P-au-P, 15 octobre 2014 [AlterPresse] --- La possibilité mise en avant par le président Michel Joseph Martelly de diriger le pays par décret après le départ des députés et de la moitié des sénateurs en janvier 2015 contribuera à affaiblir son pouvoir et a créer une possible situation d’ingouvernabilité, craignent des personnalités contactées par AlterPresse sur le sujet.
Au regard de la constitution amendée, Martelly « n’a pas le droit de prendre des décrets pour diriger le pays. Ce faisant, il se mettrait dans un régime spécial avec tous les risques que cela implique » comme l’affaiblissement de son pouvoir, met en garde l’avocat Camille Leblanc.
Un président élu ne peut pas mettre la constitution en veilleuse pour créer un régime spécial et diriger par décrets, fait-il savoir estimant qu’un tel acte ferait perdre à Martelly sa légitimité et l’opposition aura tous les moyens de le combattre.
En septembre 2014, Martelly a dit être « prêt » à diriger le pays par décret alors que la fin du mandat des députés et de la moitié des 20 sénateurs en poste devrait expirer le deuxième lundi du mois de janvier 2015.
« La présence de seulement dix membres du sénat rendra le parlement dysfonctionnel. L’exécutif qui devrait mettre en place les mécanismes pour faire fonctionner les institutions a failli à sa mission », condamne Me Camille Leblanc.
La constitution amendée ne reconnait pas le décret, comme c’était le cas de l’ancienne constitution de 1987, rappelle Leblanc, indiquant que celle-ci prévoyait que seul le Conseil national de gouvernement (Cng) pouvait diriger par décret en attente d’élections devant aboutir à la mise en place d’un parlement.
Le Cng, une junte civilo-militaire ayant dirigé le pays après la chute du régime duvaliériste le 7 février 1986, aurait été le seul autorisé à prendre des décrets ayant force de loi dans un contexte spécial.
La loi électorale en vigueur prévoit la fin du mandat des députés et des 10 sénateurs pour le deuxième lundi du mois de janvier 2015, rappelle, pour sa part, le sénateur Wesner Polycarpe (opposition) qui se dit attaché à ce principe.
Il y aura une situation d’ingouvernabilité du pays à la fin du mandat des députés et des sénateurs. Ceci rendra Martelly encore plus illégitime, avertit-il.
Dans ce contexte, le destin du pays sera entre les mains de la population haïtienne et non de Martelly et de ses alliés internationaux, explique t-il augurant, du coup, un éventuel départ de Martelly et de l’équipe gouvernementale au pouvoir.
Il recommande au préalable, comme solution, de chercher une formule transitoire pour gouverner le pays et réaliser les élections pour la mise en place d’un gouvernement légitime.
Pour le président du sénat, Dieuseul Simon Desras, l’échéance du mandat des sénateurs devrait être le 9 septembre 2015 parce qu’ils ont prêté serment le 9 septembre 2009.
L’exécutif a rejeté toute idée de prorogation du mandat des parlementaires après le 12 janvier 2015, a fait savoir Michel Brunache, le porte-parole du premier ministre, lors d’une conférence à la primature, le mardi 14 octobre 2014.
Cette décision serait inconstitutionnelle, estime t-il, réaffirmant que le chef de l’État restera, de son côté, à son poste.
Le parlement sera dysfonctionnel en janvier 2015 et la seule autorité légitime sera l’exécutif, déclare Michel Brunache. [emb kft gp apr 15/10/2014 15 : 05]