat a été saccagé et pillé par des manifestants. Les policiers ont fui. Une intervention des troupes des Nations Unies a permis le retour au calme.