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Haïti – Société : Défendre le droit au port du dread contre les discriminations policières

P-au-P, 1er déc. 2014 [AlterPresse] --- L’organisation de défense des droits de la personne de disposer de son corps, International Dread (I-dread) tire la sonnette d’alarme sur des comportements et actions jugés discriminatoires d’agents de la police nationale d’Haïti à l’égard de citoyens portant des dreadslocks, des coiffures ostensibles se référant, parfois, au mouvement rasta.

I-dread dénonce des policiers nationaux cagoulés, appartenant à l’Unité départementale [de l’Ouest] de maintien d’ordre (Udmo), qui auraient coupé les cheveux de personnes arborant des dreads, notamment dans des quartiers populaires, comme au Portail Léogane (banlieue sud de la capitale), dans conférence de presse, le 1er décembre 2014, à laquelle a assisté l’agence en ligne AlterPresse.

« C’est une violation du droit de la personne de disposer de son corps », estime I-dread.

« Diligence d’une enquête pour découvrir les policiers impliqués dans ces actes discriminatoires, justice et réparation pour les victimes, un communiqué de l’office du protecteur du citoyen (Opc) condamnant cette situation, une position officielle de la police et du gouvernement sur la question » exige Guerchang Bastia, porte-parole de I-dread.

Adler Pierre, dans la vingtaine, témoigne de cette journée du jeudi 27 novembre 2014 « triste et fatale », quand il a vu ses cheveux - qu’il a laissés pousser plus d’une année - être coupés par « les ciseaux violents » d’un groupe de 6 agents de l’Udmo à Portail Léogane.

« Ils m’ont brutalisé, m’ont forcé à me coucher à même le sol et m’ont enlevé mes cheveux. C’est comme s’ils m’ont pris une partie de moi », raconte Pierre, artiste, photographe et caméraman.

Si ces agents peuvent couper les cheveux de ce jeune, sans son consentement et avec cette rare violence, « cela signifie qu’on pouvait lui couper les bras, les oreilles ou n’importe qu’elle autre partie du corps », soutient Frantzy Narcius, membre de I-dread.

« C’est de la provocation », lance Duckyns St-Eloi, alias Zikiki, batteur-chanteur du groupe Yizra’el, considérant que les policiers ne sauraient agir tout seuls, sans un ordre émané, quelque part, dans la hiérarchie.

Est-ce une décision prise au niveau de l’institution policière pour traquer les citoyennes et citoyens portant tresses, dreadlocks, perciengs et tatouages, dans une logique manichéenne « bonnes mœurs versus mauvaises mœurs » ?

AlterPresse a tenté vainement, le lundi 1er décembre 2014, d’entrer en contact avec les porte-parole, principal et adjoint, de la police nationale d’Haïti (Pnh), pour avoir la position de l’institution policière sur les dénonciations d’agressions d’agents de l’Udmo sur les personnes portant des dreadslocks.

« Dans mon cas, ce sont les cheveux de mon cadavre qu’on tondra », poursuit St-Eloi, visiblement très remonté contre ces actions de policiers nationaux « se croyant tout permis dans une société tèt kale hypocrite ».

Ces agissements des policiers nationaux rappellent étrangement la chasse aux hippies dans les années de la dictature duvaliériste et duvaliérienne, souligne Bastia.

Est-ce un signe pour dire que l’ancien régime est encore à nos portes et vient nous hanter jusque dans nos cheveux ? se demande Shiler St-Eloi.

Sit-in, manifestations de rues, séances de témoignages publics sont parmi les actions prévues par l’organisation I-dread pour combattre « discrimination et stigmatisation » à l’égard de personnes portant des tresses, des tatouages ou percings.

Une marche de protestation est annoncée, pour le mercredi 3 décembre 2014.

Elle partira de l’Ecole nationale des arts (Enarts) pour dire à la police nationale que toute la communauté dread est debout et attend qu’elle [la Pnh] vienne couper les cheveux de toutess et de tous, met en garde Guerchang Bastia. [efd kft rc apr 1er/12/2014 16:00]