P-au-P, 16 oct. 2014 [AlterPresse]--- Plusieurs intellectuels haïtiens prônent une appropriation présente des pensées préconisées et défendues par le père de la patrie haïtienne, Jean Jacques Dessalines, à l’occasion du 208e anniversaire de son assassinat, le 17 octobre 1806.
Selon eux, le dépassement des détails liés à la couleur de la peau, de la méfiance dirigée vers les autres et la pérennisation ou le renforcement des valeurs culturelles haïtiennes constituent le cadre nécessaire à la réussite de la transition d’une société traditionnelle à une société moderne en Haïti.
Ces réflexions ont été produites lors d’une conférence-débat ce 16 octobre à la Bibliothèque nationale autour du thème « Le Dessalinisme et ses procédures d’application », qui a réuni sur un même panel l’historien Pierre Buteau et l’écrivain Lyonel Trouillot.
L’égalité entre tous les Haïtiens, dénommés génériquement « noirs » suivant l’article 14 de la constitution du 20 mars 1805 et la mobilisation des moyens et ressources nationaux pour favoriser le bien-être de chaque Haïtien et de toute la collectivité, forment la vision dont parlent les intervenants à cette conférence-débat.
Ce besoin de retour à la perspective dessalinienne s’explique du fait que « le pays a fait fausse route », estime Pierre Buteau.
L’historien évoque la nécessité de faire un certain nettoyage, dans la réalité matérielle comme dans l’esprit de chaque enfant de la patrie.
« Il faut sortir de la Minustah (Mission onusienne de stabilisation, présente en Haiti depuis 10 ans), et des directives de l’international pour construire une démocratie », recommande Pierre Buteau.
Cette démocratie doit tenir compte « des besoins socio-économiques » des Haïtiens, et être capable de limiter les emprises de la mondialisation qui « n’a pas aidé » mais plutôt et surtout exposé le pays à toute sorte de consommation culturelle.
Or, l’« élément culturel constitue la base de l’édifice de tout projet de nation », soutient l’historien.
Pour sa part, Lyonel Trouillot appelle chacun à comprendre qu’« être Haïtien est une plénitude » et non « un défaut » comme cela est cru et diffusé actuellement.
Il déplore l’utilisation « terrible et rétrograde » que certains qui s’étaient identifiés ou qui s’identifient encore comme progressistes font du personnage de Dessalines, lequel, est le « Corps de la dignité haïtienne ».
L’écrivain invite chacun à prendre conscience que pour « l’Occident, le blanc », « nous (Haïtiens) ne pouvons pas exister, et la viabilité de la nation est tout le temps remise en question ».
Cette négation de l’Haïtien doit être rejetée, selon Trouillot, autant que le « traitement réductif » infligé à Jean Jacques Dessalines, par les oligarchies locales et internationales, lui privant de toute capacité et compétence intellectuelle, militaire et organisationnelle, ce qu’il a pourtant mobilisé pour aboutir à l’Empire d’Haïti (1804), aujourd’hui une République.
Emmelie Prophète Milcé, directrice de la Bibliothèque nationale d’Haïti (Bnh), intervenant en marge des débats, a, elle aussi, appelé, aux micros des journalistes présents, à ce retour vers le Dessalinisme.
« Une appropriation de la pensée dessalinienne, nous aidera à prendre les décisions pour bien gérer aujourd’hui », dans un « retour sur soi, à la base, au point zéro » pour arriver à un « développement collectif » du pays, souhaite-t-elle. [srh kft gp apr 16/10/2014 16 :05]