P-au-P, 5 juin 2014 [AlterPresse] --- Après une première journée jugée satisfaisante, les pourparlers entre le président Michel Martelly et 15 sénateurs se sont achevés le 4 juin sans qu’un terrain d’entente ne soit trouvé sur la formation du Conseil électoral provisoire (Cep).
L’Exécutif et le Senat devaient parvenir à un consensus autour du Cep et favoriser ainsi le lancement du processus des élections législatives partielles, municipales et locales fixées au 26 octobre.
Après deux jours de discussion à Petionville, les divergences demeurent. Les deux parties ne seraient pas parvenues à s’étendre sur combien de conseillers électoraux il faut remplacer ou ajouter.
Au terme des pourparlers, Michel Martelly a évoqué encore une fois l’article 12 de l’accord d’El Rancho qui lui permettrait de passer outre les réticences du Senat pour lancer les élections.
« Il ne me reste plus pour faire les élections, que le fameux article 12 de l’Accord d’El Rancho, qui pour beaucoup ôte son pouvoir au parlement. Mais quand on se met autour d’une table pour négocier, pour faire des compromis, on perd de son pouvoir », a déclaré le chef de l’Etat, après la rencontre du 4 juin.
Martelly a affirmé avoir fait de nombreuses concessions comme la formation d’un gouvernement d’ouverture, intégrant des membres de partis politiques de l’opposition.
« Je suis arrivé à un point où je ne sais plus quoi donner. Puisque ce n’est pas moi qui ai établi l’article 12, ni l’Accord d’El Rancho, très probablement, je pense que tout ce qui me reste… si je ne trouve aucune autre solution c’est l’application de l’article 12 », ajoute le président, soulignant que « le pays tombera dans le chaos » si les élections n’ont pas lieu cette année.
L’article 12 avait déjà fait des vagues dans l’opinion après la signature de l’accord le 14 mars.
Le bâtonnier de l’ordre des avocats de Port-au-Prince, Carlos Hercule, avait réagi le considérant comme une menace aux fondements de l’État de droit, aux fondements juridiques et à la démocratie.
La Cellule de réflexion et d’action nationale (Cran) une organisation réunissant des secteurs sociaux, avait pour sa part appelé à réviser s’il y a lieu l’accord.
« L’accord d’El Rancho est un fiasco. Il n’a pas débouché sur la perspective d’avoir des éléctions libres, honnêtes et démocratiques dans le pays. Il n’a pas permis la mise en place d’une machine électorale capable d’inspirer confiance. Donc ceux qui y ont pris part cherchaient en fait à intégrer le gouvernement. Et si l’on n’y voit pas certains d’entre eux, ils ont tout de même des avantages », analyse Pierre Esperance, directeur du Reseau national de defense de droits humains(Rnddh).
Vingt-trois mandataires d’une cinquantaine de partis politiques, le président du Senat, Dieusseul Simon Desras, de la chambre des députés, Jacques Stevenson Timoléon, et le président Michel Martelly ont pris part aux discussions ayant abouti à l’Accord d’El Rancho.
Cet accord ne cesse de soulever des controverses poussant les sénateurs et Martelly à se réunir à nouveau cette semaine. Pour Pierre Esperance, l’issue en queue de poisson de ces ultimes pourparlers témoigne d’ « un manque de volonté de l’exécutif d’organiser les élections ». « La société réclame un Cep digne de confiance », ajoute t-il.
Pour l’instant, le Cep, censé compter 9 membres, fonctionne avec 7 personnes, et n’a pas la bénédiction du Senat.
L’organe électoral décrié s’est empressé fin mai de proposer un pré-calendrier électoral tout de suite rejeté par l’opposition.
Il faut six mois pour organiser les élections en Haïti, or il ne reste que quatre mois d’ici à octobre, retenu dans l’accord pour ces compétitions cruciales. Le mandat des députés s’achève cette année et celui d’un autre tiers du Senat en janvier 2015. Michel Martelly parle lui de chaos éventuel.
« Si Martelly ne voulait pas le chaos, il renforcerait les institutions. Martelly ne fait que répéter ce que dit la communauté internationale. Tout ca c’est pour la consommation internationale. Le pouvoir Tèt kale n’a rien fait pour empêcher le chaos dans le pays », relève Pierre Esperance. [apr 05/06/2014 15 :00]