P-au-P, 17 mars 2015 [AlterPresse] --- Deux ans et deux mois après sa création, la commission présidentielle pour la réforme de la justice a soumis au chef de l’Etat, Michel Joseph Martelly, le 13 mars 2015, un « avant-projet de révision », selon la présidence, ou une « refonte totale du code pénal haïtien » selon Jean Joseph Exumé, l’un des commissaires.
« Ce n’est pas une révision. C’est une refonte totale du code pénal. Nous avons modifié, de fond en comble, le code. Nous avons tenu compte de la Constitution de 1987, des conventions et instruments internationaux ratifiés par Haïti et des nouvelles réalités sociologiques et socio-économiques du pays », explique Jean Joseph Exumé à AlterPresse.
Le code pénal haïtien est vieux de 180 ans (remonte à l’année 1835).
Si des organisations de droits humains, comme le Réseau national de défense des droits humains (Rnddh) et la Solidarité des femmes haïtiennes (Solidarite fanm ayisyèn/Sofa) ne mettent pas en doute « la compétence, la capacité » des membres de la commission et considèrent la soumission du document comme « un pas », elles regrettent, toutefois, qu’elles n’aient pas été consultées.
La commission, formée en janvier 2012, est composée des avocats Jean Joseph Exumé, Jean Vandal et Sybille Théard Mevs.
Pierre Espérance, directeur exécutif de Rnddh, déplore que la communauté internationale ait beaucoup participé dans ce travail, alors que les organisations haïtiennes n’ont pas été contactées.
Des ateliers d’échanges, des consultations d’experts étrangers ont été mis à contribution pour la réalisation de ce premier travail de la commission, confirme Me Exumé.
Toutefois, Espérance croit qu’ « il n’est pas trop tard ».
« Au moment de consulter les divers secteurs de la société sur le travail réalisé, nous serons disposés et disponibles pour donner notre avis », poursuit-il.
En effet, Me Jean Joseph Exumé souligne à AlterPresse que le document, soumis à Martelly, est une sorte de « draft » et que « la société doit donner son mot. Car, il faut une appropriation du texte par la société ».
Et le contexte électoral semble être « un moment opportun pour que le travail soit diffusé et que les candidats aux élections législatives, notamment, puissent commencer à prendre connaissance du contenu et s’engager à voter ou à proposer des changements s’ils sont élus ».
La commission présidentielle, qui se penche déjà sur le code de procédure pénale, nourrit « l’ambition que tout le processus se termine d’ici avant la date du premier tour de l’élection présidentielle [le dimanche 25 octobre 2015] ».
Quelques éléments du travail de la commission
Me Exumé précise que la commission s’inspire de la tendance très manifeste, dans le domaine des droits humains, qui postule « qu’on ne doit pas punir pour punir, mais plutôt punir en vue d’une réhabilitation de l’infracteur ».
Il y a, de cette façon, une nouvelle classification des peines.
Tenant compte de la problématique de la détention préventive prolongée, Exumé soutient que « la prison comme première sanction n’est pas toujours une bonne chose ».
C’est ainsi que « dans certains cas, on a pensé à des peines alternatives, comme les travaux d’intérêt général ».
Par rapport à la question de l’avortement, la commission propose une « décriminalisation partielle ».
Ce qui, sûrement, va relancer un grand débat dans la société haïtienne.
Depuis plusieurs années, le mouvement féministe haïtien prône la dépénalisation totale de l’avortement et l’accès à l’avortement sécurisé. [efd kft gp apr 17/03/2015 9:10]