P-au-P, 24 mars 2014 [AlterPresse] --- Des controverses sont apparues particulièrement au parlement autour de l’accord intervenu le 14 mars entre les pouvoirs exécutif, législatif et les partis politiques, alors que cette semaine s’avère cruciale pour le processus politique haïtien.
Au centre des discussions se trouve l’article 12 du document qui impose un délai de 10 jours à tout amendement de la loi électorale par le parlement. Sinon, le Conseil électoral n’aura plus à tenir compte de l’avis de la chambre des députés et du sénat.
Cette perspective fait bondir des parlementaires qui remettent en question la signature même avec des réserves du sénateur Steeven Benoit, premier secrétaire de la chambre haute, qui a reçu mandat du président du sénat, Dieusseul Simon Desras.
Les confessions de Benoit
« J’ai tort, je l’assume et je ne vais blâmer personne d’autre », confesse le Sénateur Steven Benoît face à la presse ce 24 mars.
Il regrette, dit-il, d’avoir signé, pour le parlement, au nom du président de l’assemblée nationale, bien qu’il ait été mandaté pour le faire.
Le sénateur parle de « piège » et souhaite qu’une séance publique se tienne, où chaque sénateur exprimerait sa position, pour déterminer l’avenir de l’accord.
« Si (…) une quinzaine de sénateurs votent contre, l’accord tombe », escompte Benoît qui considère que l’article 12 est un ajout dont la teneur a complètement échappé à sa vigilance, compte tenu de la procédure de signature qui était trop pressante.
Le Sénateur reste convaincu qu’aucun amendement de la loi électorale ne pourra se faire dans l’intervalle des 10 jours exigés dans l’accord.
Les fondements législatifs et constitutionnels d’Haiti remis en cause ?
L’article 12 du dit accord est très critiqué également dans les milieux juridiques.
Le bâtonnier de l’ordre des avocats de Port-au-Prince, Carlos Hercule, estime que la « nature » même de cet article « remet en question les fondements de notre corpus juridique » et représente « une entorse à la constitution et aux lois haïtiennes ».
C’est une disposition contraire au « principe de l’abrogation des lois », car « seul un texte de loi peut abroger un autre texte de loi », précise l’homme de loi à AlterPresse.
C’est vraiment une menace aux fondements de l’État de droit, aux fondements juridiques et à la démocratie, ajoute-t-il.
Il appelle la médiatrice, la Conférence épiscopale (catholique romaine) d’Haïti (Ceh), à ramener, à la table des négociations, les différentes parties pour revoir l’article 12 du document.
Si le délai de 10 jours est observé, c’est cette semaine que la loi électorale devra être amendée par le parlement, suivant le vœu des parties ayant pris part au dialogue, en vue des élections annoncées pour le 26 octobre 2014.
Pourtant, aucun projet d’amendement n’a été acheminé au parlement, souligne Carlos Hercule.
C’est aussi cette semaine que des changements doivent intervenir dans l’équipe gouvernementale, dans le sens du gouvernement d’ouverture prôné par l’accord.
Entre-temps, l’exécutif a autorisé la promulgation d’une dizaine de résolutions non contraignantes du sénat et la loi sur l’Académie du Créole haïtien, qu’il gardait dans ses tiroirs après le vote du parlement. [jep srh gp apr 24/03/2014 18:50]