Par Karenine Francesca Théosmy
P-au-P, 07 avril 2014 [AlterPresse] --- Alors que le pays connaît une période de soudure agricole précoce et difficile, tous les yeux sont rivés sur le processus d’application de l’Accord d’El Rancho, signé le vendredi 14 mars 2014 entre différents acteurs politiques, observe l’agence en ligne AlterPresse.
La période de soudure, qui a démarré en février dans un climat de sécheresse particulièrement sévère, ne s’achèvera qu’en juin prochain.
Durant ces cinq mois, si la campagne de printemps ne réussit pas, le pays pourrait enregistrer une nouvelle hausse du taux d’insécurité alimentaire.
Il s’agit là de la dernière prévision de la Coordination nationale de la sécurité alimentaire(Cnsa).
Ce n’est paradoxalement pas ce qui a agité les débats, encore moins les rues durant le mois de mars 2014.
Le parti Fanmi Lavalas et le Mouvement patriotique de l’opposition démocratique (Mopod) ont tenu des manifestations : l’un pour appeler au départ du premier ministre Laurent Salvador Lamothe, l’autre celui du président Joseph Michel Martelly.
Au sénat de la république, une controverse a poussé le sénateur Steven Irvenson Benoît à la démission du bureau, au grand corps.
Acculé par la levée de boucliers contre l’article 12 de l’accord d’El Rancho, qu’il a signé le 14 mars comme représentant du sénat, Steven Benoît a avancé, pour sa défense, qu’il n’avait pas lu le texte.
Entre-temps, cinq sénateurs se disent contre cet accord qui violerait la Constitution en permettant à d’autres institutions, autres que le parlement (comme le conseil électoral provisoire), d’ignorer le vote parlementaire (de fin 2013) sur la loi électorale.
Alors que ces sénateurs crient au viol de la Constitution, un autre n’a pas supporté qu’on le prenne en défaut.
Wencesclas Lambert a brutalisé, à coups de poing le dimanche 9 mars 2014, un étudiant à Marigot (Sud-Est). L’étudiant lui reprochait de ne pas avoir tenu ses promesses de campagne.
Comptant sur la justice pour réparer le tort que lui a causé le sénateur, l’étudiant a porté plainte. Pour cela, il faudrait que son immunité soit levée. Ce qui n’est toujours pas à l’ordre du jour.
Mais, le mercredi 2 avril 2014, le tribunal correctionnel de Jacmel a déclaré Wenceslass Lambert non coupable dans l’acte du 9 mars 2014. Les avocats de la victime projettent de faire appel contre ladite décision.
La levée de l’immunité de Wencesclas Lambert n’est d’ailleurs pas plus à l’ordre du jour que celle du député Arnel Belizaire.
Celui-ci est accusé par le ministère de la justice d’avoir soustrait, de force, des prévenus à la justice. Ces prévenus sont des agents de sécurité à l’Office nationale d’assurance-vieillesse (Ona), dont le directeur, Bernard Degraff, est accusé de corruption.
Ces deux cas résument bien l’image de l’appareil judiciaire haïtien, soumis au gré des puissants.
C’est, en tout cas, ce que critique le Réseau national de défense des droits humains (Rnddh) accusant l’exécutif d’avoir favorisé l’évasion de l’épouse du présumé chef de gang Woodly Ethéard, Marie Taissa Mazile Ethéart, libérée le samedi 29 mars 2014 après son arrestation le 26 mars.
Le président de la république est, une fois de plus, dans la ligne de mire des défenseurs de droits humains lui reprochant son accointance avec de présumés trafiquants de drogue.
Martelly a aussi soulevé une grogne lors du carnaval, début mars 2014, par rapport à l’exclusion, du défilé, de certains groupes critiques envers son administration.
Menaces à la liberté d’expression et propagande, ont dénoncé plusieurs secteurs.
Cela n’a pas empêché l’équipe Martelly de récidiver, le samedi 8 mars 2014, lors de la célébration de la journée internationale des droits des femmes.
Des participantes à la cérémonie officielle portaient, sans se cacher, des bracelets de couleur rose, marqués du nom du Parti haïtien tèt kale (Phtk), dont la filiation avec Martelly n’est pas à chercher.
Un air de campagne électorale qui n’a pas plu aux féministes !
Depuis bientôt trois ans, la question de ces élections, objet de discorde et de méfiance, s’invite dans tous les débats.
En mars 2014, cela faisait un an depuis que l’exécutif et le parlement étaient à couteaux tirés sur la formation du collège transitoire du conseil électoral permanent (Ctcep).
Un Ctcep, transformé en conseil électoral provisoire par l’accord d’El Rancho du 14 mars 2014. [kft rc apr 07/04/2014 10:40]