P-au-P, 25 mars 2015 [AlterPresse] --- A deux jours d’une rencontre binationale fixée pour le vendredi 27 mars entre les autorités d’Haïti et de la République Dominicaine, des milliers d’Haïtiens vivant en territoire dominicain sont encore menacés d’expulsion, apprend AlterPresse.
Cette rencontre binationale fait suite aux discussions tenues entre le chancelier haïtien Duly Brutus et son homologue dominicain Andres Navarro le vendredi 13 mars écoulé à Jimani, ville dominicaine limitrophe de la frontière haïtienne.
En dépit de ces pourparlers, des centaines d’Haïtiens vivant en situation irrégulière en territoire dominicain et plus de 300 mille Dominicains descendants d’Haïtiens sont encore menacés d’expulsions forcées à partir du 16 juin prochain, date limite du processus de régularisation, indique un bulletin du bureau des Nations Unies de coordination des affaires humanitaires (Ocha) en Haïti.
La nécessité de se préparer à répondre à un éventuel rapatriement de ces personnes a été soulignée lors des rencontres tenues au cours du mois de mars entre l’Office national des migrations (Onm) et ses partenaires, selon le bulletin.
L’Onm, appuyé par le système des Nations Unies en Haïti et d’autres partenaires internationaux, se mobilise afin de répondre de manière efficace à un éventuel flux migratoire, y lit-on.
Au terme d’une mission conduite le 9 mars dernier, des acteurs humanitaires ont encouragé la mise en œuvre rapide d’un processus de planification d’urgence sous la direction de l’Onm avec le soutien actif de tous les partenaires nationaux et internationaux concernés par la question.
Crainte exprimée face à la poursuite d’autres rapatriements
Depuis quelques temps, le très faible pourcentage d’Haïtiens régularisés et les faibles résultats du Programme d’identification et de documentation des immigrants haïtiens (Pidih), fait craindre des rapatriements massifs et l’accueil d’apatrides en Haïti.
Des organisations de défense des droits des migrants ont souhaité une réorientation et une prorogation du Plan national de régularisation des étrangers en situation irrégulière en République Dominicaine (Pnre), mis en place au bénéfice des migrants haïtiens en vue d’éviter d’autres rapatriements.
Une remontée de l’anti-haitianisme conduisant même à l’expulsion d’un nombre croissant d’Haïtiens sans vérification de leur statut d’immigration a été observée depuis l’assassinat, entre autres, d’un migrant haïtien du nom de Jean Claude Henry en territoire dominicain, le 11 février 2015.
Des rapatriements se sont poursuivis au niveau des points frontaliers notamment à la frontière de Belladère/Elias Piña (est) où des femmes séparées de leurs enfants ont été rapatriées par des militaires dominicains début mars 2015.
Entretemps, des organisations haïtiennes et dominicaines se disent préoccupées par rapport à l’éventualité de déportations massives de milliers de migrants/migrantes haïtiens, à l’expiration, à la fin du mois de juin 2015, du programme de régularisation, rapporte dans une note le Groupe d’appui aux rapatriés et refugiés (Garr).
Tous les citoyens haïtiens présents illégalement en République Dominicaine au terme du processus de régularisation des étrangers seront susceptibles d’être expulsés, a confirmé cette semaine Ruben Silié Valdez, ambassadeur dominicain en Haïti.
Manque d’information et de mécanismes réalistes
De nombreux migrants/migrantes haïtiens ne sont pas informés-es des démarches à effectuer pour se faire enregistrer, n’ont pas pu obtenir les documents nécessaires et n’ont pas eu accès à des bureaux de proximité, regrettent les organisations.
Cette situation serait due à des manquements dans la mise en place des mécanismes plus réalistes susceptibles de faciliter l’application du plan de régularisation des migrants haïtiens, critiquent-elles.
La majorité de ces migrants sont dans une grande confusion et n’arrivent pas toujours à faire la différence entre régularisation et naturalisation, deux processus complexes qui se déroulent en même temps, reconnaissent-elles.
Ces organisations condamnent la poursuite des déportations qui ont tendance, selon elles, à augmenter depuis le début de l’année 2015, malgré les dispositions du Pnre qui recommande leur arrêt pendant que se déroule le processus d’enregistrement des migrants/migrantes.
Elles appellent « les autorités des deux pays à faire tout ce qui est en leur pouvoir afin d’éviter que des déportations massives, indiscriminées, aient lieu dans les jours à venir ».[emb kft gp apr 25/03/2015 11 : 55]