Rien qu’en 2014, plus d’une centaine de personnes, originaires des 12 communes du département du Centre, se sont dirigés vers le Brésil, selon les données recueillies par AlterPresse.
Correspondance Ronel Odatte
Hinche, 20 févr. 2015 [AlterPresse] --- Le Brésil devient le nouvel Eldorado des jeunes du Plateau central en quête de travail.
Des maisons, des parcelles de terres et du bétail, tous sont mis en vente pour payer les frais de déplacement vers le géant sud-américain, selon des témoignages recueillis par l’agence en ligne AlterPresse.
La situation actuelle des jeunes au Plateau central
Au Plateau central, les conditions de vie d’une majorité de jeunes, âgés de 20 à 30 ans, se sont grandement détériorées de 2011 à 2014.
De Hinche à Cerca-La-source, de Mirebalais à Maïssade, les revendications sociales pleuvent. Nombreux sont ceux qui n’ont jamais accès aux soins de santé, à un logement décent ou à un emploi.
Les jeunes diplômés sont, pour la plupart, abonnés à l’oisiveté, jouant, à longueur de journée, aux cartes et aux dominos pour passer le temps.
Le Brésil, entre mystère et réalité
Aller au Brésil, c’est un mystère pour les uns et une réalité pour les autres.
Au Plateau central, comme dans d’autres départements d’Haïti (Ndlr : particulièrement dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince, où les files de personnes en quête de visa sont de plus en plus longues, quotidiennement, devant l’ambassade du Brésil à Pétionville), personne ne dispose d’information exacte ni, tout simplement, ne veut s’exprimer ouvertement sur cette question.
Des dizaines de familles ont déjà pris le risque de dépenser de fortes sommes d’argent (en monnaie américaine) pour aider une fille ou un fils à s’envoler pour le Brésil.
Mais, pour ce qui concerne l’organisation du voyage, cela reste et demeure un mystère.
Il reste que beaucoup utilisent les services de réseaux dce passeurs, qui les font transiter par divers pays, avant d’atteindre le Brésil.
Des témoignages révélateurs
Les approches ou les témoignages ne sont pas les mêmes : chacun cherche à protéger ses sources d’informations. Néanmoins, tout porte à croire que le voyage s’organise à l’extérieur du département du Centre.
Un père de famille, qui vient tout juste de payer les frais de voyage de son fils aîné, en direction du Brésil, confie quelques bribes d’informations, sans omettre certaines confusions.
Selon lui, il ne s’agit pas de se présenter à un quelconque consulat pour l’obtention d’un visa.
Le voyageur doit payer une somme de trois à trois mille cinq cents dollars américains (US $ 1.00 = 48.00 gourdes ; 1 euro = 60.00 gourdes aujourd’hui) pour : un visa dominicain et un visa brésilien sur son passeport, un billet d’avion et une réservation d’hôtel.
« Cela n’a pas été facile pour mon fils. Il a voyagé à Santo Domingo. Il y est resté pendant plus d’une semaine, avant de prendre l’avion pour le Pérou et ensuite traverser la frontière brésilienne », explique-t-il.
Tout n’est pas rose pour le fils de cet agriculteur - de la section de Juanaria (dans la commune de Hinche) - qui est, aujourd’hui, à la recherche d’un travail au Brésil.
57 ans, une habitante de la commune de Thomassique. a vendu une petite maison pour permettre à sa fille de s’envoler pour le pays du footballeur Neymar Da Silva, a-t-elle révélé à l’agence en ligne AlterPresse.
« Ma fille a terminé ses études en sciences juridiques depuis près de 3 ans. Elle ne travaille pas. Comment pourrais-je lui demander de rester en Haïti », déplore-t-elle.
Cette mère de famille a confié à « un messager spécial » la somme de trois mille dollars américains pour ce voyage. Sa fille a quitté Santo Domingo depuis deux mois, mais elle n’a pas encore mis ses pieds sur le territoire brésilien. La jeune femme se trouverait actuellement au Venezuela.
Destination finale
Aux dires des gens, qui en ont déjà fait l’expérience, le Brésil ne serait pas la destination finale des passagers.
Ces jeunes en quête de travail utiliseraient le Brésil comme un point de transit pour atteindre les Etats-Unis d’Amérique.
Les organisateurs de ces voyages laisseraient croire aux gens qu’ils pourront se rendre facilement à New York ou Miami, une fois installés au Brésil.
C’est pourquoi, les pères de familles n’hésiteraient pas à vendre leurs maisons, ou les parcelles de terres, et même une partie de leur bétail pour payer les frais de voyages de leurs enfants.
Une démarche, qui pourrait appauvrir davantage les familles vulnérables. [ro kft rc apr 20/02/2015 11:10]