Par Edner Fils Décime
P-au-P, 14 févr. 2015 [AlterPresse] --- Le dernier rapport de la Plateforme des organisations haïtiennes des droits humains (Pohdh) tire la sonnette d’alarme sur la violation des droits des défenseurs de droits humains en Haïti.
« La situation des défenseur (e) s de droits humains [sic] est alarmante et mérite que les autorités du pays assument leurs responsabilités, en garantissant le respect des droits humains en général, particulièrement celui des défenseur (e) des droits humains [sic] », selon les résultats de l’enquête dont a pris connaisssance, le 13 février 2015, l’agence en ligne AlterPresse.
L’étude a été conduite, entre octobre 2014 et janvier 2015, auprès de 27 défenseurs de droits humains dans 6 départements géographiques du pays.
81 % des défenseurs de droits humains, concernés par l’enquête, ont été victimes au moins une fois d’agressions et de menaces, au cours des années 2013 et 2014.
Agressions physiques, agressions verbales, menaces verbales et/ou écrites, menaces de mort, sont les types d’agressions ou menaces, subies par cette catégorie d’acteurs sociaux.
Les agressions verbales sont les plus courantes. Elles représentent 67 % devant les menaces verbales et/ou écrites (63%), les agressions physiques (48%), les menaces de mort (33%).
19% de la population des personnes enquêtées n’ont pas subi de menace ni d’agression, selon les données fournies par la Pohdh.
Présence des femmes dans le secteur et droits des Lgbt
En ce qui concerne la variable sexe, 68% des victimes sont des hommes contre 27% de femmes.
Ce chiffre est un indicateur, montrant combien les femmes ne seraient pas très impliquées dans la défense des droits humains, si on tient compte de l’hypothèse, soutenue dans l’étude, selon laquelle « plus les défenseur (e)s de droits humains sont engagés dans leurs luttes pour les droits humains, plus ils semblent être menacés et victimes de violations ».
Ce que reconnaît Antonal Mortimé, secrétaire général de la Pohdh, qui promet d’accentuer la sensibilisation sur ce manque, explicable par des facteurs culturels et les obstacles dressés par le patriarcat haïtien sur le cheminement des femmes.
L’engagement se mesure en nombres d’années de travail dans le secteur des droits humains.
« Dans le groupe de défenseur (e) s, engagés moins que 5 ans dans le secteur, le pourcentage de victimes dans le sondage était 73%, alors que pour les défenseur (e) s engagés plus que 5 ans, le pourcentage augmente jusqu’à 88% des répondants », lit-on dans le résumé du rapport.
Les victimes, qui militent depuis plus de 5 ans dans les droits humains, constituent 70% des cas de ceux qui reçoivent des menaces de mort.
Le secteur de défense des droits des Lesbiennes, Gays, Bisexuels et transexuels (Lgbt), à la lueur de l’enquête, se révèle comme un chantier de sensibilisation pour les organisations de défense des droits humains.
« Les 38% des défenseurs de droits humains, victimes des agressions et menaces venues de la population, sont principalement (83.3%) des défenseurs des droits des Lgbt », signale la Pohdh.
Le manque de tolérance de la population, l’absence de protection des défenseur (e) s et le manque de diffusion des conventions, relatives à la mise en association pour la défense des droits humains, sont quelques-unes des explications de cette situation, analyse Mortimé.
Autorités et partisans du pouvoir agressent, menacent, tandis que la justice reste silencieuse
Les autorités et les partisans du pouvoir forment une source importante d’agressions et de menaces.
37% des enquêtés les identifient comme auteurs.
La Police nationale d’Haïti (Pnh) représente 6% des cas identifiés.
Quoique les victimes portent plaintes formellement contre leurs agresseurs, la justice haïtienne n’en prend nullement compte, souligne l’enquête de la Pohdh.
« Environ trois quarts soit (73%) des défenseur (e) s des droits humains, [sic] victimes des agressions ou menaces, ont déposé une plainte formelle devant les autorités de l’appareil judiciaire concernées », révèle le rapport, précisant que plus de la moitié des répondants signalent un manque de suivi de l’appareil de justice.
Aucune victime n’a rapporté une résolution favorable de sa plainte par la justice.
83% des victimes, qui n’ont pas porté plainte, expliquent leur décision par un manque de confiance dans la justice haïtienne, alors que les autres 17% sont motivées par la peur, la crainte de possibles représailles.
La Pohdh propose une série de recommandations, dont un appel à l’Etat haïtien pour qu’il crée « une atmosphère de confiance pour que les défenseurs de droits humains puissent travailler en toute quiétude ». [efd kft rc apr 14/02/2015 1:20]