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Haïti-Aristide : Un membre du Congrès américain, Maxine Waters, confie ses craintes à John Kerry

P-au-P, 16 sept. 2014 [AlterPresse] --- La congresswoman américaine Maxine Waters a adressé une lettre au secrétaire d’Etat John Kerry, exprimant son inquiétude pour la sécurité de l’ancien président haïtien Jean Bertrand Aristide, dans un contexte politique polarisé dans le pays caribéen.

La lettre, dont copie a été transmise à AlterPresse, est datée du 12 septembre et est également envoyée en copie conforme à Pamela White, ambassadrice des Etats-Unis en Haïti.

« Je crains qu’une situation dangereuse peut-être ne se développe qui pourrait conduire à une perte de vie et plus d’instabilité politique en Haïti », écrit Maxine Waters, représentante de la Californie et connue pour des positions pro-Aristide dans le passé.

L’ancien prêtre, devenu président d’Haïti à deux reprises et exilé autant de fois, est dans le viseur de la justice haïtienne pour corruption, blanchiment d’argent, et trafic illicite de la drogue.

Après le lancement d’un mandat d’amener, le juge d’instruction, Lamarre Belizaire, l’a fait mettre en résidence surveillée, soulevant une vague de réprobations dans le camp de ses partisans et même au niveau du barreau de la capitale, jugeant cette décision illégale.

Depuis août, des partisans d’Aristide campent devant sa demeure à Tabarre (périphérie nord-est). Ils ont même donné le ton à quelques occasions en incendiant des pneus érigés en barricades.

« On peut raisonnablement s’attendre à ce qu’ils encerclent sa maison pour prévenir son arrestation. Personne ne devrait souhaiter une confrontation entre les supporters d’Aristide et la police », souligne encore Maxine Waters, évoquant « un effort pour arrêter illégalement le président Aristide ».

Selon l’ordonnance d’assignation à résidence du juge Belizaire, des agents devraient être postés devant le domicile du chef historique du parti Fanmi Lavalas, mais les journalistes n’en ont remarqué aucun.

Dans la nuit du jeudi 11 au vendredi 12 septembre, les agents de l’Unité de sécurité générale du palais national (Usgpn) qui assuraient la protection d’Aristide ont été rappelés. Cela « laisse Aristide et sa famille totalement exposés », estime Waters.

Cette dernière appelle John Kerry, chef de la diplomatie américaine, à « intervenir immédiatement pour empêcher une confrontation inutile et dangereuse et assurer que le chaos ne s’ensuivra pas en Haïti ».

La crainte exprimée par Maxine Waters fait écho aux déclarations de certains membres du parti Lavalas à l’image de la coordonnatrice Maryse Narcisse qui a parlé d’une hypothétique manœuvre pour attenter à la vie de son leader.

Ce mardi 15 septembre, une délégation composée de membres d’organisations de base, de sénateurs et députés, proches de Lavalas, doivent rendre visite à l’ancien président. « Une [simple] visite de courtoisie », selon André Fadot du Mouvement national de l’opposition populaire (Monop).

Depuis la matinée de ce 16 septembre cependant, et notamment à Carrefour feuilles (secteur sud), les véhicules roulent sur les squelettes noircis de pneus qui ont brulé durant la nuit. La circulation était difficile sur la route des Dalles à causse des pierres semées sur la chaussée. Plus loin à la rue Monseigneur Guilloux des traces de pneus incendiés ont pu être remarqués.

Ces frémissements de tension interviennent alors que la situation politique est polarisée et la perspective des élections législatives, municipales et locales pour fin 2014 s’éloigne.

« La nation attend un dénouement, car la guerre civile est à nos portes », a prévenu le vice-président du Senat Andris Riché.
Riché a fait référence au blocage du processus électoral par le mano a mano entre l’Exécutif et le Législatif.

Un nouveau dialogue est annoncé mais aucune date ni aucun agenda pour l’instant.

Toutefois si ce dialogue a effectivement lieu, des figures de l’opposition pourraient manquer à l’appel. C’est le cas du Mopod qui continue de brandir ses conditions.

« Toutes les options doivent être sur la table. Si [Mopod] participe à un dialogue, il mettra aussi sur la table sa position sur la démission de l’équipe Martelly-Lamothe. Car ce sont eux qui sont responsables de la crise pour n’avoir pas organisé les élections à temps. Ils ne sont pas la solution mais le problème. Donc s’ils veulent qu’on s’en sortent ils doivent faire un geste », affirme Turneb Delpé du Mopod.

En retard de trois ans, le processus de ces élections suscite aussi l’agacement de la « communauté internationale » qui ne rate plus les occasions de jeter la faute du blocage sur un groupe de six sénateurs de l’opposition. Samantha Power, ambassadrice des Etats-Unis à l’Onu est sortie de ses gonds la semaine dernière, parlant de « prise d’otage des élections » par ces six sénateurs.

En réaction, les secteurs sociaux estiment que la communauté a une mauvaise lecture de la situation. [kft gp apr 16/09/2014 12:00]