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Haïti-Diplomatie : Madame l’Ambassadeur Pamela White merci, mais non merci

Hommage aux employés de l’administration publique haïtienne

Par Marcel Duret *

Soumis à AlterPresse

« Ils sont d’accord avec moi que la corruption existe à tous les niveaux, confie l’ambassadeur. On peut être en prison et acheter sa liberté. Il y a un prix pour n’importe quoi ici. Et ce, dans l’administration publique, dans le secteur politique, etc. » Ce sont les propos de Pamela White, Ambassadeur des Etats-Unis en Haïti, qui retourne heureusement chez elle bientôt.

Quelle arrogance ! Quel toupet ! Quel manque de respect pour un pays et son peuple qu’elle dit adorer !

Madame l’Ambassadeur, je me permets de vous contredire en vous relatant des moments que j’ai vécus récemment en fréquentant des directions et des employés de l’administration publique de deux Ministères dans le cadre de l’obtention d’une franchise douanière pour une ONG dont je suis le PDG :

DGI

Mes visites à la DGI commencent toujours par une consultation au bureau du Directeur Général avec trois femmes gentilles et affables toujours disponibles et qui m’orientent vers la section ou la personne concernée. Elles représentent ce qu’il y a de plus stable dans l’institution malgré les changements fréquents de Directeurs Généraux. Elles assurent la continuité et la transmission des procédures.

Jamais il n’a été question de marchandage pour les services

A la section des ONG de la DGI, j’ai rencontré Mesdames Louise Constant et Immaculène Louise Jacquet Roméus qui m’ont entretenu en attendant que je rencontre le Directeur Mr. Excellent José. Ce dernier a profité de notre entrevue pour me faire tout un cours sur la fiscalité et du devoir des responsables d’ONG de faciliter le paiement des impôts sur le revenu par leurs employés. J’ai pu obtenir en un temps record le quitus fiscal.

Jamais il n’a été question de marchandage pour les services

J’ai formellement payé à la banque 1000g pour obtenir le matricule fiscal de l’ONG et quelques jours plus tard j’ai eu le bonheur de rencontrer Madame Bitorial Elise qui en un tour de main m’a remis le certificat.

A la DGI de Delmas trois dames m’ont pris en charge et m’ont remis séance tenante mon certificat de déclaration définitive d’impôt.

Jamais il n’a été question de marchandage pour les services

A l’UCAONG (Unité de Coordination des Activités des ONG du MPCE), je ne sais combien de fois j’ai eu à visiter cette entité sur une période de 3 mois. Mais il ne s’agit pas d’une quelconque faute de la part des employés. En effet, ce sont des professionnels qui connaissent bien leur rôle et qui sont d’une rigueur sans pareille. De la liste des pièces à fournir, on ne peut manquer une seule. Il y a une procédure claire qu’il faut respecter et pas de « passe pour qui ». De la Directrice Madame Bernice Kavanagh Clément à Madame Marie Carme W. Joseph, de Monsieur Jean Germain à Alain Désir, Ils sont tous serviables, respectueux mais « pwenn fè pa ». Mon dossier a été finalement expédié au Ministère des Finances et de l’Economie.

Jamais il n’a été question de marchandage pour les services

Ministère de l’Economie et des Finances

A la Direction de l’Inspection Fiscale du Ministère de l’Economie et des Finances notamment à la section de la franchise, Monsieur Michel Patrick Boisvert, le Directeur, qui m’a reçu sans rendez vous, après quelques questions sur l’ONG, m’a expliqué que puisque c’est la première fois que l’institution fait une demande de franchise il faut que des inspecteurs aillent sur les lieux pour vérifier son existence. Il s’agit d’une visite inopinée. Le surlendemain deux jeunes inspecteurs Markenson Lagrenade et Gareb Thélémaque (la relève est assurée) arrivent à mon bureau à la première heure. Ils m’ont bombardé de questions et étaient quelque peu surpris que l’ONG ne compte pas d’étrangers (blancs) dans son sein.
Finalement j’ai reçu le mémorandum adressé à la Douane de Port-au-Prince accordant la franchise.

Jamais il n’a été question de marchandage pour les services

Madame l’Ambassadeur White,

Je suis fier de mes compatriotes qui avec honnêteté et professionnalisme donnent des services à la population, et ils sont nombreux. Vous leur avez infligé une gifle quand vous dites que la corruption est à tous les niveaux de la société, incluant l’administration publique. Vous avez insulté toute une nation.

Loin de vouloir défendre ceux qui sont impliqués dans des actes de corruption qui existent partout dans le monde, incluant les Etats-Unis d’Amérique, en tant qu’Ambassadeur vous devez cultiver un minimum de respect pour le peuple du pays ou vous êtes accréditées. Imaginez qu’après avoir été Ambassadeur d’Haïti aux Etats-Unis pendant un certain nombre d’années j’aurais déclaré au Washington Post qu’il s’agit d’un pays essentiellement raciste. Ce serait un manque de respect de la part d’un Ambassadeur vis-à-vis du peuple américain. Malheureusement la notion de respect n’est pas enseignée à l’université ou à l’école de la diplomatie. C’est plutôt l’une des valeurs essentielles qui sont transmises dans le milieu familial.

Madame l’Ambassadeur White,

Dois-je vous rappeler que les entretiens que vous avez avec les autorités d’un pays demeurent confidentiels ? Dans quelle circonstance le Président et le Premier Ministre haïtiens vous auraient confié que la corruption existe à tous les niveaux de la société ?

D’aucuns se souviennent de votre présence arrogante et sans gêne au parlement lors du vote devant décider de la viabilité de la 49e législature. Il est rapporté que vous portiez une sandale « Jezikri » ce jour-là dans l’enceinte du parlement. Même animée des meilleures intentions, acceptez que je vous dise Madame, qu’il s’agissait d’une manifestation flagrante d’ingérence et de condescendance dans les affaires internes d’un pays.

A aucun moment je ne vous ai entendu remercier le peuple haïtien de son hospitalité. Alors Madame l’Ambassadeur White, avec tout le respect que je vous dois, allez en paix, retournez chez vous, ne vous inquiétez pas, ce pays que vous adorez survivra sans vous.

……..

* Ex Ambassadeur d’Haïti à Tokyo