P-au-P, 23 juil. 2015 [AlterPresse] --- 28 ans après, la commémoration du massacre de 139 paysans de Jean Rabel (nord-ouest) a été placée dans la lignée des luttes paysannes en Haïti.
L’organisation Tèt kole ti peyizan ayisyen (Union des petits paysans haïtiens) a organisé une série d’activités clôturée ce 23 juillet par une marche.
La marche s’est arrêtée sur le pont situé à l’embouchure des Trois-Rivières, où des représentants d’organisations paysannes et du mouvement social en général ont réaffirmé leurs principales revendications pour un relèvement de l’agriculture nationale.
Pour le mouvement paysan dans le Nord-Ouest, la résolution du problème de la faim dans ce département passe principalement par la construction d’un barrage sur les Trois-Rivières et non par la distribution de coupons de nourriture.
La veille, 22 juillet, une caravane s’est rendue à Bassin bleu pour évoquer la construction de ce barrage dans un endroit considéré comme zone rouge en termes d’insécurité alimentaire.
« Dans un pays qui ne produit pas, l’on ne peut parler de sécurité alimentaire [seulement] », mais plutôt de souveraineté alimentaire, précise toutefois Rosnel Jean Baptiste.
La souveraineté alimentaire est liée à la terre, à l’eau, aux infrastructures agricoles, rappelle-t-il, déplorant le fait que le Nord-Ouest n’ait même pas un kilomètre de route asphaltée.
Cette notion de souveraineté alimentaire a été au cœur des discussions entamées depuis le 21 juillet pour commémorer les 28 ans du massacre de Jean Rabel.
Le 100e anniversaire de la première occupation américaine (28 juillet-21 août 1934) ainsi que les élections, « moyens pour les ennemis d’Haïti de mettre leurs agents au pouvoir et défendre les intérêts de l’élite et des multinationales », ont eu également une attention spéciale, souligne Rosnel Jean Baptiste.
Le 23 juillet 1987, 139 paysans et paysannes ont été tués par des grands propriétaires terriens avec l’aide d’anciens membres de la milice des Duvalier.
« Tous les 23 juillet Tèt kole ti peyizan ayisyen crie justice pour les familles et proches des victimes de Jean Rabel », signale Jean Baptiste.
Pour lui, la lutte paysanne a commencé en 1791 avec l’insurrection générale des esclaves dans l’ancienne Saint Domingue. Depuis, les mouvements à tendance révolutionnaire de Moise, Goman, Acaau et autres ont été réprimés dans le sang.
Si au fil des années, les bourreaux changent, qu’ils soient l’élite haïtienne ou des envahisseurs à l’image des Américains, le projet, lui, est le même.
Mais, « les paysans continuent de lutter ! », martèle Rosnel Jean Baptiste. [kft gp apr 23/07/2015 14 :40]