Correspondance Shella Chauvette
Belladère, 2 oct. 2014 [AlterPresse] --- Alors que le dialogue entre Haïti et la République Dominicaine peine à renouer, les rapatriements de migrantes et migrants haïtiens se poursuivent, souvent au mépris des conventions entre les deux pays.
Un groupe de 19 hommes, 13 femmes, et 5 enfants a été ramené, à la frontière de Belladère, le lundi 15 septembre 2014.
Ces rapatriés étaient accompagnés de soldats dominicains, qui les ont déposés à Carizal, sur la frontière entre Commendador (chef-lieu de la province d’Elías Piña) et Belladère.
Tous ces rapatriés n’ont rien ramené de leur voyage en République Dominicaine. Ils rapportent avoir fait le trajet de retour sans rien manger.
Six (6) d’entre eux ont pu retourner chez eux, grâce à la générosité des chauffeurs dans la ville.
« Je viens de Léogâne (à une trentaine de km au sud de Port-au-Prince). Etant donné que j’éprouvais des difficultés pour donner à manger convenablement à mes cinq autres enfants, j’ai payé 2,500.00 pesos (1 peso = 1.10 gourde ; US $ 1.00 = 46.00 gourdes ; 1 euro = 65.00 gourdes aujourd’hui) à une cousine pour mon passage. A San Juan, elle m’a laissée chez un habitant de la zone. Depuis tantôt une semaine, je ne l’ai pas vue. Depuis hier, je ne peux rien donner à manger à un autre enfant de 3 ans, que j’ai emmené avec moi durant le voyage », se plaint la rapatriée Charlotte Juste.
Souvent, la plateforme Groupe d’appui aux rapatriés et refugiés (Garr) assiste les personnes rapatriées en situation difficile. Mais, à l’occasion des opérations de rapatriement du 15 septembre 2014, aucun animateur de la plateforme Garr n’était présent.
Les habitants de Belladère critiquent l’absence d’accompagnement étatique des personnes rapatriées sur la frontière.
Aucune structure étatique n’a pu accueillir, un groupe de 10 personnes, dont 7 hommes et 3 femmes, rapatriées, le lundi 5 septembre 2014, sur la frontière de Carizal.
« J’ai quitté le pays pour la République Dominicaine dans la perspective de gagner des revenus, qui me permettraient de prendre soin de ma famille. Si j’avais les moyens de valoriser mes parcelles de terre, je serais resté au pays, au lieu d’aller subir ces humiliations », indique le rapatrié Joël Desrosiers, originaire de Pignon (une commune du département du Nord, mais où les habitants entretiennent davantage de relations avec Hinche / Plateau central, géographiquement plus proche).
L’Association des femmes dévouées pour le développement de Los Poètes (Afddl) appelle l’Etat à mettre en place des structures de base pour accompagner les paysans et surtout les commerçantes.
« Ce sont nos semblables ! Ce sont des humains ! Leurs conditions déplorables de vie les poussent à aller vers la république voisine », souligne Julienne Dessources, vice-coordonnatrice de l’Organisation des femmes pour le développement de Botoncy (Ofdb).
L’Ofdb recommande l’octroi de moyens financiers et matériels aux structures étatiques, établies dans le complexe administratif à la frontière de Belladère, de manière à faire face aux problèmes récurrents de rapatriements en provenance de la République Dominicaine. [sc kft rc apr 02/10/2014 1:30]